Chapitre XIV

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Chapitre XIV

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Chapitre XIV.

Face au bateau, je n'en crus pas mes yeux. Une main se porta instinctivement à ma bouche, grande ouverte sous l'effet du choc. Apparemment, je n'étais pas la seule à être surprise, car je vis Silas se précipiter en avant, traversant les quelques mètres qui le séparaient de la scène pour s'exclamer :

- Bordel, qu'est-ce que vous foutez, vous deux !

Peter et George, chargés de veiller à ce que le bateau reste amarré et ne disparaisse pas par je ne sais quel tour de magie, étaient visiblement bien éméchés. Pire encore, ils s'amusaient à un jeu que je trouvais pour le moins cruel. Je les observais, horrifiée, alors qu'ils tenaient entre leurs mains une pauvre boule de poils brunâtre : l'un agrippait les pattes avant, l'autre les pattes arrière. Ils balançaient le pauvre animal de gauche à droite avant de le jeter par-dessus bord, dans l'eau. Le petit être, un chat au pelage coloré, se débattait en nageant péniblement vers l'île. Par tous les dieux, heureusement qu'il savait nager, car sinon j'aurais sauté à sa rescousse.

- Vous êtes complètement torchés ! Où avez-vous trouvé cet animal ? fulmina Silas en arrivant devant eux, son regard noir et menaçant.

Il pointa un doigt accusateur vers les deux hommes, qui vacillaient sous l'effet du rhum

- On n'y p-peut rien, Captain', hoqueta Peter, le rouquin.

- On le balance, il revient, on le re-balance, il revient encore, Captain', ajouta George en riant bêtement.

Même de là où je me trouvais, à côté de la coque du bateau, je pouvais sentir leur haleine fétide, imprégnée de rhum, émaner jusqu'à moi.

Je m'accroupis alors sur le sable, tendant une main vers le chat qui venait de sortir de l'eau. Il se secoua d'abord, éjectant l'excès d'eau de son pelage, puis ses yeux croisèrent les miens. Il m'observa longuement, se demandant peut-être qui j'étais, avant de sursauter en entendant Silas hurler à nouveau après ses deux matelots. Le petit félin se concentra de nouveau sur ma main tendue, l'hésitation visible dans ses yeux vairons. Finalement, après un moment de réflexion, il s'approcha prudemment, reniflant ma main avant de s'y frotter avec douceur.

Je souris, satisfaite d'avoir réussi à gagner la confiance de ce petit compagnon. J'osai enfin caresser son pelage somptueux, qui ressemblait en tous points à celui d'un fauve tel que j'avais pu en voir dans mes livres d'histoire : des poils marbrés de rayures sombres et dorées. Sous cette fourrure dense, je sentis son corps mince mais musclé, un signe qu'il avait dû apprendre à survivre par lui-même. Je ne savais pas comment ce chat avait atterri sur cette île, mais il était évident qu'il ne trouvait pas grand-chose à manger ici. Ce qui me captiva le plus, cependant, fut son regard dépareillé : un œil d'un vert émeraude perçant, brillant comme une gemme précieuse, tandis que l'autre était plus pâle, teinté d'une nuance jaune dorée qui me rappelait les roses jaunes du jardin du château, mes préférées, ou bien un magnifique coucher de soleil.
Cette particularité ajoutait une touche mystique à sa beauté, et il me paraissait presque royal, malgré son apparence sauvage. Même après avoir été trempé, il luisait sous le soleil, comme un joyau sous une fine couche d'eau.

SEA OF PIRATES - P1 [TERMINER]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant