Somptueux Mensonges

26

Comment ?!
Comment est-ce que ce putain de détail m'a échappé !
Pourquoi personne me m'a prévenu !

J'ai une envie folle de fracasser tout ce qui se tient sur mon chemin, mais ce n'est ni le moment ni l'endroit pour faire une telle chose.

Alors à la place je met mes mains dans mes poches.

On est dans une des chambres au premier étage.
Sierra est assise sur le lit et se balance lentement d'avant en arrière.

Et moi, je suis là. Debout.

Impuissant.

Un sourire amer étire mes lèvres.

Moi, impuissant ?

C'est la première fois que j'emploi ce mot.
Mais il faut se l'admette, qui sommes-nous les humains face à de telles maladies ? Rien.

-Qui l'a changé d'endroit ? Prononce la voix faible de Sierra.

-Moi.

-Pourquoi ? Dit-elle en relevant sa tête vers moi.

-Je dois vraiment répondre là ? Dis-je en haussant un sourcil.

-Oui ! Il fallait me prévenir ! Tu n'as pas le droit de~

-De quoi ? De sortir ton père du trou à rats ou il était enfermé depuis des années ? Dis-je un peu plus fort que je ne l'aurais voulu.

-Peu importe, fallait me le dire ! Dit-elle en se levant et en s'approchant de moi.

-Et bien de rien. Dis-je alors que je n'avais toujours pas bougé de ma place.

-Arrête ! Ne viens pas te faire passer pour un héros. Un sauveur ou bien mon prince~

-Charmant ? Finis-je à sa place. Je ne suis là pour aucune de ses raisons.

Menteur.

-Alors pourquoi ? Qu'est-ce que tu me veux ? Dis-le qu'on en finisse Elijah ! Qu'est-ce qu'un homme comme toi veut d'une femme comme moi ? Me dit-elle d'une voix déchirante.

Et quand je dis déchirante, je parle tout autant de mon intérieur à ce moment-là.

-Sierra, cesse de trop penser. Ce n'est pas le moment. Dis-je de mon ton habituel.

-Ce n'est jamais le moment. Mais pourtant la vie ne m'offre aucun répit ! A quand mon moment à moi ?
Tu ne peux pas comprendre ce que je te dis, car toi tu as tout ! Dit-elle avant de marquer une pause. Ton père et ta mère t'aime et sont là pour toi, ils se souviennent de tout de toi. Tu as l'argent, la force, la notoriété, tout. Et moi ? Qu'ai-je eu ?

-Il est temps pour nous de partir. Dis-je en me tournant afin d'échapper à son regard détruit.

-Elijah.. Prononce sa voix tremblante.

Mais je ne dis rien, je me contente de m'arrêter pour simple réponse.

Vide ton cœur Amore.
Partage ta tristesse avec moi.

-Je sais que tu n'as jamais voulu de moi, tu n'as jamais supporté ma présence. Je suis faible et sensible. Ton contraire. Je n'ai jamais été comme les femmes que tu as l'habitude de fréquenter. Mais je...
Dit-elle avant de s'interrompre un instant. Je veux que tu saches une chose Elijah. J'ai toujours souhaité que tu me remarque, que tu me regarde de la même manière dont je te regardais, dont je te regarde.

Un rire amer s'échappe de mes lèvres, et je ne peux le retenir.

Ces mots, c'est ce que j'ai toujours secrètement souhaité entendre. Même dans mes rêves les plus fous, je ne me l'autorisais pas.

Et maintenant que c'est réel, j'ai envie de devenir fou.

Je ne suis pas un homme qui sait réagir dans ce genre de moment.

Je suis une brute, un homme qui sait tuer, semer la peur, un homme qui sait mentir et manipuler.

Mais un homme qui sait aimer, donner de l'amour, réconforter ?

Ce n'est pas moi.

Cette sensation d'inconnu, se dissipe lentement et est remplacée par un autre sentiment, plus puissant, plus prenant et profond que j'en ferme les yeux quelques secondes.

Sa vulnérabilité me touche plus que je ne voudrais l'admettre. Ça s'insinue dans mon cœur, dans les fissures de ce dernier, dans ce qui en reste.

Je me retourne afin de lui faire face, de faire face à ce visage d'ange que je me suis interdis de peur de le gâcher, de l'abîmer.

Cette femme si fragile qu'un tout peux casser, se tient ici aujourd'hui. M'offrant une partie d'elle, m'exposant ses peurs et ses sentiments.

Elle est en réalité plus courageuse que moi.

Un léger pincement me prend mais je le refoule tout aussi rapidement. 

-Je voulais juste te le dire. Dit-elle en esquissant un fin sourire, un sourire douloureux.

Les mains en poing, je me retourne avant de quitter la pièce mais je ne claque pas la porte, malgré le fait que ce ne soit pas l'envie qui manque.

Ma mâchoire tressaille, et une colère viscérale me fouette.

Une colère qui est dirigée vers moi-même. Moi et moi seul.

Elle n'a sûrement aucune idée de la personne qui se tient réellement face à elle. Sinon elle ne se serait jamais autant confié.

Qu'espérait-elle de moi ? Que je la protège ?

Tu le fais déjà depuis des années.

Je jette un regard par dessus mon épaule, et elle n'a toujours pas bougé de sa place. 

Ce même regard est posé sur moi, mais elle a l'air d'aller mieux. Comme si ça l'avait soulagé.

Tant mieux.

Je décide de descendre, comme si fuir son regard aller résoudre tous mes problèmes.

Je sors à l'extérieur de la maison, le chauffeur est contre la voiture, cigarette à la main.

Il ne m'a pas vu.

Quant à moi, je prend une profonde inspiration.
C'est tout ce que je peux faire là tout de suite.
Ça, et me mentir.

Je rejette une seule et unique idée depuis sa réaction dans la chambre.

Je n'y avais pas songé avant.
Car je suis un être égoïste et assoiffé de vengeance.
Alors je ne me suis pas préoccupé de qu'elle pouvait être sa réaction face à cette annonce.

Je lui dirais.

Ce soir, je lui dirais.

En espérant qu'elle ne me haïsse pas, même si cela me faciliterait la vie que de savoir qu'elle ne m'idéalise pas. Qu'elle ne m'a pas pardonné tout le mal que je lui ai causé. Car cette partie là est encore plus douloureuse. 

Vivre avec le fait de savoir qu'elle ne me hait pas malgré mon indifférence pendant toutes ces années me hante.

Mais vivre avec le fait de savoir qu'elle me déteste est encore plus déchirant.

Alors je lui dirais.

En espérant qu'elle ne me haïsse pas plus, en espérant qu'elle voudra encore m'aimer, même de loin.

En espérant que cela ne mette pas fin à un début qui n'a pas encore vu le jour.