Chapitre 20 - Sabine

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« 1987 » Calogero

Je suis dans la salle d'embarquement. Tout autour de moi, les passagers semblent absorbés par les panneaux de départ, fixant les horaires avec une attention presque religieuse. Certains d'entre eux, visiblement nerveux, échangent des regards inquiets ou ajustent leurs bagages, tandis que d'autres, plus détendus, discutent tranquillement avec leurs compagnons de voyage ou tapotent sur leurs téléphones, perdus dans leurs mondes numériques. Mais moi, je ne vois rien de tout cela. Mon regard est fixé ailleurs, toujours en direction de l'escalator, cet escalator par lequel j'imagine, j'espère, je suis convaincue qu'il va arriver. Une petite voix dans ma tête me répète sans cesse : "Il va venir, c'est sûr."

Je me surprends à imaginer la scène, comme une répétition intérieure d'un film que je me projette en boucle. Juste au moment où je me lèverai pour embarquer, je l'entendrai crier mon nom. Un cri qui traversera la foule, résonnant dans la salle comme un écho que seul mon cœur pourra vraiment entendre. Je me retournerai, et là, je le verrai, essoufflé, les yeux brillants d'une intensité que je connais bien, me suppliant de rester près de lui. Oui, c'est ainsi que cela se passera, j'en suis sûre. Après tout, combien de fois ai-je vu ce genre de scène dans les films, où tout semble perdu avant que l'amour ne triomphe finalement dans une explosion d'émotions ?

La nuit dernière est encore fraîche dans ma mémoire, une douce torpeur dans laquelle je me replonge déjà avec une certaine nostalgie et qui n'avait rien de la séparation brutale que je redoutais. Il était là, tout contre moi. Dans ses bras, je me sentais en sécurité, enveloppée par une chaleur qui contrastait avec le froid que je redoutais de ressentir en m'éloignant de lui. Son souffle chaud, régulier contre mon cou, me berçait dans un état de calme, loin des tourments de mes pensées. Parfois, cela me chatouillait, provoquant un léger frisson le long de ma colonne vertébrale. Mais c'était un doux inconfort, une sensation que j'aurais voulu prolonger encore et encore. J'étais bien, simplement bien, comme si tout le reste du monde n'avait plus d'importance.

Les minutes passent, et les haut-parleurs commencent à crachoter des annonces. "Les passagers de première classe du vol AF236 sont invités à embarquer." C'est mon vol. Je suis en première classe, mais je me dis que je peux bien attendre encore un peu. Je décide de rester assise, les yeux rivés sur cet escalator qui ne livre toujours pas celui que j'attends.

L'impatience commence à me ronger. Chaque seconde qui passe semble s'étirer à l'infini, comme un élastique que l'on tire jusqu'à sa limite. Pourquoi n'est-il pas encore là ? Qu'est-ce qui pourrait bien le retenir ? Mes pensées tournent en boucle, cherchant désespérément une explication, un signe, n'importe quoi qui pourrait me dire qu'il arrivera.

Zut, maintenant les hôtesses appellent les passagers de la classe économique. Mon cœur se serre. Il n'est toujours pas là. Le moment de vérité approche, et je n'ai plus le choix... Je dois me lever, je dois embarquer. Mais au fond de moi, une part de moi-même continue de résister, refusant d'accepter l'évidence. Il n'est pas venu. Une vague de déception m'envahit, froide et amère, mais je me force à avancer, à faire ce qu'il faut.

D'ici quelques heures, je serai à Paris. Cette pensée ne m'apporte aucun réconfort, au contraire. Paris, la ville lumière, la ville de l'amour... Mais pour moi, ce sera la ville où je devrai reprendre ma vie comme si rien ne s'était passé, comme si tout cela n'était qu'un mauvais rêve. Mais tant de choses se sont passées. Tellement de choses ont changé en si peu de temps. Mon esprit tourbillonne de pensées contradictoires, et une part de moi se demande comment je vais pouvoir revenir à ma routine habituelle, comme si ces derniers jours n'avaient jamais existé.

Lorsque j'atterris à Paris, tout semble flou, irréel. Les visages, les voix, les bruits... Tout semble se fondre dans une espèce de brouillard épais. Je me dirige mécaniquement vers le bureau de presse, comme un automate. Là, je prends une poignée de magazines et je décide que je vais noyer mon chagrin dans les séries télévisées. Oui, c'est ce qu'il me faut : m'immerger dans des mondes fictifs où les histoires, aussi compliquées soient-elles, trouvent toujours une sorte de résolution. Je me surprends à sourire amèrement en parcourant les titres : Sex & the City, Once Upon a Time, Drop Dead Diva, The Good Wife. Finalement, quand on y réfléchit bien, ce ne sont que des séries où les hommes trahissent les femmes. Ironique, n'est-ce pas ?

Zac, can I have this dance? [Zac Efron]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant