Chapitre 14🪽

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Saya avait imaginé qu'elle aurait dû batailler pour empêcher Alaynah de venir avec eux. Il n'en avait rien été. Elle semblait incapable de se décrocher de son chevalier servant : Arken. C'était une bonne chose, tentait de se convaincre la jeune femme. Un peu comme avec les dragons, une certaine connexion s'était établie entre eux et Arken donnait l'impression de leur faire confiance, à Franck et elle. Aussi, Alaynah s'alignait sur lui, ce qui simplifiait grandement les choses, il fallait l'admettre.

Récupérer Argos était vite devenu une priorité et peut-être que la présence d'Arken aurait aidé, mais Alaynah aurait été au moins autant en danger dans les environs directs de Lawrence Jeliz, qu'elle était face aux martyrs. En restant en Autriche, Saya pensait qu'elle était à l'abri pendant encore un temps. Il était cependant hors de question de la laisser seule. Elle était donc demeurée là-bas avec son chevalier.

Pendant ce temps, une fois de plus, Saya traversait l'Atlantique et, pour ainsi dire la moitié du globe, pour rejoindre Fresno, en Californie. Elle ne pouvait en être certaine, mais il semblait évident que c'était là que Jeliz gardait son dragon.

— Comment tu peux le savoir ? avait demandé Niel que la perspective de reprendre l'avion si vite n'avait pas enchanté.

En sa qualité de seul pilote de leur petit groupe, il était obligé de les suivre, où qu'ils aillent par la voie des airs. Impossible pour lui de passer une journée à ne rien faire d'autre que jouer à la console ou regarder la chaîne de sport.

— Ça me semble logique, c'est tout, avait-elle alors répondu avant d'expliquer sa théorie.

Jeliz avait très certainement choisi de s'installer à Fresno pour deux raisons. La première était sa position centrale en Californie, son fief, qui lui permettait de se rendre partout sur son territoire en un délai assez court. La seconde, c'était que Fresno, malgré son statut de capitale du comté, restait moins dense qu'une ville comme Los Angeles et, de par sa localisation, voyait passer de très nombreux camions. Son propre système de transport passait donc facilement inaperçu parmi la multitude. Son immense propriété se cachait d'ailleurs au sein d'un complexe de stockage en bordure de la ville. Pour atteindre sa villa, au cœur d'un écrin de verdure, il fallait d'abord franchir une zone immense sur laquelle s'étendait une bonne dizaine de hangars, de longs parkings à camion et des zones de stockage de conteneurs. Il dormait littéralement au milieu de ses trésors.

Voilà pourquoi Saya avait la certitude qu'Argos, qui se trouvait être un véritable dragon et donc une pièce inestimable, ne pouvait être entreposé n'importe où. Elle supposait même qu'il gardait la statue quelque part dans son jardin, de la même manière qu'elle gardait Nolak sur son propre terrain. C'était le seul moyen d'avoir toujours un œil sur lui.

— Il aurait pu le mettre au zoo ? avait alors rétorqué Niel, déclenchant un sourire sur le visage de Franck.

Certes, le zoo de Fresno possédait quelques statues imposantes de dinosaures, mais Saya insista une nouvelle fois sur le fait qu'il était bien trop risqué de se séparer de ce dragon.

En l'occurrence, ils seraient très bientôt fixés, puisque Saya, au volant de leur voiture de location, entrait sur la zone d'entrepôt de Lawrence Jeliz.

L'endroit était particulièrement plat et les quantités invraisemblables de béton au sol rendaient le décor surréaliste. La route par laquelle ils entrèrent les fit d'abord traverser un immense parking quasi vide. Il y avait quelques camions éparpillés, sans remorque, mais rien de plus. Après quelques centaines de mètres, ils passèrent devant le premier hangar dans lequel il semblait y avoir de l'activité. En passant devant l'une des portes ouvertes, ils purent apercevoir des ouvriers débarquer des caisses de trois camions garés côte à côte. Plus loin, quelques piles de conteneurs vinrent casser la platitude des lieux et derrière, enfin, ils purent découvrirent les murs délimitant la demeure de Lawrence Jeliz. De l'extérieur, ces longues parois de béton gris, lézardées par endroit, ressemblaient plus à l'enceinte d'une prison qu'autre chose. Pourtant, quelques pointes d'arbres dépassaient çà et là, indiquant qu'il y avait de la végétation à l'intérieur. Une oasis en plein désert.

Héritière de l'ætherOù les histoires vivent. Découvrez maintenant