Chapitre 5

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Je me réveille reposée, et l'esprit prêt à travailler. J'étais bien, couchée dans l'herbe grasse, ma peau réchauffée par quelques rayons de soleil qui ont réussi à passer à travers le feuillage des arbres. Un bruissement à ma gauche me fait ouvrir les yeux. Mon mentor est assis contre un arbre et regarde vers l'autre rive.

— Viens voir, murmure-t-il, approche doucement.

Je le rejoins sur la pointe des pieds, intriguée et méfiante. Soudain, il pointe une direction du doigt et je la suis des yeux. Une main se plaque sur ma bouche au moment où un cri de surprise allait en sortir, risquant de faire fuir le splendide animal qui se tient non loin de nous. De loin, on dirait un zèbre de la taille d'un petit chevreuil mais en l'observant bien, je remarque de nombreux détails étonnants. La créature a de fines pattes qui lui donnent une silhouette gracieuse, une crinière en brosse noire, une petite queue touffue semblable à celle d'un lapin et d'immenses oreilles pointues.

— Voilà dix ans qu'on en avait plus vus par ici, murmure mon mentor, on a de la chance.

— Mais qu'est-ce que c'est ?

La créature lève la tête d'un coup et nous nous taisons, par peur de nous faire repérer. Ses oreilles poilues pivotent, à la recherche de sons étrangers, puis l'animal décrète qu'il n'y a pas de dangers et recommence à grignoter... l'écorce d'un arbre ?

— C'est un azrok. Ou plutôt « une » azrok : les mâles ont des oreilles plus petites et sont plus gros. Ils se nourrissent de mousse, champignons, écorce morte... tout ce qui gêne les végétaux dans leur croissance.

— Elle est magnifique !

L'azrok arrache un bout d'écorce moussue d'un tronc et le mâchouille en observant les alentours.

— Elle sait que nous sommes là, murmure mon mentor, seulement, elle ignore où nous nous trouvons.

Pourtant, la bestiole n'a pas l'air inquiète. Elle est seulement vigilante et elle a raison. Plus les secondes passent, plus je comprends pourquoi cet animal est important pour l'écosystème de ce monde : à la manière des insectes, sur Terre, l'azrok nettoie la nature, recycle, débarrasse tout ce qui est mort ou gênant pour la flore. C'est un moment magique. Voir de mes propres yeux un animal dont j'ignorais l'existence, c'est grisant ! L'azrok finit par repartir tranquillement. Je reste figée quelques minutes, fixant l'endroit où elle se trouvait auparavant, en espérant qu'elle revienne. Mais elle doit avoir des petits dont elle doit s'occuper. Je pose la question à mon mentor qui hausse les épaules, peu certain.

— C'est possible mais cette espèce se reproduit assez difficilement et il n'est pas rare que les petits meurent au bout de quelques jours.

Cette réponse me fait l'effet d'une douche froide. Pourquoi ce sont toujours les plus beaux animaux qui disparaissent plutôt que ceux qu'on aime moins ? Ce n'est pas juste.

— Bon alors, lance Mentor Gamaliel, tu es prête à travailler ?

Je hoche la tête et nous reprenons les mouvements qui m'avaient donné tant de fil à retordre ce matin. Après encore trois échecs, je finis par réussir et je me mets à sautiller partout comme une enfant, heureuse d'avoir réussi. Mon mentor me fixe, un sourire énigmatique sur les lèvres.

— Quoi ? dis-je en m'arrêtant.

— Non, rien. J'ai juste gagné un pari.

— Quel pari ?

— Mon frère, Varpaïm, avait parié que je ne te verrais pas sourire avant un an. Il vient de perdre.

Je cligne des yeux, étonnée. Je... j'ai souri ? Mon mentor hoche la tête et je crois distinguer une flamme dans ses yeux dorés, une lueur de... oui c'est ça : une lueur de fierté.

Ushuara - La chasse peut continuer (Tome2)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant