L'orchidée Tourmentée

Chapitre 39

POV Eline

      La bile me brûle la gorge. Cette nuit, Nathan va m'emmener loin d'ici, loin de Natai. Je suis tellement anxieuse que mon cerveau a du mal à réfléchir à quoi que ce soit. Impossible de trouver une échappatoire. Il ne me lâche pas une minute.

Hier j'ai évité le pire. Nathan était bien décidé à coucher avec moi et j'ai réussi tant bien que mal à négocier pour qu'il attende qu'on soit tranquille définitivement avant de se donner l'un à l'autre. Ça a bien failli ne pas marcher, il était vraiment déterminé et j'ai bien cru ne pas réussir à lui résister.

— Eline, tu m'écoutes ?

— Pardon, tu disais ?

Son regard irrité se pose sur moi et mon estomac tombe dans mes talons. Je dois rester concentrée, j'ai encore la journée pour fuir. Je souris et je pose ma main sur la sienne, il faut que je le rassure.

— Oui, excuse-moi, j'étais en train de penser à ce qu'on fera une fois en sécurité, j'imaginais la vie qu'on allait se construire.

Les traits de son visage se détendent et moi aussi par la même occasion.

     Sortir sans aide n'est pas une option, je peux pas faire un geste sans que Nathan ne le sache et même si je l'éloigne, la seule sortie est fermée à double tour. Mon seul moyen se trouve actuellement dans sa poche de pantalon.

« Un message, il suffit d'un message ou appel pour obtenir de l'aide »

Il faut que je lui prenne son portable.

— Oh, s'exclame-t-il en me serrant la main, dis-moi tout dans ce cas, je veux tout savoir !

Sa voix est beaucoup trop enjouée à mon goût et j'ai l'impression qu'il va me broyer la main à force de la serrer comme il le fait. J'ai du mal à déglutir alors que ma bouche s'étire en un sourire factice. Une idée germe dans mon cerveau, elle me dégoûte. Un frisson désagréable remonte le long de ma colonne vertébrale alors que mon corps se met en mouvement. L'instinct de survie est vraiment un moteur puissant. Sans lui, il y a longtemps que se battre aurait perdu son sens, tout mon être serait paralysé par cette peur froide et vicieuse qui s'insère tel un serpent, prêt à vous étouffer. Mais cette part de nous, qui cherche à vivre par tous les moyens. Cette petite voix qui nous chuchote à l'oreille toute notre vie, devient un hurlement, un rugissement brûlant qui nous force à envisager tout ce qui est humainement possible de faire pour s'en sortir. Pour certains c'est se battre, lutter, pour d'autres c'est abdiquer pour ne pas provoquer le danger. Dans mon cas, je fais partie des deux à la fois. Je ne résiste pas à Nathan, ça évite qu'il se mette en colère et devienne violent mais en même temps, je me bats. Je rentre dans son jeu, le manipule, je joue avec lui pour obtenir des sursis, et une porte de sortie. Et pour y parvenir, tous les moyens sont bons.

      Je contourne la table sans me soustraire à sa main. Mes jambes me guident vers lui sans que je ne le lâche du regard une seule fois. Nathan m'observe avec intérêt, ses yeux me parcourent avant de remonter vers mon visage pour redescendre vers ma bouche. Je m'installe sur ses jambes, plaçant la main que je tiens sur ma hanche et mes bras trouvent leur place autour de sa nuque. L'étincelle qui brille dans les pupilles de mon geôlier me donne confiance dans le rôle que je joue. Subitement je grimace, me dandine comme si quelque chose me gênait. Je glisse ma main entre lui et moi, accédant à la poche de son pantalon pour sortir son portable et le poser très vite sur le table avant qu'il ne panique. Il me regarde avec les yeux ronds et je sais, à cet instant, que j'ai réussi mon coup. Ce téléphone est une opportunité que personne n'aurait manqué. Et moi je le laisse de côté comme si son existence ne valait rien. Mon front se cale contre le sien pour capter à nouveau son attention.