Chapitre 19🪽

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Lorsque Noa débarqua du vol commercial qui l'avait de nouveau conduite à Vienne, en Autriche, elle ne fut pas vraiment surprise de repérer un martyr.

Celui-ci avait environ trente-cinq ans, était de taille moyenne, cheveux bruns et barbe naissante assombrissait son visage rond. Il était adossé à un mur dans la file d'attente des taxis. Noa le reconnut comme un martyr à cause de son petit sac à dos. Il l'avait enfilé un peu vite, sans doute. Une des lanières maintenait sa chemise à manches courtes dans une position qui laissait visible un tatouage, au-dessus de sa hanche : une double paire d'ailes. Par ailleurs, il pianotait sur son téléphone portable en jetant des coups d'œil furtifs en direction du chevalier du feu.

Noa sourit. Elle aimait jouer à repérer les espions de la secte. C'était un passetemps qu'elle avait développé très jeune. Ces gens, où qu'ils soient sur la planète, ne vivaient que pour apporter des informations au réseau Witness. Ils avaient pourtant, souvent, un métier en plus. Malgré cela, comme celui-ci qui traçait les déplacements de Noa, chacun des martyrs renvoyait par textos quantité de données jusqu'au QG qui traitait ensuite le tout, afin d'en extraire de véritables informations. L'avènement des téléphones portables devait avoir grandement modifié leur mode de vie, songea Noa en s'approchant du martyr.

Elle lut, un instant, la panique dans son regard, puis il regarda l'écran de son téléphone et sembla se détendre avant de lui sourire. Elle signa un bonjour poli, puis lui demanda comment il allait. Il lui répondit tout aussi poliment avant de lui tendre son téléphone qui vibrait. Les martyrs étant muets, il était peu commun de les voir recevoir des appels vocaux. Elle était donc la destinatrice de la communication.

Elle leva les yeux au ciel avant de porter l'appareil à son oreille.

— J'écoute ! déclara-t-elle sachant déjà qui était à l'autre bout de la ligne.

Calvin la salua sans joie avant de lui demander ce qu'elle faisait de retour à Vienne. Il lui annonça d'emblée qu'il était au courant de son escapade à Minneapolis et elle sourit. Si elle avait voulu lui cacher, elle n'aurait sans doute pas utilisé le jet privé de la secte pour s'y rendre.

— Je sais bien que tu m'as interdit d'aller rendre visite à Ethan, répondit-elle un peu sèchement, mais j'avais vraiment besoin de le voir.

— Je ne te le reproche pas, contra Calvin. À vrai dire, je pensais que tu lui aurais rendu visite bien plus tôt. D'une certaine façon, je suis surpris qu'il t'ait fallu tout ce temps pour me désobéir.

Noa sourit. Elle avait en effet hésité à plusieurs reprises, mais jusqu'à présent, sa loyauté avait été sans faille.

— Ce que je te reproche, en revanche, poursuivit Calvin d'un ton plus sentencieux, c'est de ne toujours pas être de retour ici pour faire ton rapport complet.

— Tu sais déjà l'essentiel, claqua-t-elle. Sophia est morte et Shala dans la nature.

— Et j'aimerais plus de détails, jeune fille !

Noa soupira. Elle détestait quand on l'appelait ainsi. Son père le faisait pour la rappeler à l'ordre, à l'époque. Déjà dans la bouche d'Ethan, cette expression lui hérissait le poil. Dans celle de Calvin, c'était pire.

— Eh bien, il n'y en a pas, répondit-elle sur le même ton.

— Et que fais-tu de retour en Autriche ?

Silence.

C'était une excellente question. Que faisait-elle là-bas, au juste ? Ça lui avait paru une bonne idée. Revenir chez les Lodlik. Mais pour y faire quoi ? Elle ne savait pas trop. En se pointant chez Saya Lodlik, elle allait, au mieux, tomber sur une scène de crime vide ; au pire, se retrouver nez à nez avec deux puissants chevaliers qui ne feraient qu'une bouchée d'elle. Et pourtant, elle était en route pour Bärnkopf.

Héritière de l'ætherOù les histoires vivent. Découvrez maintenant