Chapitre 21 : Héron et bières

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« C'est qui, l'autre grand dadais qui était avec toi, l'autre fois ? » avait grogné l'autre crétin à capuche. Carmen avait fait sa maligne, elle pensait être plus rapide qu'eux, plus intelligente.

Que peut une femme seule face à trois hommes ? Rien, rien du tout. Même si elle avait été championne du monde de boxe, ils l'auraient quand même rouée de coups de cette manière.

Elle chassa ces pensées en fermant les yeux, et tenta de refouler la douleur qui lancinait ses côtes.

Elle avait décidé de copieusement leur cracher à la gueule.

« Allez vous faire foutre », ou était-ce « tu peux bien aller te faire foutre » ? Elle ne savait plus trop. Ses souvenirs s'emmêlaient en s'enchevêtraient, la douleur et le choc avait recouvert sa tête de coton, elle se sentait lourde brûlante, mais elle grelottait de froid.

L'autre l'avait insulté, l'avait insulté lui, avait commencé à se rependre en menaces grasses et grossières. Les trois se rapprochaient dangereusement d'elle. L'un deux lui avait touché la joue avec un petit sourire racoleur, ce qui l'avait dégoûtée au point de lui donner la nausée.

Cela allait sans dire : c'était encore eux. Carmen n'avait aucune idée du nom de leur organisation, ou d'où ils sortaient, elle savait juste qu'ils étaient à ses trousses depuis cette putain d'histoire de NetMoney, depuis Alec, depuis ce dimanche matin de merde.

Elle repoussa un mal de crâne insupportable en appuyant sa tempe contrela vitre.

Aujourd'hui,elle finissait tôt. Après le boulot, elle était sortie sur le parking le plus tard possible, comme d'habitude. Sa voiture avait disparu. Elle avait passé une bonne dizaine de minutes seule, paniquée, à fouiller du regard un parking complètement vide. Puis elle avait compris, et s'était engagée sur un chemin différent de d'habitude, espérant qu'ils n'y soient pas. À pied, le trajet du Dunkin à chez elle représentait une bonne heure. Elle aurait du se douter qu'ils la retrouveraient à mi-chemin. Carmen avait tout tenté. Crier, courir, menacer... appeler le japonais à la rescousse, entre autres. Prise par un élan de courage et de colère, elle les avait entraînés dans la petite cour, pour les confronter. Elle n'avait toujours aucune idée de ce qu'elle espérait.

Le premier coup faisait le plus mal.

Sa vision s'était brouillée, les lumières et les couleurs s'étaient transformées en feu d'artifices douloureux. Elle avait valsé brutalement contre le mur, et la colère l'avait jetée à nouveau sur eux, projetant ses poings dans tous les sens, beuglant des insultes dans toutes les langues qu'elle connaissait.

Deuxième coup. Bam !

Elle s'était très peu confrontée à la violence physique, dans le passé. En fait, elle ne s'était battue pour de vrai qu'une seule fois. Elle en gardait sa petite cicatrice, que parfois elle perdait de vue, et qui ressortait tout particulièrement lorsqu'elle avait la peau bronzée. Juste au dessus de la lèvre.

Après, elle avait reculé, sentit le goût du sang dans sa bouche. Son dos avait heurté le mur, elle avait esquivé un autre coup, puis dérapé dans une flaque d'eau relativement boueuse. Son épaule droite avait heurté le sol, et elle avait à peine eu le temps de penser à bouger qu'un premier coup de pied lui avait chassé l'air des poumons avec une violence inouïe.

Elle s'était contorsionné, crachant ses tripes, cherchant de l'air en se tortillant au sol pendant quelques secondes. Pour une raison ou pour une autre, les trois gars avait attendu un peu avant de tous s'y mettre, histoire de réaliser la bourde qu'ils étaient en train de commettre. Il était évident qu'on leur avait ordonné de ne pas lui faire de mal. Et bien c'était raté.

M. SmithOù les histoires vivent. Découvrez maintenant