Chapitre 9 : Révélation

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   L'heure était bien avancer. Il devait faire nuit depuis longtemps et la fatigue commençait à se faire ressentir par la lenteur de nos pas. Nous décidions de nous coucher dans un des nombreux tunnels que nous empruntions. On mangea un morceau avant de s'endormir. C'est Gaël qui prit la résolution de prendre le premier tour de garde, il me réveillerait pour le suivant. Nathan et Arthur s'endormirent vite mais moi je ne trouvais pas le sommeil. Non à cause du fait que le sol n'était ni droit ni confortable malgré mon sac qui me permettait de me caler, mais à cause de tout ce qu'il s'était passé aujourd'hui et les autres jours depuis la Catastrophe. Je repensais à mes parents, j'essayais de réfléchir aux endroits où ils pourraient se trouver. Mais pour le moment, notre priorité, était d'aller s'assurer que les autres membres du Clan aillent bien et qu'ils s'en soient sortis. Ils nous avaient accueillis Nathan et moi, c'était normal de leur rendre l'ascenseur.

   Je me rassis, je voulais me changer les idées. En face de moi, légèrement sur le côté, se trouvait Gaël, les bras éternellement croisés. Il avait allongé ses jambes et regardait des deux côtés.

-Tu ne dors pas ?

   Je ne lui répondis pas, ce n'était pas la peine d'être devin pour deviner qu'il n'attendait pas de réponse. Je lui posais plutôt comme question :

-Qu'est-ce qu'il advient aux personnes mordu ? Enfin, à part les Empoisonnés aux yeux marrons.

   Il laissa échapper une sorte de ricanement en regardant sur le côté. Puis ses yeux se stabilisèrent en face de lui. Ses sourcils, pour une fois, n'était pas froncés.

-Leur comportement change. Leur attitude devient meurtrière. Les personnes aux yeux bleus sont prêtes à tout pour tuer son prochain, alors si deux personnes avec des yeux bleus sont mordues et mis dans la même pièce, ils entre-tuent. Ou ils s'entraident. Et ce de n'importe quelle manière. Ils sont prêts à tout. C'en est flippant de les voir à l'œuvre. Mais parfois... on ne s'en aperçoit pas. Il faut rester sur ses gardes.

-Ils attaquent de front ?

-Pas toujours. Ils peuvent utiliser la ruse et dans ces cas-là ils deviennent terrifiants.

-Et on ne peut pas s'en apercevoir ?

-En général non, pas avant qu'ils ne tentent délibérément un acte meurtrier. Enfin, sauf si on voit leurs morsures avant.

-Et les yeux verts ? Ils ont envie de...

-De suicide, trancha-t-il. Là aussi ils sont capables de tout pour mettre fin à leur vie. Je suppose que quelque chose doit changer en eux, qu'ils ne voient plus la même chose, qu'ils ne voient plus la lumière. Qu'ils ont perdus tout espoir.

   Je préférais ne pas continuer cette discussion car je voyais bien que cela le mettait mal à l'aise. Je me souvenais d'Arthur qui nous avait dit que le Clan avait connu des cas d'Empoisonnés, surtout pour en arriver à leur conclusion. Je décidais de parler d'autres choses :

-Pourquoi il a fallu que l'on ne s'entende pas ?

   Je souriais et lui également à présent.

-Eh bien, je suppose que c'est parce que dès que tu as mis les pieds au repère du Clan on t'a assommé et que je t'ai empêché de partir à trois reprises.

-Oui, ça doit être ça...

-Parfois je ne te comprends pas Twill.

-En même temps on s'est rencontrés il y a deux jours, laissais-je échapper dans un petit rire.

-Ouais, approuva-t-il doucement lui aussi dans un discret gloussement.

-Disons que... je cherche une raison d'avancer.

-Ouais, sûrement.

   Il se mit à regarder ailleurs.

-Et toi ? Tu n'en as pas ?

   Ses yeux croisèrent les miens :

-Si : diriger ce Clan. C'est quand nous sommes ensemble que ça change quelque chose : on l'a bien démontré tout à l'heure avec la maman Lézard.

-Tu n'étais pas très chaud pour faire équipe.

-Tu serais à ma place tu comprendrais.

   Je ne répondis rien, regardant, à mon tour cette fois, dans une autre direction.

-Tu penses réellement retrouver tes parents ? , me demanda-t-il après un temps.

   Je tournais la tête dans sa direction, ne trouvant pas d'autres vraies réponses :

-Je l'espère.

   Il soupira.

-On devrait se faire confiance, tentais-je.

-Et c'est toi qui dis ça ?

-Gaël, tu l'as dit toi-même : on est dans la même galère. A quoi ça sert de continuer ensemble si on se retrouve chacun dans un camp ?

   Il baissa la tête puis avoua.

-C'est vrai. Mais ce n'est pas qu'à moi de faire des efforts.

-Je l'entends bien.

   Avais-je réussis à convaincre le chef du Clan à faire la paix avec moi ? Ce serait vraiment bien. Et alors que je ne disais rien, Gaël se mit à m'expliquer tout seul, sans raison ni sans que je n'ai eu besoin de demander quoique ce soit, comme pour répondre à ma curiosité muette, comme pour mettre les choses à plat :

-J'ai perdu ma petite sœur. Elle avait quatorze ans. Tu me disais que je n'avais envie de retrouver personne mais... c'était faux.

-Je... je suis désolée.

-Elle a disparue. J'aimerais au moins la retrouver elle, je sais qu'où qu'elle soit elle a besoin de moi.

-Alors ne perd pas espoir, relativisais-je.

-Il faut voir la vérité en face.

   Je le regardais, je savais qu'au fond de lui il ne pourrait jamais la laisser tomber mais qu'il savait qu'il était encore trop tôt pour chercher... c'était comme un pressentiment, il le savait et c'était inexplicable. Je respectais son choix, moi je ne pouvais ni ne voulais attendre, je sentais qu'il fallait que je cherche mes parents sans laisser le temps défiler. C'était comme ça, ça ne se décidait pas.

-Bon allez, va dormir c'est à mon tour, conclus-je.

-Ok.

-Et, Gaël...

   Il me fixa.

-Tu vois que ce Lézard à changer quelque chose !

   Je lui tirais la langue et il me sourit :

-Ouais.

   L'adolescent s'allongea et à peine quelques minutes plus tard sa respiration devint régulière et peu à peu bruyante.

La CatastropheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant