Carmen s'en mordait les doigts, mais elle devait se rendre à l'évidence : (1) elle ne parvenait pas à oublier Smith. "Oublie-moi", qu'il avait dit, comme si c'était si facile ! Elle s'était prise à le chercher des yeux dans la pénombre du garage plusieurs fois, par habitude.
(2) Elle ne reverrait jamais Smith. Il était doué pour partir en coup de vent et disparaitre. Il n'était pas du genre à s'attacher à quiconque. Oh si ! peut-être s'attachait-il parfois à ses gosses de MER....
Non, il ne fallait pas s'énerver autant. Elle avait déjà réussi à se sortir de sa torpeur semi-dépressive, c'était déjà un grand pas vers l'avant. Mais sa vie était terriblement vide, et elle était prise à la gorge par ses souvenirs dès qu'elle s'arrêtait de faire quelque chose. De loin, elle devait ressembler à une abeille nerveuse sous stéroïde. Le souvenir le plus récurrent lui venait d'une soirée fraîche en mai.
Smith avait disparu trois jours plus tôt, et elle commençait à se dire qu'il ne reviendrait plus. Mais la sonnette avait tinté, elle avait ouvert la porte, et il était là, vacillant d'alcool, titubant sous son propre poids. Elle se souvient l'avoir engueulé copieusement, puis qu'il s'était écroulé sur elle. Son poids de montagne l'aurait presque tuée. Avec énormément de mal, elle avait réussi à le jeter sur son lit, à lui faire ingérer de l'eau, et lui interdire de bouger. Bourré, il avait un comportement étrange. Les premières heures, insupportable de jovialité et d'enthousiasme. Quand l'alcool redescendait, mélancolique et bavard. Elle pouvait encore voir en détail son visage tendu, à moitié écrasé dans l'oreiller, levant les yeux vers elle à intervalle régulier, pendant qu'il racontait, inlassablement. C'était les seuls instants où Smith s'était laissé submerger par de quelconques émotions. Et ça ne durait jamais bien longtemps. Mais si Carmen s'attachait tant à ce souvenir, c'était parce que c'est à peu près à ce moment-là qu'elle s'était rendue compte qu'elle appréciait Smith plus qu'elle ne l'aurait du, plus qu'elle ne l'aurait voulu.
Mais elle combattait cette impression désagréable. C'était dommage, si elle s'était entichée d'une personne légèrement normale, elle aurait pu espérer quelque chose. Mais là, toute cette relation ne représentait qu'une gros nœud d'échecs. Elle ne le pouvait pas, mais elle devait l'oublier.
C'est en plein milieu de cette réflexion, qu'elle se faisait une centaine de fois par jour, que la sonnette tinta encore. Son ventre se tordit, son cœur se serra. C'était improbable que ce soit...? Elle espérait.
Mais elle allait être déçue.
* * * * * * * *
Quinn se pencha par dessus Joël et observa les lieux. C'était un petit lotissement propret, en apparence, car si on plissait suffisamment les yeux sur certaines maisons, on pouvait y voir la pauvreté et l'inconfort.
- On est au bon endroit ? demanda-t-il en se collant contre son siège.
Joël serra les doigts sur le volant.
- C'est l'adresse indiquée dans l'enveloppe, en tout cas.
Son partenaire hocha la tête.
- C'est quand même dingue, murmura-t-il prudemment. Si ça se trouve, cette fille n'a rien à voir dans cette histoire, et tout ça est une fausse piste...
- Ça reste un piste, répondit Joël avec flegme, haussant les épaules. Si tout va bien, on lui pose trois questions, et on sera fixés.
Ils étaient garé à trois maisons de l'adresse exacte. Avec un signe de tête entendu, les deux hommes s'extirpèrent de la voiture. Joël jeta un œil vers son coéquipier. Quinn saisit le pistolet dans la boite à gant et l'installa dans son holster, avant de tout recouvrir d'une veste noire. Classique.
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M. Smith
AdventureNetMoney, l'entreprise qui a tout perdu, et dont la faillite à fait trembler les US. Le coupable n'est autre qu'un enfant de douze ans, Alec, qui possède un talent évident pour le piratage, et qui n'a aucune idée des conséquences de ses actions. Or...