- 7 - Au creux des Dunes

11 3 0
                                    

Il faisait chaud. Tout autour d'eux, le désert alignait les dunes d'or fondu sur lesquelles la caravane imprimait ses traces. Dans un ciel limpide, le soleil étendait ses rayons, infatigable. Un soleil avec lequel il ne valait mieux pas plaisanter, même au milieu de l'automne. C'était pour se protéger les bras et les jambes de sa morsure impitoyable que les voyageurs étaient tous vêtus de longues djellabas de couleurs claires. Têtes et cous étaient enveloppés de lourds turbans dont il suffisait de rabattre un pan sur le visage pour s'abriter du sable et de la réverbération.

Béryl était cramponnée à la selle de sa monture. Et quelle monture ! Jamais elle n'en avait vu de semblable. De longues pattes fines, un cou démesuré et cette bosse étrange en plein milieu du dos. Un dromadaire, lui avait-on appris. Cet animal se montrait si résistant qu'il pouvait transporter deux personnes à la fois, ce qui faisait de lui la monture romantique par excellence, idéale pour les promenades en amoureux. Béryl avait donc la chance de chevaucher avec Saule.

Il lui avait fallu un moment avant de s'habituer au pas oscillant du dromadaire et à sa hauteur invraisemblable. Dire qu'elle avait toujours pensé que monter à dos de cheval était une expérience terrifiante et que quelques jours seulement après son premier essai, elle était passée au modèle supérieur... Quand l'animal s'était relevé, une fois qu'elle s'était installée sur son dos, elle avait dû mobiliser toute sa volonté pour ne pas hurler de frayeur. En cela, elle avait été bien motivée par certains regards posés sur elle. Soucieux du côté de Jaspe et encourageants de celui d'Acacia.

Ce ne fut qu'après une heure de promenade qu'elle se sentit assez assurée pour profiter pleinement de cette escapade. Lorsque Acacia avait mentionné une surprise, elle n'aurait jamais imaginé à quel point c'en serait une. Bien sûr, elle avait déjà entendu parler du désert de sable crépusculaire, mais, à l'inverse de son frère, cela n'avait jamais enflammé son imagination. Maintenant qu'elle y était, elle devait avouer que jamais ses yeux ne s'étaient posés sur si grandiose paysage.

— Nous arriverons bientôt en vue des restes d'un temple, l'informa Saule en se tournant vers elle. Ce sont les premières ruines que nous verrons, elles datent d'une civilisation très ancienne qui occupait le désert il y a plus d'un millier d'années, bien avant que le Royaume du Crépuscule n'existe.

Béryl hocha la tête avec intérêt. Son fiancé était un guide de choix. L'histoire et la géographie de son pays n'avaient aucun secret pour lui et il se plaisait à partager son savoir. Béryl faisait son possible pour retenir toutes les informations dont il l'abreuvait. À aucun prix,elle ne voulait passer pour une écervelée superficielle auprès de son futur peuple.

— Regardez ! s'écria soudain Saule avec amusement. Cet arbre là-bas, c'est un acacia.

Le jeune homme désignait du doigt un arbre dans une plaine caillouteuse, derrière les dunes. Sa silhouette solitaire qui dressait courageusement ses branches contre les éléments hostiles émut Béryl sans qu'elle en comprenne la raison.

— Attention, lui aussi a des épines, ajouta-t-il, très satisfait de sa plaisanterie.

Son ton changea soudain.

— Je m'inquiète pour ma sœur, dit-il alors. Elle est très attachée à notre royaume. Sa façon de se jeter à corps perdu dans toutes les activités que nous faisons depuis votre arrivée... j'ai l'impression que c'est sa manière de lui faire ses adieux. Je sais que vous avez passé du temps ensemble. Vous en a-t-elle parlé ? A-t-elle semblé affectée ?

Béryl s'en attrista.

— Rien dans ses paroles ou ses actes ne m'a laissé penser qu'elle en souffrait. Cependant, nous ne sommes pas encore assez proches pour qu'elle me fasse ce genre de confidences.

Conte de l'Aube et du CrépusculeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant