Oublie-moi.

Chapitre 4

- Qu'est-ce que tu veux que ça me fasse ? Je m'en fous de ton prénom, râlé-je.
- Je pensais que c'était un bon début pour commencer à s'apprécier. Enfin, à bien s'entendre du moins.
- Dès que nous aurons trouvé une hache ou quelque chose qui pourrait briser les menottes, nous ne nous reverrons plus.

Il soupire, comme si il en avait marre de vouloir faire des efforts pour rien au final. Nous nous aventurons dans cette ville sans la connaître. Aucun immeuble, aucun paysage ne nous rappelle quelque chose. Il n'y a pas non plus de panneaux qui peuvent nous indiquer où nous nous trouvons. Pourtant, nous nous sommes aventuré depuis assez longtemps, parcourant de long en large la ville. Ni lui, ni moi ne pouvons dire où nous nous trouvons.
- Il faudrait peut-être demander quelqu'un notre chemin, finis-je par déclarer calmement.
- Et tu vas leur dire quoi ? Bonjour, on est perdu, on est dans quelle ville ?
- C'est toujours mieux que de tourner en rond.

Il me regarde et lève les yeux en l'air. Au loin, une vieille dame à la chevelure blanche légèrement dégarni se promène avec son caddie rouge à la main. Elle a l'air gentille, peut-être un peu tête en l'air à observer partout autour d'elle, comme si elle ne se souvenait pas où elle se trouvait. Je m'approche d'elle, suivi de Justin qui traîne un peu des pieds, sûrement parce qu'il en a marre de marcher ou que mon idée ne lui plaît pas vraiment.
- Bonjour madame, dis-je timidement.

La vieille dame me fixe avec étonnement, comme si elle ne s'attendait pas à ce que je vienne lui parler alors qu'elle a bien vu que je venais vers elle, en compagnie de Justin. Elle tourne sa tête vers Justin, le regarde de haut en bas, comme pour le détailler, pour se donner une première impression sur lui. Elle fronce les sourcils en voyant ses cheveux et ses nombreux tatouages. Elle pense sûrement qu'il ne fait pas attention à lui ou que c'est une racaille, prêt pour se battre ou pour causer du soucis à des personnes sans problèmes comme elle. Lorsqu'elle me détaille à mon tour de haut en bas, aucune expression sur son visage ne se dessine, comme si elle s'en fichait un peu de moi ou qu'elle ne savait pas vraiment quoi penser de moi.
- Nous nous sommes perdu, est-ce que vous pouvez nous dire dans quelle ville on est ? Ajouté-je nerveusement.

Elle ouvre les yeux en grand afin de marquer son étonnement. C'est comme si je venais de lui annoncer la fin du monde, pourtant, je suis sûre de ne pas être la seule à demander son chemin, même si je l'avoue, ne pas savoir dans quelle ville je me trouve, c'est étrange.
- À Lohja, me répond-t-elle avec une voix tremblante.

Sur ces mots, elle continue sa promenade, nous laissons tous les deux. Justin me fixe, étonné. Nos regards se croisent et ni l'un, ni l'autre ne parle. Nous sommes tous les deux dans l'incompréhension totale. Je ne sais même pas dans quel pays se trouve la ville de Lohja, ça m'apprendra à ne pas m'intéresser à la géographie. Je me rapproche un peu de Justin, comme pour me rassurer un peu face à cette situation. Je lève la tête et le regarde. Nous sommes à quelques centimètres l'un de l'autre. Son regard est porté loin devant lui. Je détaille son visage pendant qu'il se mouille les lèvres avec sa langue. Sa peau n'a pas l'air parfaite mais pourtant, aucun bouton n'est présent. Il a un peu de moustache, ses poils ont l'air de pousser doucement. Je ne sais pas pourquoi mais j'ai l'impression d'être en sécurité avec lui. Je ne le connais pas mais il arrive à me rassurer alors qu'il ne fait rien et que je suis dans une ville que je ne connais pas avec un trou noir. J'aimerais que mon mari soit près de moi afin qu'il me rassure. Il sait comment me rassurer, me faire oublier mes peurs et quand il n'est pas là, je suis comme perdue. Jusqu'à là, il était le seul à me rassurer pendant mes moments de doutes, de peurs, pourtant, Justin arrive lui aussi à me rassurer même si ce n'est pas de la même manière de mon mari. Je ne sais pas comment l'expliquer, c'est peut-être dû à ses muscles qui sont développer qui me font me sentir bien, qui me donne confiance, sans avoir peur qu'un homme ne m'agresse ou me harcèle. Ou peut-être parce qu'il est dans la même situation que moi, qu'il ne se souvient plus de rien, qu'il est perdu qui me rassure. C'est toujours mieux d'être avec quelqu'un lors d'un moment comme celui là, même si je ne le connais pas et même si je ne sais pas ce qu'il s'est passé cette nuit, c'est un léger avantage de ne pas avoir peur à ses côtés, de ne pas se sentir seule. Je tourne ma tête afin d'arrêter de le regarder et repense à cette ville dans laquelle je me trouve. Lohja. Cette ville ne me dit absolument rien, que ce soit de nom ou à en voir le paysage.
- C'est où Lohja ? Demandé-je en baissant la tête, de peur de paraître ridicule.
- Je ne sais pas du tout.

J'entends sa respiration et voit qu'il ferme les yeux, comme si il voulait se réveiller de ce cauchemar. Pourtant, il sait tout aussi bien que moi que ce n'est pas un rêve.
- Le pire dans tout ça, ajoute-t-il. C'est que je ne me souviens pas d'être arrivé ici.
- Qu'est-ce qu'on fait maintenant ?

Il pose ses yeux sur moi d'un air sérieux, d'un air concentré. Il laisse le silence s'installer rapidement, ce qui me met légèrement mal à l'aise.
- On va faire comme j'avais dit, on va remonter toute cette histoire depuis la fin.
- C'est une perte de temps, soupiré-je.
- Je ne crois pas, non. Je te rappelle qu'on a rien, aucun souvenir. On ne sait même pas où l'on est.
- On va dans un aéroport et on prend le premier avion pour rentrer.
- On est menotté, me rappelle-t-il.
- Ça va nous mener à quoi de recoller les morceaux de cette histoire ?
- À savoir pourquoi on est dans une ville que l'on ne connaît pas et où on a jamais mis les pieds. Il y a forcément une raison à ça.