Chapitre 3 : Le coup de vent du garage

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La porte s'ouvrit en trombe et la grande silhouette pressée entra comme un fusée, retira son long manteau dans un bruissement sourd et alla s'assoir devant son bureau sans jeter un regard à la pièce.

- Tu fait toujours autant de bruit, d'habitude ? demanda Carmen avec lassitude.

Elle s'appuya longuement sur le chambranle de la porte, attendit quelques secondes qu'il s'intéresse à son arrivée et s'immobilisa lorsqu'elle croisa le regard de Smith, observa longuement son sourire en coin et soupira.

- Ne dis rien, va. T'as trouvé un nouveau gamin ? Encore ? C'est la troisième fois.

Elle s'approcha vaguement de l'ordinateur et fis mine de regarder l'écran avec une grimace de dégoût.

- Dans quoi celui-ci s'est fourré ?

- Craquage de données, répondit-il avec lassitude.

- Depuis quand c'est ton domaine ?

- J'ai pris quelques cours.

Elle fit le tour de la pièce, regarda avec lassitude le tas de vêtements roulés en boule et les tasses de café froid à moitié pleines, jamais finies, qui jonchaient le bureau par-dessus des milliers de papiers "sans importance", mais qui ne devaient jamais être jetés pour autant. Carmen failli trébucher sur les chaussures noires encore pleines de boues de l'entrée, se permit de jeter un oeil dans les poches de l'immenses manteau noir qui, malgré la grandeur inutile du porte-manteau, trainait par-terre.

- Tu laisses tes rideaux fermés ? Tu trouves pas qu'il fait vachement sombre, non ?

Il ne répondit pas. Seul le son des touches de clavier emplissait la pièce.

- Je te pose une question. Smith. Hey.

- C'est pas le moment, Carmen.

Elle croisa les bras, s'adossa au mur avec obstination.

Une semaine qu'il était enfermé comme un rat dans cette pièce ridiculement crasseuse. Une semaine que c'était "pas le bon moment Carmen". Et une semaine qu'elle s'ennuyait plus qu'un enfant de 6 ans à une conférence de la COP21. Elle n'essayait même plus d'ouvrir les rideaux. Dès qu'elle le faisait, il attendait très calmement qu'elle quitte la pièce pour les refermer d'un coup sec, puis se rassoir à son bureau. Sans faire attention à elle, comme d'habitude.

- Smith. Tu fais quoi ?

Pas de réponse. Il se mit à tapoter des doigts sur le bord de la table, la tête posée sur l'autre main avec une expression d'intense réfléxion savante. Sans trop se poser de question, elle se dressa devant le bureau, plaqua ses deux mains de chaque côté de l'ordinateur portable, et se pencha juste assez pour pouvoir détailler chaque détail des yeux verts de Smith.

- Tu fais quoi ? demanda-t-elle d'un ton léger.

Il lui jeta un regard fatigué, soupira et s'appuya contre le dossier de sa chaise avec un soupir. Et sourit.

- Oh, ça va pas te plaire, Carmen.

- T'as l'air d'oublier que c'est mon garage, et pas le tien. Si tu veux faire des cachoteries, barre-toi et redevient SDF.

- J'étais pas SDF.

- T'étais SDF. Peu importe. On s'en fout, Smith. Tu-fais-quoi ? dit-elle en détachant chaque syllabe.

- Je m'occupe d'un gamin.

Elle hocha la tête.

- Ouais, je me doute. Mais encore ?

M. SmithOù les histoires vivent. Découvrez maintenant