CHAPITRE XXI

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Le jeune Roi ne put davantage profiter de la soirée après le départ de la jeune rebelle. Il n'arrivait pas à la sortir de ses pensées. Son être tout entier se languissait dès lors de son absence. Il était rempli d'une euphorie qu'il n'avait plus ressenti depuis sa tendre enfance au seul souvenir de leur échange. Le Roi pénétra prestamment dans ses appartements, se débarrassa de sa veste et se dirigea vers son balcon. Si seulement il pouvait la voir de là, si seulement il pouvait l'avoir auprès de lui.

Il repensa à leur discussion, à sa fougue légendaire, à son intensité, à ses lèvres, à sa peau douce et délicate, à ses yeux scintillants, à elle tout entière.

Et il se demanda s'il n'avait pas été contradictoire dans sa demande. Il ne voulait pas lui mettre de pression pourtant il lui avait donné un délai. Et s'il était encore allé trop loin? Elle avait l'air si choquée de ses révélations qu'il avait peur de s'être trompé.

Idae, la jeune femme qui arrivait à l'ébranler. Était ce une bonne ou une mauvaise chose ? Son père l'avait envoyé dans ce centre à cause de ce sentiment qui l'inonde de toute part à présent. Ce sentiment qui est sensé affaiblir et rendre misérable. Devrait il se sentir faible compte tenu de ses sentiments? Ernos n'en était pas certain. Au contraire il avait l'impression que tout son être était combler d'une force herculéenne, il savait qu'il serait prêt à tout pour elle. Sa seule faiblesse c'était elle, ce qui ne lui déplut en aucun cas car cela lui procurait un ardent désir de protection.

Il ne voulait plus lutter car ce qu'elle lui inspirait venait de terrasser ses dernières barrières. Il avait essayé de les camoufler, les étouffer ce qui n'a réussi qu'à faire du mal à celle qui avait réveillé son cœur et à le rendre plus misérable qu'il ne l'était déjà.

Il allait désormais vivre pleinement car il savait au fond de son cœur qu'elle viendrait.

****

Esra tournait la pâte d'un gâteau au chocolat dans sa cuisine. Très joyeuse que son fils ait un an de plus. Après tout ce qu'il avait traversé et qu'il continuait de traverser jusqu'à présent, sa mère ne pouvait que le trouver très courageux. Sa différence n'a jamais vraiment été acceptée. Il existait des gens tellement bornés et affables qu'ils se permettaient de rabaisser les autres juste parce qu'ils n'entraient pas dans les cases imposées par la société. Son fils n'avait pas eu d'autres choix que d'être hors de ces cases et Dieu merci pour ça. Voir le monde à travers les yeux d'un enfant avait quelque chose d'apaisant. Si seulement Esra avait pu garder son âme d'enfant! Ce serait plus facile d'être moins pessimiste quant aux relations humaines et plus apte à rêver d'un monde idyllique, féeriques. Néanmoins être réaliste n'avait pas que des mauvais côtés. Dans la vie, il devait y avoir tous ces événements aussi bons que mauvais afin de renforcer la perpétuelle recherche de soi et d'affiné les tissages de la sagesse que nous forgeaient les expériences.

Une pensée pour son mari vint effleurer son âme la déstabilisant au passage, cependant, elle préféra garder cela pour plus tard de peur de fondre en larme dans la pâte du gâteau de Céryl. Celui-ci taquinait une poule à l'extérieur de la maison remarqua-t-elle lorsqu'elle jeta un coup d'œil par la fenêtre qui donnait directement sur la cour arrière. Elle l'observa tendrement, ses yeux brillaient d'une gaieté innocente. Esra se félicita et remercia le Ciel de lui avoir donné d'aussi beaux enfants.

Des pas redondants sur le plancher commençaient à lui donner des migraines.

- Idae, est-ce que tu peux m'arrêter ce boucan? Pourquoi est-ce que tu tournes en rond dans ta chambre? lui cria-t-elle de la cuisine.

Sa petite fille était devenue une belle et jeune femme qui, depuis son retour du château n'avait de cesse d'être songeuse. Idae avait toujours eu les pieds sur terre, elle avait toujours été pragmatique, elle avait toujours été brave. Alors, cette nouvelle facette rêveuse de sa personnalité n'avait de cesse de surprendre Esra.  Et en tant que mère évidemment qu'elle était curieuse de savoir si Idae avait un amoureux mais la concernée ne se confiait jamais.

Elle affrontait toujours tout toute seule ce qui attristait beaucoup sa mère. Elle avait dû assumer très tôt un rôle qui ne lui était normalement pas destiné.

Esra soupira. C'était ça la vraie vie! pensa-t-elle.

Toutefois, elle ne s'empêchait pas d'espérer que sa fille se permette elle aussi de rêver un jour.

- Je suis désolée, maman!! lança la jeune fille à son tour en essayant de dissimuler le trouble dans sa voix.

- Deux jours !! Pourquoi un tel délai ? se murmura-t-elle visible agitée.

Idae ne savait plus où donner de la tête depuis son retour du château. Elle était aussi déboussolée que pensive. Elle ne savait pas si elle devait en rire ou alors fondre en larmes. Ses émotions tournaient entre confusion et euphorie. Une partie d'elle avait peur de ce nouveau visage que le Roi lui avait montré. Il avait l'air si sincère et perçant lorsqu'il lui disait toutes ces choses qu'elle les sentait engloutir son cœur dans ce monde parallèle qu'était l'âme du Souverain. Elle avait l'impression de le voir lui et non le ''Roi'' ce qui l'ébranla encore plus. Une autre partie se réjouissait timidement car l'entendre lui dire des choses aussi belle dépassait de l'entendement.

Était-elle amoureuse ? Comment était ce possible ? Comment avait-elle réussi à aimer la partie la plus sombre de cet homme taciturne ? Était elle inconsciente ? Ou un poil masochiste?

Elle se jeta sur son lit ce qui le fit rebondir. Elle repensa à leur baiser et ce feu d'artifice qu'il avait causé en elle. Son cœur reprit ses battements indomptables et elle serra la paroi qui l'empêchait de sortir de toutes ses forces en se positionnant de manière fœtale.

C'était tout simplement invraisemblable !

Tout ce qu'il lui faisait ressentir, elle aimait être celle qui réussit à passer au travers de ces ronces épineuses et à franchir le château de glace comme l'a peint Élion.

Mais elle était remplie de craintes. Et si c'était juste un autre de ses caprices?

***

Comme si le temps était de mèche avec le Roi, le dernier jour était arrivé à la vitesse de l'éclair. Néanmoins la jeune fille n'avait de cesse de cogiter, retournant dans tous les sens les souvenirs de cette soirée qui lui paraissait presque irréelle. Elle n'arrivait toujours pas à y croire et elle avait tellement de questions! Elle dit au-revoir à sa mère et à Céryl ayant enfin prit son courage à deux mains. L'adrénaline pulsant dans ses veines, son cœur tambourinant comme jamais auparavant Idae avait pris la décision d'affronter son Roi. Il le fallait sinon elle savait qu'elle n'en dormirait pas comme les deux nuits dernières. Elle n'était pas du genre à se défiler même si ce n'était pas du Roi dont elle avait peur mais de ce qu'il lui faisait ressentir. Elle ne sut à quel moment il s'était autant insinué dans son cœur, elle ne compris pas comment elle s'était faufilée dans les méandres de son être à lui.

Il avait certes cité tout ce qu'il aimait chez elle ainsi que la raison de la confusion de ses sentiments néanmoins... c'était tellement incroyable qu'elle ne put s'empêcher de douter. Pourquoi elle? Pourrait-il redevenir aussi rêche qu'avant si elle n'était pas apte à être en relation avec lui? Est-il capable de mieux se comporter ? Ou était-ce une exception ? Il fallait éclaircir plusieurs points car elle osait croire qu'aucun des deux ne se connaissaient vraiment. Les sentiments ne se contrôlaient certes pas mais elle ne pouvait pas se jeter à corps perdu sans vraiment et réellement savoir qui était le Roi.

ImpériaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant