Chapitre 4

3 0 0
                                    


Mes jambes tremblent si fort que j'ai du mal à marcher. Je me tiens aux murs durant tout le chemin du retour. Mon mentor me précède dans les escaliers, vigilent, comme s'il se tenait prêt à me rattraper au moindre signe de chute. Nous entamons la descente d'un escalier en colimaçon et je ne tarde pas à avoir la tête qui tourne. Pourtant, je ne dis rien. En fait, je suis trop fatiguée pour émettre le moindre son. Ma respiration est saccadée mais tellement faible que mon mentor ne l'entend pas. Soudain, je dérape sur une marche. Un minuscule couinement s'échappe de mes lèvres, faible, mais suffisamment audible pour que mon mentor se retourne et me rattrape d'une main.

— Tu ne veux toujours pas que je te porte ?

Je secoue la tête. Pas question : j'ai eu ma dose de contact physique pour la semaine. Mentor Gamaliel lève les yeux au ciel, exaspéré, mais il n'insiste pas. Nous reprenons notre route en silence et, quand enfin nous arrivons au bas de cet escalier de malheur, je suis étonnée de constater que nous arrivons directement dans le couloir « nuit » de l'aile nord. Je jette un regard furibond à mon mentor qui me sourit, visiblement fier.

— Pourquoi m'avez-vous fait passer par tous ces couloirs au lieu de prendre ce chemin directement ?

— Tiens, tu as retrouvé ta langue, toi.

Je croise les bras, vexée.

— Allez, arrête de bouder, petite fille, et va rejoindre ton amie.

Je lève le nez et repère Cassie qui me fait un grand signe de la main. Je file vers elle sans saluer mon mentor et nous prenons le chemin de la salle à manger.

— Tu en fais une tête, me lance Cassie, est-ce que ça va ?

— Oui, oui, dis-je d'une voix légèrement agacée, je suis juste à cran et fatiguée.

— Je te comprends : mon nouveau mentor m'a fait travailler ma lumière pour la première fois ! C'était génial mais épuisant. Et toi ?

Je secoue la tête.

— Exercices de combat.

Hors de question qu'elle sache que je me suis pris une dérouillée. D'ailleurs, mon derrière s'en rappelle encore. Il faudra que je passe voir Sheril pour lui demander si elle n'a pas une pommade pour les mauvais coups...

— Une pommade pour les bleus ? Comment tu t'es fait ça ?

— Mauvaise chute, mentis-je.

Sheril me jette un regard qui en dit long sur ce qu'elle pense de mon mensonge mais ne fait aucun commentaire. Elle me tend un petit pot en terre que je fourre dans ma poche avec empressement. Je la remercie et quitte l'infirmerie. Sur le chemin du retour, je me demande ce qui a bien pu passer par la tête de mon mentor pour qu'il me frappe. A bien y réfléchir, ce n'était pas vraiment méchant. Je crois qu'il essayait juste de me donner une leçon, à chaque fois que je n'écoutais pas ce qu'il me disait. Mentor Gamaliel n'a pas cessé de me répéter qu'il fallait que je réfléchisse au lieu de foncer tête baissée, mais à chaque fois, je recommençais à ma sauce. Ou alors il voulait m'énerver, me pousser jusqu'à mon point de rupture pour que je lâche ce que je ne voulais pas dire. Si c'est le cas, ça a réussi. Une fois de retour dans ma chambre j'applique la pommade sur mon derrière endolori, qui soit-dit-en passant a eu du mal à supporter la chaise de la salle à manger, alors qu'elle est rembourrée, et aussi sur mon dos qui a pris quelques coups par-ci par-là. La pommade se met à chauffer doucement sur ma peau, c'est agréable. Je me couche sur le ventre pour éviter de solliciter mes bleus et ferme les yeux en espérant trouver le sommeil rapidement. Au bout d'une heure, je me lève. Insomniaque que je suis, c'aurait été surprenant que j'arrive à m'endormir après toutes les émotions par lesquelles je suis passée aujourd'hui. J'enfile ma tenue d'entrainement blanche et serre la ceinture noire autour de ma taille. Je sors de ma chambre et retrouve sans difficulté l'escalier en colimaçon par lequel mon mentor m'a fait revenir dans l'aile nord. Au bout d'une demi-heure, je m'arrête, essoufflée. Si j'allais moins vite, aussi... Je ne sais pas pourquoi je me presse autant. Une fois sortie de cet escalier qui me donne la nausée, je fronce les sourcils : je suis à une intersection mais je ne me rappelle pas de quel côté je dois aller. J'ai quatre possibilités : droite, gauche et deux couloirs devant moi. Une chose est sûre, c'est un des couloirs qui se trouve en face, mais lequel ? Au moment où je décide de m'engager dans celui de droite, une servante vêtue d'une robe taupe et d'un tablier blanc passe dans le couloir.

Ushuara - La chasse peut continuer (Tome2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant