Chapitre 19

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PDV : Maya

Le jeudi, comme tous les autres jours, la sonnerie annonça la fin des cours. Je rangeai mes affaires dans mon sac à dos avec des gestes mécaniques, les yeux baissés pour éviter tout contact visuel. Je savais ce qui m'attendait : un rendez-vous chez la psy. Ce rendez-vous hebdomadaire, qui avait commencé par un soulagement, était devenu une obligation pesante. Chaque semaine, il me fallait faire semblant que tout allait bien.

Le cabinet de la psychologue était situé à quelques pâtés de maisons de l'école, mais chaque pas vers lui semblait interminable. Les bruits environnants, les conversations des élèves, les voitures qui passaient résonnaient dans ma tête comme un écho incessant. Lorsque je poussai la porte du cabinet, l'odeur familière de lavande me frappa immédiatement. Ce parfum, censé apaiser, me donnait presque la nausée aujourd'hui.

— Bonjour, Maya, me salua la psychologue avec son sourire habituel. Entre, installe-toi.

Je répondis par un faible sourire et m'installai sur le fauteuil en face d'elle. La pièce était inchangée depuis la semaine précédente : des murs pastel, des coussins moelleux, et une grande plante verte dans le coin, un symbole de vie et de croissance que je ne pouvais plus supporter de voir.

— Alors, comment s'est passée ta semaine ? demanda-t-elle d'une voix douce, posant son stylo sur son carnet.

Je restai silencieuse un moment, cherchant les mots, puis je parvins à murmurer :

— C'était... difficile.

Elle hocha la tête, m'encourageant à poursuivre. Je pris une profonde inspiration.

— Un gars dans ma classe a demandé à changer de binôme pour un TP, dis-je faiblement. Devant tout le monde. Comme si travailler avec moi était... une punition.

Un soupir franchit mes lèvres sans que je m'en rende compte. Le simple fait de prononcer son nom me faisait mal, et pourtant, c'était la seule façon de décharger un peu ce poids écrasant.

— Et comment te sens-tu par rapport à ça ? demanda-t-elle, ses yeux plongeant dans les miens.

— Je me sens... seule. Rejetée. Je ne comprends pas pourquoi c'est toujours moi. Pourquoi tout le monde semble me haïr, comme si j'avais fait quelque chose de mal...

Elle nota quelque chose dans son carnet avant de lever les yeux vers moi.

— Maya, ce que tu ressens est valide. Ce que tu traverses est difficile, mais il est important de te rappeler que tu n'es pas responsable de la manière dont les autres te traitent.

— Mais ça ne change rien, rétorquai-je, l'amertume perçant ma voix. Ils continuent, quoi que je fasse. Et ce gars...

Je m'interrompis, incapable de continuer. Les mots étaient coincés dans ma gorge, et je sentais mes yeux s'embuer.

— Tu veux parler de ce gars ? m'encouragea-t-elle doucement.

— Tout est de sa faute, lâchai-je enfin, la voix tremblante. À cause de lui, tous mes amis m'abandonnent !

La psychologue hocha la tête, écoutant avec attention.

— Tu ressens de la colère envers lui, n'est-ce pas ?

— Oui, bien sûr que je suis en colère ! m'exclamai-je, le ton montant malgré moi. Il reste là, à regarder, comme si tout ça ne le concernait pas. Comme si j'étais invisible.

Les larmes commencèrent à couler sans que je puisse les retenir. La psychologue me tendit une boîte de mouchoirs, que je pris sans un mot, essayant de reprendre mon souffle.

— Maya, ce que tu ressens est parfaitement compréhensible. Mais il est aussi important que tu te rappelles que les actions des autres ne définissent pas ta valeur. Ce que fait ou ne fait pas "ce gars", comme tu dis, ne doit pas déterminer comment tu te perçois.

Je ne savais pas quoi répondre. Chaque mot qu'elle prononçait semblait juste, raisonnable, mais cela ne changeait rien à ce que je ressentais. La douleur, la trahison, l'isolement... tout cela était bien réel, et aucune parole rassurante ne pouvait le changer.

— Alors, que suis-je censée faire ? demandai-je, désemparée.

— Est-ce que tu as essayé d'écrire ou de méditer depuis la dernière fois ?

— Non...

— Eh bien voilà ce que nous allons faire. Je vais te donner ce carnet. Tu pourras y écrire ce que tu veux. Cela te permettra de mieux gérer ton accumulation mentale, dit-elle en me tendant un carnet.

— Très bien... au revoir.

 L'ombre du ParapluieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant