Ushuara - La chasse peut continuer (Tome2)

Chapitre 21

Je me redresse sur un coude, surprise, et ancre mon regard dans les yeux dorés de Gamaliel. Il m'a menti ? Pourquoi ? Quelle est la vérité ? Il tend la main et replace une mèche rebelle derrière mon oreille en me dévorant du regard.

— Certaines lumières sont faites pour vivre ensemble. C'est une légende vieille comme le monde mais elle s'est vérifiée au cours des siècles.

— Qu'est-ce que tu veux dire ?

Gamaliel inspire profondément et s'assoit, dos contre le mur.

— Il existe une poignée d'Ushuaras par génération qui ne peut pas s'unir à quelqu'un d'autre que sa moitié. Ne me demande pas pourquoi, je n'en ai aucune idée. Ce que je sais, en revanche, c'est que je fais partie de ces rares Ushuaras...

Ses yeux font la navette entre mon nez, mes lèvres et mes pupilles. Je devine la suite avant même qu'il en prononce le premier mot.

— Et que tu en fais partie, toi aussi.

— Sur Terre, ils appellent ça des « âmes sœurs » mais le principe n'a jamais été prouvé. C'est plus une expression comme « c'est la femme de ma vie ».

— Au royaume Ushuara, on appelle ces couples inséparables « sêmilumina ».

— C'est du seirakah ?

— Oui.

— Qu'est-ce que ça signifie ?

Gamaliel secoue la tête.

— Ce mot ne se traduit pas.

Je croise les bras sur ma poitrine sans m'en rendre compte et mes yeux se perdent sur la peinture lavande pastel de la chambre. J'ai froid tout à coup.

— Anaya.

Je tourne la tête vers Gamaliel et son regard doré agrippe le mien instantanément.

— Tu es ma sêmilumina. Les émotions, positives ou négatives, que tu ressens envers moi, les doutes que tu as, sont des réactions normales. C'est inévitable. Tu te demandes si on est vraiment complets ensemble, si je ne vais pas t'abandonner...

Il s'interrompt lorsque je hoche la tête et glisse une main sur ma joue.

— Comment tu peux être sûr et certain que c'est moi, ta sêmilumina ?

Gamaliel ne me répond pas. Il pose simplement sa main sur la couverture, entre nous deux, paume vers le ciel. Une lueur dorée se met à battre doucement, invitante... Je place ma main à côté de la sienne, dans la même position et ma lumière apparaît aussitôt. Deux filins lumineux très fins s'élèvent lentement, comme deux cobras face à un charmeur de serpents, et s'enroulent l'un autour de l'autre.

— Voilà comment je sais que tu es ma sêmilumina, murmure Gamaliel, tu feras le test avec Nura et Quoré...

— Est-ce que ça veut dire que...

Je n'ose pas finir ma phrase. J'ai peur d'être ridicule et aussi d'être déçue. Il faut pourtant que je sache alors j'inspire profondément et me décide :

— Que nous pouvons...

Et allez ! Je ne vais pas y arriver c'est sûr. J'ai trop peur.

— Oui, Anaya : nous pourrons nous marier. Enfin...

Ah...

Ça me rassure de constater que je ne suis pas la seule à avoir du mal à terminer mes phrases.

— Si tu veux bien de moi.

Il me fait un clin d'œil et j'arrive enfin à sourire, soulagée. Gamaliel ne joue pas avec moi, bien au contraire. C'est très sérieux, ce qui nous arrive. Tant mieux parce que je ne veux pas d'une relation perdue d'avance. Je me blottis contre Gamaliel et soupire de bien-être lorsque je sens ses bras puissants m'enlacer. C'est agréable. Mes paupières se ferment doucement, bercées par les battements de cœur de mon sêmilumina et ma respiration se cale sur la sienne. Je sais que je ne devrais pas m'endormir contre lui parce que ça lui donnerait une excuse pour rester dans ma chambre et ça ne doit pas arriver. Je ne veux pas que les autres se fassent des idées à notre sujet. Je n'ai même pas envie qu'ils sachent que Gamaliel est mon « âme sœur ». Je veux garder ça pour nous, rien que pour nous deux. Un petit secret qui crée un lien fort et indestructible. D'ailleurs, maintenant que Gamaliel m'a expliqué ce que nous sommes l'un pour l'autre, je comprends mieux pourquoi je suis si attirée par lui, au point de me sentir mal lorsque nous nous retrouvons loin l'un de l'autre.