Ce que tu dis

Chapitre 32

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L'homme que j'ai vu à l'hôpital.
Le mari de Bahula. D'ailleurs elle est derrière le duo que forme son mari et Zoey.
Je vois dans ses yeux qu'il me reconnaît aussi.

- Je vous présente Arjun et Priyanka Darpan, dit-elle au couple. Arjun, Priya, voici Udar et Bahula Asha. Monsieur Asha est le promoteur avec qui nous allons débuter une collaboration.

Je préfère reporter mon attention sur Zoey et Bahula plus tôt que le regarder.
Zoey porte une robe dont la couleur me fait penser à un ciel d'orage. La coupe est simple, mais met son magnifique -et ça me fait mal de dire- corps en valeur. Ses cheveux sont retenus par un chignon élaboré. Elle est vraiment belle.
Bahula quand à elle semble moins fatiguée, ce qui me rassure. Malgré son magnifique sari marron piqué de pierreries, elle n'a pas l'air très à l'aise. Elle ne me regarde pas, caressant d'un air rêveur son ventre.

- C'est un honneur que de faire votre connaissance madame, dit-il en baisant ma main.

Main avec laquelle j'aurai bien voulu le gifler.
Je contente de sourire, comme si de rien n'était. Je ne voudrais pas que Bahula prenne cher ensuite à cause de moi. Je sais que ce genre d'hommes aiment se venger sur plus faible.

- Tout le plaisir est pour moi.

Pendant la dizaine de minutes qui suit, Arjun, Zoey et Udar parle immobilier. D'après ce que j'en comprends, cet homme voudrait vendre des terrains en périphérie de Dharavi à Arjun. Il voit déjà une collaboration  ingénieuse entre eux.

La population de Mumbai ne cesse de s'accroître. Cela étant dû à la forte croissance de la ville, qui a de plus en plus besoin de mains d'oeuvres. Quoi de mieux que s'approprier ces précieux mètres carrés, qui serviront à construire des lieux de vie pour la nouvelle classe moyenne?
Son discours est bien rodé: Dharavi n'habrite plus seulement les classes et les castres inférieures, mais c'est une ville dans la ville. Il mériterait que l'on se penche plus sur l'espace qu'elle possède et le potentiel d'en faire une plaque tournante du marché immobilier.
Sans ce que je sais sur lui, je ne pourrais qu'admirer son éloquence et la manière dont il présente son projet. Il  a même la réponse pour éviter le délogement des populations les plus pauvres: leur offrir des logements qu'ils pourraient régler avec leurs maigres moyens. Mais surtout, des conditions d'hygiène convenable qui permettront le développement de cette partie de la ville, dont on ne soupçonne même pas la diversité, qui en fait pourtant la force.

Un discours charmeur et convainquant que mon mari et Zoey écoutent d'une oreille attentive.
Et cela m'inquiète.

J'essaie de capter l'attention de Bahula, mais elle ne me regarde toujours pas.
Je l'ai bien vu à l'hôpital, mais elle s'est refermée, faisant semblant de ne pas comprendre de quoi je lui parlais.

" Je vous demanderai d'arrêter de soupçonner mon mari de nous battre moi et ma fille. C'est assez embrassant pour nous deux. Et vous n'avez aucune preuve de ce vous avancez."
On aurait dit un automate qui répétait un discours préenreigistré.

Je regarde le couple s'éloigner après avoir pris congé de nous. Il tient sa femme par la main et lui caresse le bas du dos. De loin, on dirait juste un homme attentionné, qui se préoccupe de sa femme enceinte.

- Tu ne dois signer aucun contrat avec lui, je dis les yeux toujours braqués sur eux.

- Quoi?

- Tu ne dois signer aucun contrat avec lui, je répète en regardant Arjun dans les yeux.

- Et pourquoi donc? intervient Zoey.

- C'est l'homme dont je t'ai parlé, Arjun. Il bat sa femme. Et sa fille est à l'hôpital, avec l'incertitude de pouvoir réutiliser la jambe qu'il lui a broyé, je dis calmement. Il n'est pas fiable.