Chapitre 25🪽

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Depuis qu'ils étaient arrivés à l'aérodrome, Saya ne cessait de s'en vouloir d'avoir envoyé Argos aux États-Unis. Il n'aurait probablement fait qu'une bouchée de ce Tohlen, malgré la menace qu'il représentait pour eux en ce moment. Elle avait vu son petit frère englué dans la bave si particulière du dragon de l'eau. Elle avait lu quelque chose sur le sujet sans vraiment comprendre les termes techniques. Ce qu'elle en avait compris, c'était que sa bave se solidifiait comme de la glace à température ambiante. Dans aucune des descriptions qu'elle avait lues, en revanche, il n'était fait mention de l'aspect gélatineux ou de l'odeur nauséabonde. Même à une dizaine de mètres, elle avait eu le cœur soulevé par l'odeur. À tel point qu'elle avait d'abord cru que c'était pour ça que Niel gémissait.

Lorsqu'il avait appelé à l'aide à voix haute, quelques minutes plus tôt, il avait cependant précisé que ça le brûlait atrocement. Pour autant, personne n'avait rien fait pour lui venir en aide d'une quelconque manière. Il y avait fort à parier qu'il était surveillé et que le premier qui s'approcherait de lui se ferait descendre ou capturer. Il semblait que tout le monde en était venu à la même conclusion et Niel avait cessé de demander qu'on le libère après qu'une rafale avait résonné.

Cela faisait peut-être cinq minutes à présent qu'elle progressait en tournant en rond dans le brouillard de Franck. Elle n'était pas perdue. Pas vraiment. Elle refusait de quitter cette protection sans avoir remis la main sur Alaynah. Dans le brouillard, ils étaient à l'abri. Même les rafales de mitraillettes étaient moins dangereuses. Franck était capable de moduler la densité de sa brume. En certains points en direction du hangar où s'étaient cachés leurs assaillants, il avait été jusqu'à ériger des murs. Ce n'était probablement pas suffisant pour stopper les balles, mais bien assez pour les ralentir, selon lui.

— Tu as un plan ? chuchota Saya à son intention.

Il était accroupi derrière elle et n'y voyait pas plus qu'elle. C'était le seul véritable inconvénient de cette stratégie.

— Si chacun ne s'était pas barré dans son coin, on aurait pu essayer de fuir, mais là, ça me semble compromis, se contenta-t-il de répondre en haussant les épaules.

Il avait réussi à éliminer deux martyrs. Le premier en le desséchant jusqu'à ce que son corps ressemble à celui d'une momie égyptienne et le second avec une rafale de mitraillette. Il avait ensuite donné l'arme à Saya en prétendant que c'était une sensation horrible que de sentir cette arme trembler entre ses mains. Saya n'avait rien répondu. Non seulement elle pensait qu'il était plus précis avec son pouvoir, mais par ailleurs, elle aimait autant être armée dans les circonstances actuelles.

Depuis, ils n'avaient croisé la route de personne. Le dragon avait manifestement craché sa bave brûlante sur un employé de l'aérodrome et il s'était passé quelque chose avec Arken. Alaynah avait hurlé son nom, preuve qu'elle était toujours vivante et hors d'atteinte des martyrs. Pour le moment, du moins.

Lorsqu'une ombre immense se découpa à quelques mètres devant eux, Saya relia le bruit de raclement sur le sol et Tohlen. Elle se souvint qu'il n'avait pas de pattes, mais uniquement des nageoires. C'était ces accessoires qui le rendaient si dangereux dans l'eau et si lent sur la terre ferme.

— Tu peux faire quelque chose contre lui ? glissa-t-elle à l'oreille de son compagnon, alors qu'il reculait le plus discrètement possible.

— J'ai essayé, répondit-il. Je ne sais pas s'il ne contient pas d'eau ou s'il a un genre de barrière de protection, mais ça ne marche pas.

Saya acquiesça. Cela ne la surprenait pas outre mesure. Après tout, les quatre dragons étaient réputés indestructibles et, de toute évidence, immortels. Quelle que soit la façon dont cela fonctionnait concrètement, il était normal que Tohlen soit insensible au pouvoir de Franck. Même si le contraire les aurait bien arrangés.

Héritière de l'ætherOù les histoires vivent. Découvrez maintenant