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C'était enfin le weekend pour les lycéens.

La joie.

C'était ce qui se ressentait dans l'air chaque vendredi soir. J'avais appris à la décrypter sans jamais la ressentir. La joie se traduisait par des grands sourires qui dévoilaient toutes les dents, une bonne humeur permanente et l'envie de faire la fête pour n'importe quelle raison.

Camille avait d'ailleurs une soirée organisée en ce vendredi soir. Après les cours, elle se dépêcha alors de rentrer chez elle, afin de se préparer. Elle était toute excitée à l'idée de faire la fête ce soir. L'excitation était également un sentiment étroitement lié à la gaieté qui avait le don d'illuminer le visage des humains.

Camille était habillée d'une robe assez courte et moulante, ce qui plaisait, d'après ce que j'avais compris, à bon nombre de jeunes adolescents. Je ne comprenais d'ailleurs toujours pas, comment la forme d'un tissu pouvait influencer le désir qu'éprouvaient les hommes à l'égard d'une femme.

Une fois prête, elle partit en direction de la grande maison où avait lieu la fête. L'ambiance, au court de la soirée ne faisait que monter. Un grand nombre d'adolescents étaient déjà beaucoup trop alcoolisés et Camille ne tarda pas à les rejoindre.

Les jeunes semblaient se libérer le temps d'une soirée de leurs problèmes et de leurs complexes, mais ils oubliaient souvent trop vite que le soleil se levait bien plus tôt qu'ils ne le pensaient et que tout revenait à la normale.

Camille dansait parmi ses amis au milieu de la piste de danse et riait avec sa meilleure amie Lexie. Thomas, le fameux jeune homme qui l'attirait, se colla à elle afin d'entamer une danse au rythme de la musique. Je parvenais à lire sur leurs deux visages que cela plaisait autant à l'un qu'à l'autre. L'attirance chez les hommes n'était pas toujours réciproque, mais lorsqu'elle l'était, elle dégageait une harmonie, une sorte de symbiose.

Son rapprochement avec ce garçon n'était ni bien ni mal, en réalité, je ne pouvais en aucun cas prédire si c'était mauvais pour elle. L'attirance et l'amour sont beaucoup trop imprévisibles pour tenter de les prédire.

En revanche, je savais qu'accepter la proposition que venait de lui faire cette grande brune n'aurait que des effets négatifs. En effet, la fille venait de proposer à Camille un petit cachet blanc qu'elle était en train d'écraser contre le comptoir de la cuisine. La grande brune se baissa afin de respirer par le nez la poudre blanche qui emplit alors ses poumons.

Camille s'approcha dangereusement du comptoir, comme pour montrer son envie de goûter à cette drogue. C'était le genre d'erreur que je ne pouvais pas la laisser faire, tout simplement car ce n'était pas le genre d'erreur qui dissuadait de recommencer, mais bien au contraire.

La grande brune se redressa un grand sourire affiché sur son visage et proposa à Camille de goûter à son tour à la poudre blanche. Je ne pouvais me matérialiser au milieu de tous ses jeunes. Me voir apparaître comme par magie ne pourrait pas être seulement mis sur le compte du surplus d'alcool avalé.

Je pris ma forme humaine dans une chambre à l'étage, toujours vêtu de mon long manteau noir et dévalai les escaliers à toute vitesse. Mes yeux se posèrent immédiatement sur ma protégée qui s'apprêtait à respirer la drogue. Je me faufilai du mieux que je pouvais au milieu de tous ces jeunes en transe et sans même freiner à l'approche de Camille, je lui donnai un violent coup d'épaule. Celle-ci fût bousculée en arrière et se retourna brusquement vers moi avec un regard dont je n'en comprenais pas le sens. J'étais immobile, ne pensant qu'à une seule chose: le picotement qui se répandait dans ma main.

- Tu peux dire pardon non? Me lança-t-elle hargneusement.

Je jetai un coup d'œil rapide à la poudre blanche désormais éparpillée sur le sol. Mon devoir était terminé alors je me dirigeai vers la porte de la maison sans même lui accorder une réponse. "Tu ferais mieux de me remercier" pensais-je. À peine dehors, je repris directement ma forme immatérielle.

Le reste de la soirée défilait devant moi, pourtant je n'y étais pas attentif. J'avais juste vérifié que Camille ne tente pas à nouveau des folies, mais elle avait rejoint Lexie qui semblait prendre soin d'elle. Quant à moi, j'étais distrait par ce picotement incessant dans ma main droite. Lorsque j'avais donné le coup d'épaule à Camille, nos mains s'étaient elles aussi entre-choquées et depuis un fourmillement étrange avait pris possession de ma main.

C'était la première fois que ma peau était en contact avec la peau d'un humain et cette sensation nouvelle ne me laissait pas indifférent. Je ne comprenais même pas comment elle pouvait persister alors que je n'étais plus matériel.

Ange GardienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant