Chapitre 11

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J'enfile ma tenue de combat blanche en marmonnant. Je ne sais pas ce qui se passe mais il faut que cela cesse. Rien qu'hier, on m'a traitée comme une reine ! Comment pourrais-je leur faire comprendre que je ne suis pas celle qu'ils croient ? Ce matin, au réveil, j'ai trouvé un plateau en argent posé sur une table avec le petit-déjeuner. Comment ont-ils fait pour que je ne les entende pas ? Je descends les escaliers et rejoins mon mentor à l'étage inférieur. La veille, il m'a montré une pièce, ou plutôt un balcon, dans laquelle il voulait que je m'entraine. J'arrive dans la salle et referme les portes en bois derrière moi. Cette pièce est étrange. Il y a un toit mais c'est un balcon et semble avoir été creusée dans la roche. Le sol est couvert d'une mosaïque de morceaux de pierres polies toutes plus sombres les unes que les autres.

— Bonjour Anaya, lance-t-il, bien dormi ?

— Il faut que ça s'arrête, dis-je sans lui répondre, je ne sais pas pour qui ils me prennent mais je ne peux pas continuer de leur mentir ainsi.

Le rire bas de mon mentor résonne dans la pièce. Il me fait signe de m'approcher et je m'avance vers lui, méfiante.

— Assieds-toi. Maintenant, je peux répondre à toutes tes questions mais avant cela, j'aimerais te raconter une histoire.

Je lui jette un regard dubitatif mais m'assois en tailleur sans broncher.

— Cette histoire s'est déroulée il y a soixante-cinq ans. A cette époque, c'est mon arrière-grand-père qui était roi. La famille Xantreïs et la mienne avaient l'habitude de collaborer ensemble, d'allier leurs puissances pour gouverner le royaume Ushuara. Pourtant, un jour, le roi Oshorê VI décréta que les Xantreïs avaient acquis trop de pouvoir et il décida de les écarter du gouvernement. Même si les Xantreïs ne comprirent pas la raison de ce rejet soudain, ils s'y plièrent sans protester. Malgré leur exclusion de la cour royale, le roi Oshorê, en homme jaloux, décida que les mettre à l'écart n'était pas suffisant et mobilisa toute son armée pour les exterminer. Cette guerre, qu'on a plus tard appelée Guerre de lumière, a duré cinq ans et n'a cessé qu'a la mort du dernier Xantreïs.

Je ne sais pas pourquoi mais cette histoire résonne étrangement en moi. Comme si elle me concernait directement.

— Ce que le roi Oshorê ignorait à ce moment-là, c'est que les Xantreïs avaient découvert un nouveau monde, une planète nouvelle, la Terre. Ils étaient partis l'explorer et avaient rapporté quelques objets venant de cette planète.

Mon mentor marque une pause et me fixe droit dans les yeux.

— Tu comprends où je veux en venir ?

Je hoche la tête mais je ne suis pas certaine de bien comprendre.

— Récemment, poursuit mon mentor, mon père, mes frères et moi avons découvert qu'un membre de la famille Xantreïs avait fondé une famille avec une femme originaire de la Terre. Au moment du génocide, cet Ushuara a décidé de revenir au royaume pour se battre aux côtés de sa famille en laissant sa femme enceinte, sans savoir qu'il n'en reviendrait pas. Si l'enfant était né avant le début de la guerre, il serait mort avec sa famille, et la femme elle-aussi. Nous pensons que cet enfant était l'un de tes grands-parents biologiques.

Je fixe un point dans le vide, sonnée. Je suis une Xantreïs ? J'appartiens à cette famille ? Où sont mes vrais parents ? Et mes grands-parents ? Ont-ils été tués ou capturés par des scientifiques comme je l'ai été ? Quelques larmes coulent sur mes joues et je sors en courent de la salle. Ma course me mène jusqu'à la galerie et je m'arrête sur un banc molletonné, pile en face du portrait d'Alinéor. Je lève les yeux vers elle et constate, effarée, que Gamaliel a raison : je lui ressemble. Qui était-elle par rapport à moi ? Une arrière-grand-mère ? Une grand-tante ? Je ne le saurais peut-être jamais. Des hommes, des femmes, des enfants, tous ces gens assassinés par la folie d'un roi jaloux, vivants par ces tableaux...

Ushuara - La chasse peut continuer (Tome2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant