Chapitre 14 : Un peu d'action et d'angoisse

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Smith avait déposé Alec à l'internat le plus tôt possible. Personne n'oserait jamais entrer par effraction dans un lycée de petits riches, c'était la meilleure cachette possible (mais aussi la plus évidente). Smith savait que leurs poursuivants seraient comme des chiens au pied d'un arbre : attendant que le nid tombe d'une branche, droit dans leur gueule. Il avait conseillé à Alec de ne sortir sous aucun prétexte. C'était une situation tendue.

Cependant aujourd'hui était une belle journée, puisque Smith allait avoir le plaisir de passer du bon temps avec son grand ami "Marco", qui avait beaucoup beaucoup de choses à lui dire. Marco n'était pas bavard, et ils ne s'étaient rencontrés qu'une fois, mais Smith attendait énormément de cette conversation, alors son ami devra faire quelques efforts....

*   *   *   *   *

Le soleil tapait dur, et Marco était de très mauvaise humeur. Sa boutique favorite venait de fermer ses portes pour le restant de l'été et n'ouvrirait qu'en septembre prochain, le privant pendant quelques mois de ses chips préférées. Quelle tragédie.

Marco était une vraie drama-queen, de nature très grognon, vif, bourru, avec une psychologie et une physiologie semblable à celles d'un bœuf mal luné. Il avait une femme qui s'appelait Gina, et qui, elle, pouvait se confondre, dans la pénombre, avec un immense vautour marron. Si Marco sortait aussi souvent, c'était surtout parce qu'il avait de plus en plus de mal à supporter ses geignements criards et ses petits regards perçants.

Ce matin là, justement, une dispute avait éclaté, et pour se consoler, il avait entrepris d'aller acquérir un paquet de chips "poulet/tomate/gingembre" (ses préférées), lorsque la fermeture du magasin l'avait frappé. En rogne, il avait donc décidé d'errer dans les rues du centre-ville, les mains fourrées dans ses poches, et l'œil mauvais.

Marco n'était pas très intelligent, et avait une mémoire terrible : ce qui allait lui coûter beaucoup, ce jour là.

La rue principale était particulièrement bondée, et traversée par des flots constants d'inconnus aux mines sombres. Marco s'engagea à pas lourds dans l'avenue ensoleillé, la tête baissée. Le soleil commençait à lui taper sur la nuque, alors il releva la tête, et planta ses yeux dans le dos de l'homme devant lui.

"Ce qu'il peut être grand", se dit Marco en fronçant les sourcils.

Le long manteau noir et la carrure de déménageur viking ne lui mirent pas la puce à l'oreille, puisque, comme nous l'avons soulevé récemment, Marco était particulièrement idiot. Il est vrai qu'il s'intéressa quelque peu au petit chignon bas de l'homme, mais ses pensées divaguèrent rapidement sur le comportement de sa femme, et le petit chignon fut oublié.

Notre ami était également long à la détente, et mit un temps infini à se rendre compte que, peu importe sa trajectoire, l'homme en question parvenait toujours à se maintenir juste devant lui. Il trouva cela étrange, mais au lieu de ressentir une pointe d'inquiétude, c'est sa colère de buffle demeuré qui prit le dessus. Comme il manquait également de jugeote, il ne rendit pas compte une seule seconde que l'homme pourrait l'envoyer voler sur cinq mètres s'il décidait d'y mettre un peu du sien, et que ses coups de poings gras ne lui feraient ni chaud ni froid. Mais malheureusement pour lui, et sans doute à cause de ses nombreuses heures cumulées passées à visionner du catch de seconde zone, il semblait être persuadé de ses capacités destructrices.

C'est donc avec toute l'assurance que sa stupidité morbide lui accordait que Marco entreprit de taper de toutes ses forces sur l'épaule gauche de l'homme. Il lui aurait bien claqué la tête, mais Marco avait eu le malheur de naitre petit, et  l'épaule du monsieur était donc la chose la plus haute qu'il atteignait en tendant la main (ce qui attisa sa colère).

M. SmithOù les histoires vivent. Découvrez maintenant