Chapitre 16

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Le lendemain, j'me réveille avec un marteau dans la tête. Ça tape fort. J'ouvre les yeux, et j'suis encore habillé comme hier soir, mes sappes froissées, le goût amer de l'alcool encore là. J'me souviens à moitié de la soirée, des rires, des verres, du bruit, mais tout est flou. Ça me fait ni chaud ni froid, j'me suis habitué à ces lendemains vides, où j'sais même plus pourquoi j'fais ce que j'fais.

J'reste allongé, les yeux rivés au plafond, sans savoir quoi faire de ma journée... ou même de ma vie. J'me sens coincé, comme si tout était en pause, et moi, j'suis là, bloqué.

Puis mon téléphone vibre. C'est ma sœur.

« On t'attend, t'avais dit que tu venais manger à midi à la maison ! Les petits arrêtent pas de demander après toi, t'es où là ? »

Putain, j'avais zappé complet. J'passe ma main sur mon visage. J'suis KO, mais bon...

« Ouais, ouais, j'suis sur la route, j'arrive. »

J'raccroche, et direct j'file sous la douche. L'eau froide me réveille un peu, me remet les idées en place, mais ça change rien au bordel dans ma tête. J'me change, j'me sape vite fait, et avant de partir, j'passe par Leclerc. J'prends des bonbons pour les petits et un bouquet de fleurs pour ma reuss, histoire qu'elle oublie que j'vais arriver en retard.

Quand j'arrive chez ma sœur, elle m'accueille avec un sourire, mais j'vois bien qu'il est forcé. Les petits, eux, sont au taquet. Ils courent partout, ils me sautent dessus, excités comme jamais. Ça me fait plaisir de les voir comme ça, j'me dis qu'au moins j'suis encore un peu un modèle pour eux, malgré tout. On mange, on rigole, et pour un moment, j'oublie tout. J'oublie Abir, j'oublie mes galères, j'me laisse porter par l'ambiance familiale.

Après le repas, on met les petits devant un film, et j'pars dans la cuisine avec ma sœur. J'vois bien qu'elle a un truc qui va pas, y a un truc dans son regard. Elle sourit, mais c'est pas vrai. J'ose pas trop creuser. J'sais qu'elle me dira si elle veut, mais j'peux pas l'ignorer non plus.

« Quest-ce t'as ? T'es chelou aujourd'hui. »

Elle secoue la tête, joue l'indifférente. « Non, rien. »

Ah les meufs, toutes les mêmes. Elles disent jamais ce qu'elles ont direct.

« Vas-y, dis-moi c'que t'as. J'te connais. »

Ses yeux brillent. J'vois qu'elle est sur le point de pleurer, mais elle résiste.

« C'est rien, c'est juste avec Nassim, ça va pas trop en ce moment. »

J'le savais, j'm'en doutais qu'y avait un truc. Son mari, c'est un bon gars, droit, tranquille, mais ces derniers temps, j'le voyais plus trop à la baraque. J'me disais qu'il bossait trop, mais visiblement, y a autre chose.

« Il t'a fait un truc ? Il t'a tapé ? » J'commence à m'énerver, j'supporte pas qu'on fasse du mal à ma sœur.

« Non, non, t'inquiète, c'est pas ça. Juste des disputes, des désaccords... »

« Jure qu'il t'a rien fait ? »

« Wallah, il m'a rien fait, Jabari, c'est juste qu'on se comprend plus trop. »

Ça me rassure un peu, mais ça me fait chier pour elle. J'sais qu'elle l'aime. Elle mérite mieux que des embrouilles.

« Ma sœur, chaque problème a sa solution. J'sais que ça fait mal, mais si vous vous aimez, faut trouver un terrain d'entente. Les disputes, ça arrive, mais c'est pas la fin du monde. Faut juste apprendre à s'écouter, à faire des compromis. Crois-moi, le respect, c'est la base de tout. Tant qu'il te respecte et que tu le respectes, y a toujours moyen de reconstruire. »

Une larme coule sur sa joue, mais elle l'essuie vite, comme si elle voulait pas craquer devant moi.

« Merci Jab, qui aurait cru que tu serais de si bon conseil ? » Elle sourit faiblement.

« Ouais, c'est les neuf mois au bled, ça m'a forcé à réfléchir. »

Elle rigole doucement, et pour une seconde, j'me sens utile. Puis, elle me regarde, son regard devient sérieux.

« Et toi, alors ? Avec la fille dont tu m'as parlé, c'en est où ? »

J'prends une profonde inspiration. Abir... rien qu'à y penser, ça m'serre la poitrine.

« C'est compliqué, vas-y, en vrai c'est mort, j'te mens pas. »

« Pourquoi ? Qu'est-ce qui s'est passé ? »

« Wallah, c'est compliqué. » J'ai pas la force de tout lui expliquer, mais elle insiste.

« Sache une chose, tant que tu l'as pas trahie ou maltraitée, rien n'est définitif. »

J'abaisse les yeux, j'peux pas la regarder dans les yeux quand j'lui dis.

« J'l'ai trahie. »

Elle me fixe, surprise, et puis elle demande d'un ton menaçant : « T'as trompé ? »

« Jamais de la vie. »

« Alors c'est quoi cette trahison ? »

Comment j'vais lui expliquer que j'ai rencontré la femme de ma vie en la cambriolant ? Comment lui dire que j'ai menti sur un truc si grave que ça l'a brisée ?

« J'lui ai menti sur un truc tellement gros qu'elle me pardonnera jamais. »

Elle secoue la tête, déçue. « Jabari... tu sais que le mensonge, ça tue les relations. Rien n'est plus destructeur que ça. »

Elle a raison. J'le sais. J'sens cette honte qui me bouffe de l'intérieur. J'ai voulu la protéger, mais au final, j'ai tout gâché.

Elle me regarde encore, puis elle prend un ton plus doux. « Mais tu sais, même après ça, si t'es prêt à être honnête, vraiment honnête, peut-être qu'il reste une chance. Tu devrais pas abandonner. Si tu tiens à elle, montre-lui. Faut pas laisser la peur te paralyser, parce que si elle t'aime, elle pourra peut-être pardonner. »

Ces mots résonnent en moi. J'baisse la tête, pensif. Peut-être qu'elle a raison... mais j'sais pas si Abir pourra oublier ça.

L'après-midi continue tranquille. On rigole, on se repose, les petits sont calmes devant leur film. J'souffle un peu, et j'oublie presque que j'ai perdu Abir. Mais juste presque. Parce qu'au fond, elle est toujours là, dans un coin de ma tête, et j'sais que ça sera dur de la sortir de là.

La soirée arrive, et j'me retrouve sur la route du retour. J'essaie de me concentrer sur autre chose, mais Abir revient dans mes pensées, encore et encore. J'passe devant des endroits qu'on a fréquentés, le cafés, des rues, et chaque putain de coin me rappelle ce que j'ai perdu. J'pourrais l'appeler. J'pourrais lui envoyer un message, essayer de lui parler, de la rattraper. Mais j'me retiens. J'sais qu'elle a besoin de temps, et qu'elle mérite d'avoir le choix, sans que je force quoi que ce soit.

J'repense à ses mots... "M'approche plus jamais." Ça résonne dans ma tête comme une cloche qu'on n'arrive pas à faire taire. J'me refais la scène en boucle : son regard, plein de tristesse et de déception. Jamais j'aurais cru qu'elle pourrait me regarder comme ça, comme si j'étais qu'un inconnu. Pire, un traître.




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De voleur à loveur II : Abir storyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant