Un noël sous les flocons

Chapitre 5 - La nostalgie des Noëls passés

— Claire ? C'est bien toi ?

Je me retourne, le cœur battant, à la fois curieuse et désorientée. La voix, grave et douce, semble vibrer dans l'air, comme un écho de mon passé. Là, devant moi, se tient Harry.

Harry...

Le choc me coupe le souffle. C'est lui, bien sûr, mais il a tellement changé. Sa carrure est plus imposante, ses épaules plus larges, sa posture droite et confiante. Une barbe brune, soignée, couvre son visage et lui donne un air mature, un côté adulte que je ne lui connaissais pas. Ses yeux, pourtant, n'ont pas changé : ils sont aussi vifs, profonds, pleins de malice et de douceur qu'à l'époque. Je me rappelle immédiatement les étés et les hivers passés ensemble, ici, dans cette même ville, comme si c'était hier.

— Harry... je murmure, comme pour vérifier que c'est bien lui.

— En personne, dit-il en esquissant un sourire. Ça fait longtemps, Claire.

Ce simple sourire suffit pour que tout un monde de souvenirs refasse surface. Le lac, où on passait des après-midi interminables, les soirées d'été à se raconter des histoires jusqu'à en avoir mal aux joues de rire, les balades d'hiver emmitouflés, les mains gelées mais le cœur léger, les baisers échangés... Et puis la fuite...

Et aujourd'hui, il est là, devant moi.

— Oui, ça fait longtemps... dis-je en tentant de sourire. Alors, tu es de retour en ville ?

Il hoche la tête, l'air un peu plus sérieux.

— Je ne suis jamais parti. Il fallait bien que quelqu'un reste, dit-il avec un sourire qui ne m'amuse pas. J'ai pris la suite de mon père. Il est parti en retraite, alors... je suis maire, maintenant.

Ce chemin lui était sans doute destiné depuis toujours. Harry, avec son charisme naturel et son sens de la justice, avait toujours eu cette aura de leader.

— Ça ne m'étonne pas, dis-je sincèrement.

Il sourit.

Et mon coeur...

— Et toi ? Tu as fini par t'installer à Paris, non ? J'ai entendu dire que tu travaillais là-bas maintenant.

Je lui parle brièvement de ma vie à Paris, de la grandeur de la ville et du charme des rues pavées, de l'énergie inépuisable qui m'a d'abord fascinée. Il semble m'écouter avec attention, un sourire tranquille aux lèvres, comme s'il voulait entendre davantage. Mais soudain, une jeune femme blonde s'approche et l'interpelle en lui touchant le bras. Elle lui chuchote quelque chose que je n'entends pas, mais il hoche la tête en la regardant brièvement avant de reporter son attention sur moi.

— Je suis désolé, murmure-t-il, visiblement pris par son rôle de maire, ou de mari.. Mais je t'ai promis de t'aider, alors... je passe chez toi cet après-midi pour t'aider avec les cartons, d'accord ?

Je hoche la tête, encore un peu perturbée par cette rencontre inattendue. Il s'éloigne en lançant un dernier sourire, tandis que je reste plantée là, le regard suivant sa silhouette qui disparaît dans la foule.

Harry...

Une fois de retour au chalet, je prends un instant pour retrouver mes esprits. Cette rencontre m'a laissée avec un goût amer de souvenirs que je tentais de fuir depuis bien longtemps. Je m'assieds sur une chaise en bois, entourée de mes vieux cartons, et commence à les fouiller à la recherche de bibelots qui pourraient aller au marché. Cela me permettra au moins de me changer les idées, et qui plus est, pour la bonne cause !

Parmi les souvenirs qui remontent à la surface, je tombe sur des objets d'enfance : des décorations de Noël faites à la main ainsi que des cartes écrites de la main de ma grand-mère. Je souris, envahie par la nostalgie, en me remémorant les Noëls passés ici, les moments en famille.