Un bras ceintura brutalement Béryl par-derrière et l'attira dans l'ombre d'un recoin. Elle voulut crier, mais une main rugueuse se plaqua sur sa bouche.
— Si vous vous taisez, il n'arrivera rien à vos amies, glissa une voix à son oreille.
Prise de panique, Béryl fit exactement l'inverse. Elle hurla de toutes ses forces et se débattit avec l'énergie du désespoir. Un chapelet de jurons crépusculaires échappa à son agresseur. Elle écrasa un pied, envoya des coups de coude et des coups de tête, hélas l'étreinte qui la maintenait était trop étroite.
— Béryl ? Où êtes-vous ? lança soudain la voix inquiète de tante Cornaline. Restez donc près de moi !
Béryl mordit la main qui la bâillonnait.
— Au secours, ma tante ! eut-elle le temps de hurler avant que la pression ne se resserre sur sa bouche.
Ce fut le signal du chaos.
Les gardes tirèrent leur sabre tandis que des silhouettes sortaient des ombres où elles étaient dissimulées. Le combat s'engagea. Béryl fut chargée sur une épaule comme un vulgaire sac de navets. Son turban se détacha et glissa par terre.
— Laissez-moi !s'égosilla-t-elle en martelant son ravisseur de ses poings et de ses pieds.
Ses efforts ne parurent pas l'incommoder et il se mit à courir. Dès qu'elle les vit, Cornaline fonça droit sur eux. Un homme s'interposa les bras écartés. Cornaline se baissa et souleva sa djellaba. D'un geste vif, elle en tira une dague qu'elle avait fixée à sa cheville, et avant que l'homme comprenne qu'elle n'était plus la vieille femme sans défense qu'il pensait intimider, elle plongea sa lame dans son flanc. Son cri de douleur fit écho au cri de stupéfaction de Béryl.
— Lâchez ma nièce ! ordonna Cornaline en le repoussant.
Malheureusement, un autre fut aussitôt sur elle, empêchant sa progression. Elle recula de quelques pas, brandissant sa dague d'un air farouche. Son attitude n'était pas celle de quelqu'un qui manie une arme pour la première fois. Agate était recroquevillée dans un coin, les bras pressés sur sa tête. Une garde ferraillait devant elle pour repousser les malfrats.
Plus loin, l'une des silhouettes vêtues de noir maintenait Acacia par les épaules, plaquées contrela roche. La jeune femme attrapa violemment les poignets qui la bloquaient, desserra leur étreinte et envoya un coup de pied magistral dans l'entrejambe de son adversaire. Elle se dégagea souplement et bondit pour récupérer le cimeterre que l'assaillant de dame Cornaline avait lâché.
— Béryl, Béryl ! cria-t-elle en se lançant à la poursuite de la princesse et de son ravisseur.
Elle tendit la main vers elle. Béryl l'imita, allongeant le bras au maximum de ses capacités, tentant de s'extraire de la poigne de l'homme. En vain. Ils s'engagèrent dans l'un des tunnels qui s'enfonçaient dans la montagne. Acacia fonça à leur suite. L'un des voyous se jeta sur elle pour l'arrêter. Il la renversa et sa tête heurta la roche.
— Acacia ! hurla Béryl affolée.
Ce fut la dernière vision qu'elle en eut. Le boyau obliqua et ils plongèrent dans les ténèbres. Les bruits de combat et les cris s'atténuèrent aussitôt. Les velléités de résistance de la princesse s'évanouirent en même temps que la lumière. Une terreur glacée envahit son corps. Que lui voulaient ces gens ? Pourquoi l'avoir enlevée, elle ? Ce ne pouvait pas être un hasard. Elles étaient tombées dans un piège parfaitement préparé. Qu'allaient-ils lui faire ? Elle frissonna en songeant qu'il n'y avait peut-être pas lieu de se réjouir qu'ils n'aient pas cherché à la tuer sur place. Et ses compagnes restées en arrière, Tante Cornaline, Agate... Acacia... allaient-elles s'en sortir ? Sa gorge se noua. Elle ferma les paupières et des larmes brûlantes lui montèrent aux yeux. Si seulement elle ne s'était pas laissée entraîner par sa fichue curiosité, rien de tout cela ne serait arrivé.
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Conte de l'Aube et du Crépuscule
Fantasia"Il était une fois deux royaumes, en guerre depuis des siècles. Deux royaumes que tout opposait sinon les souffrances nées du conflit. Il était une fois un roi et une reine, las de la guerre. Un roi et une reine qui surent mettre de côté la rancœur...