10.

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KALTER:

Je sors enfin de cet endroit chiant à mourir. Quel paradoxe, un endroit qui sauve les gens de la mort mais qui donne envie à n'importe qui de se suicider d'ennui.

Je n'ai pas reparlé à Ethan. Il vient tous les jours mais je ne veux pas voir son regard dégouté sur moi. Malgré tout ça, ma motivation inconnue me pousse à continuer mes efforts. Je suis une énigme à moi seul. Comment un gars suicidaire qui se dégoûte peut continuer à faire des efforts sur lui-même. Je songe souvent à abandonner mais le lendemain comme un automatisme je recommence mes efforts. Je mange correctement et je ne regarde pas mes coupures pour ne pas vouloir recommencer. C'est pas facile mais avec mes séances d'élocution et ceux avec la psy je m'en sors tout doucement. Je me hais toujours autant mais quelque chose prend le dessus. Cette chose, cette motivation est toujours là mais depuis quelques temps elle reste moins intense. Je suis totalement perdu et comme à chaque fois que je le suis je ne pense qu'à une chose. Mourir. Putain mais je suis vraiment bipolaire ! Je peux changer d'humeur si vite, je suis heureux et deux secondes après je parle de mourir. Quel con.

C'est évidemment lors de mes pensées les plus sombres que quelqu'un entre dans la chambre. Un docteur.

— Prêt à sortir jeune homme ?

Je me contente de hocher la tête de haut en bas montrant qu'en effet je suis prêt à quitter l'enfer-même. J'ai besoin de partir d'ici avant de devenir complètement fou ! Le médecin retire délicatement mes perfusions avant de me faire un check-up complet.

— Vous êtes en parfaite santé mais vous viendrez nous voir tous les mois pendant un an et puis nous nous verrons lorsque vous viendrez voir le psychologue.

Je lui souris sans rien ajouter. Ça me fait chier car j'ai déjà vu des psychologues et ils n'ont jamais rien fait pour moi. Jamais. Mais bon je sais que si je veux réellement m'en sortir je dois fermer ma gueule et accepter d'en voir un autre. Celui-là sera peut-être meilleur, qui sait.
Alors que je m'apprête à sortir de la chambre, la porte s'ouvre sur Ethan.

— Désolé je suis en retard !

Je le regarde étrangement. Je lui fait la gueule mais il vient à ma sortie d'hôpital. Bon il est tout de même venu tous les autres jours mais je ne pensais pas qu'il viendrait aujourd'hui. Réellement. Je dois tellement l'emmerder.

— Bon, tu es prêt le susceptible ?

Je lui offre le plus beau majeur de la planète. Finalement lui aussi m'emmerde. Je prends mon sac de fringues et sors de la chambre en passant devant Ethan qui part signer les papiers de ma sortie. Il fallait un responsable légal mais dans mon cas ils ont confié cette tâche à Ethan et Katlin. L'autre abruti revient deux minutes après, un air ravi sur le visage. Je le fixe. Son petit air d'enfoiré est mauvais signe.

— Quoi ? Il demande brusquement.

« - Tu comptes me tuer ? »

Il explose de rire avant de hausser les épaules en signe de " j'en sais rien ". Tellement rassurant tout ça. Il me conduit jusqu'à sa voiture, prend mon sac et le jette à l'arrière.
Il ne dit plus un seul mot puis grimpe côté conducteur pendant que j'attache ma ceinture juste à ses côtés. C'est gênant comme silence. Autant quand il venait tous les jours et que je lui parlais pas je m'en fichais totalement mais là c'est désagréable.

« - Ethan ? »

Je lui montre mon portable mais il ne le regarde pas.

— Je peux pas lire Kalt, je suis au volant.

Oh. Au volant ou pas le surnom qu'il m'a donné est mauvais signe. Kalt. Il ne l'a jamais employé, il aime m'appeler différemment des autres, se démarquer. Je baisse les yeux et joue avec mes doigts. D'accord je pouvais pas le supporter mais maintenant que je le peux et l'apprécie c'est lui qui me supporte plus. Putain qu'elle vie de merde. Et c'est lui qui est con, pas moi après tout.
Mais malgré ma fierté je ne peux pas me dire qu'il fait la tête à cause de moi. J'ai mal réagi à son silence et pourtant il n'y est absolument pour rien.

— Et...

— Non Kalter économise ta voix ! Tu l'utilises juste pour tes exercices le matin et lors de tes rendez-vous à l'hosto, c'est clair ?

Je hoche la tête. Le médecin me l'a pourtant dit. Si j'utilise trop ma voix en dehors des exercices et des rendez-vous je risque de ne pas m'en sortir. Tout doit se faire progressivement, je ne dois pas aller trop vite.
Sa main se pose sur mon genou.

— Ça n'a rien à voir avec toi Kalter, je conduis et tu ne dois pas trop parler. Attend que l'on soit dans ta chambre pour qu'on puisse parler.

Un blanc s'installe. Je sais qu'il a raison. Putain mais je me comporte comme un gamin. Je suis à l'université, on dirait que j'ai vingt-cinq ans mais non je me comporte comme si j'en avais que douze ! Il faut vraiment que j'arrête mes conneries.

Quand nous arrivons enfin devant l'établissement je me dirige sans rien demander vers ma chambre.

— Kalter ! Mais attend moi putain ! Gueule Ethan.

Je le regarde de travers sans aucune expression.

« - J'ai juste besoin d'être seul

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« - J'ai juste besoin d'être seul. De mettre à jour toutes ses données dans ma tête. Je peux pas continuer d'être comme ça. »

— Pourquoi es-tu comme cela ? Qu'est-ce qui t'a tué intérieurement Kalter ?

Oh je suis passé proche de la mort et en prime j'ai subit les pires tortures possibles. Donc oui je suis déjà mort sauf que j'aimerais bien me la jouer à la Jon Snow et revivre. Intérieurement d'abord puis extérieurement. J'aimerais faire comme les autres ! M'amuser, me promener, aller à des fêtes, boire et tirer une latte d'un joint sans avoir mon addiction qui me rattrape. Et j'aimerais aimer aussi. Être uns d'humain comme les autres mais tout en restant moi.

Je souffle, reprends mes esprits. J'embrasse la joue d'Ethan. Pas parce que je suis un putain de faible mais simplement pour le remercier de tout ce qu'il fait. Il me soutient et me pardonne malgré tout alors à mon tour de montrer que j'ai un cœur. Je prends ma valise qu'il avait en main et me dirige vers ma chambre. J'ai besoin de repos, de solitude. Mais j'ai surtout besoin d'aide. Mais pour qu'on puisse m'aider il faut que je prenne conscience de beaucoup de choses. Mon Dieu je vais devoir tout reprendre à zéro sans échouer. J'aurais mieux fait de réussir mon coup et de chuter sur une autoroute.

Je suis déjà sur la mauvaise voie.

HARD TO LIVE (tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant