Voilà, les flics viennent de partir de ma chambre d'hôpital, j'ai fini ma déposition. Même si j'ai toujours des nausées et que j'ai arrêté de dégueuler, j'ai assez de force pour écrire mon histoire. Ça s'est passé avant-hier, pas très loin de chez moi.
Après de bons et loyaux services, mon vieux scooter avait rendu l'âme, et mon pote, qui me ramenait souvent chez moi quand j'étais en panne, était absent depuis quelques jours (c'était le roi de la sèche et du rendez-vous galant pendant les heures de cours).
Le jour où ça s'est passé, je finissais tôt (15 heures) et le car scolaire avait du retard. Aucune info sur son heure d'arrivée, aucune envie de poireauter, j'avais des fourmis dans les jambes, j'avais envie de bouger après une heure de philo chiante à en mourir. De nature sportive, j'ai donc décidé de faire les cinq kilomètres jusqu'à chez moi à pied (ça m'arrivait souvent de le faire).
Le temps était lourd, orageux. J'ai bien vu des nuages noirs assombrir l'horizon, mais je me suis dit qu'en marchant vite je pouvais être à la maison avant eux. Je me trompais. Cinq minutes plus tard, les éclairs illuminaient le ciel obscur. Ensuite les coups de tonnerre, rapprochés, si puissants que je devais me boucher les oreilles. Avant les premières gouttes de pluie, j'ai commencé à courir, pensant encore être épargné. Puis un vrai déluge s'est abattu sur moi, un déluge comme je n'en avais jamais vu. Et ce vent... Un vent du diable. Tous les blés autour de moi étaient couchés. La pluie était glaciale, j'étais trempé jusqu'aux os, je maudissais mon initiative.
Mais ce n'était que le début. Des grêlons de la taille d'une balle de golf ont commencé à s'éclater sur le bitume. Le ciel, la terre, mon corps, tout craquait, un bruit d'enfer, comme des impacts de balle sur un mur ou une carrosserie. Franchement, j'ai vraiment cru que j'allais y passer, et au moment de retourner au bahut, une vieille estafette s'est arrêtée à ma hauteur. Je n'aurais jamais dû y grimper, j'aurais dû crever sous l'orage, ou me taper la permanence, plutôt que de faire ce que j'ai fait.
Le conducteur était un fermier, un gros gaillard bedonnant à l'air sympa, malgré ce sale rictus qui pointait constamment vers son oreille gauche. Les énormes grêlons continuaient à abîmer la carrosserie de son estafette et lui il souriait bêtement, sans rien dire, sans même m'inviter à monter dans sa caisse. C'est pourtant ce que j'ai fait, je suis monté et il a redémarré.
Je lui ai dit que j'habitais à l'entrée du village, et qu'il était vraiment sympa de me ramener chez moi. Il m'a répondu que lui habitait moins loin et qu'avec ces grêlons, sa caisse allait finir par ressembler à une passoire. Je n'avais pas d'autre choix que de le suivre.
Sa ferme n'était qu'à une centaine de mètres. À l'intérieur un salon, immense, tout en lambris et en poutres, avec une grande table en chêne foncé, des têtes d'animaux empaillées sur les murs ainsi que divers objets africains ou d'ailleurs. Une seule fenêtre, assez petite, était visible à côté de la porte d'entrée. Cela rendait l'endroit plutôt austère, un peu sombre, juste éclairé par un lustre et ses ampoules faiblardes qui grésillaient sur un cerceau en fer forgé. Je ne peux pas dire que je m'y sentais très bien mais bon, les fermiers n'ont pas la réputation d'être les rois de la déco.
Glacé jusqu'aux os, j'ai accepté la douche chaude qu'il me proposait (il a vraiment insisté). J'ai aussi accepté les vêtements de son fils. La douche était sur le palier, à l'étage, la première porte d'un long couloir assez sombre.
Pendant ma douche, j'ai entendu un cri. J'ai arrêté les robinets pour écouter plus attentivement. Mais dehors, l'orage grondait. J'ai pensé qu'il en était à l'origine, ou peut-être que je me faisais des idées à cause de cette salle de bain, aussi mal éclairée que le salon, que le couloir. Une lucarne laissait passer le flash des éclairs, et quand je suis sorti de la douche, sur le mur face à moi, j'ai vu comme l'ombre d'un tronc ou d'un corps démembré. La tête bougeait, allait de droite à gauche, comme si, peut-être, quelque chose était en train de la torturer. Puis elle a disparu dans le projecteur des éclairs suivants. À ce moment-là je me suis dit que j'étais victime d'hallucinations.
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Don't Read at Night | Tome 1
TerrorVoici le premier tome de la trilogie Don't Read at Night. Ces trois tomes contiendront individuellement 199 histoires d'horreur, donc en tout 597 histoires pour vous effrayer et vous faire vivre des nuits blanches. Bonne lecture et surtout.. Ne lise...