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- Ça te dirait de regarder Titanic avec moi? Me demande-t-elle allumant son ordinateur portable. 

- Vraiment? Tu n'as pas de travail pour demain?

- Tu es mon ange gardien ou mon père? Et puis regarder Titanic fait parti de notre découverte du monde! S'exclame-t-elle enthousiaste.

Je la regarde peu convaincu par ses derniers propos. 

- C'est vrai, continue-t-elle. Si tu restes de marbre devant ce film, c'est que tu n'as définitivement rien d'humain.

- C'est d'accord, dis-je m'installant à côté d'elle sur le lit.

J'étais moi même curieux de découvrir si ce film qui avait fait coulé tant de larmes allait arracher à mon œil ne serait-ce qu'une petite goutte d'eau salée.
Nous étions tous les deux installés sur le lit, sa tête reposant délicatement sur mon épaule.
Les images défilaient et racontaient l'amour impossible et pourtant réciproques entre les deux personnages, scénario certes classique, mais captivant. J'avais déjà entendu parlé de ce film pleins de fois et pourtant, au fur et à mesure que le temps passait je ne ressentais toujours rien. Nous restions silencieux pendant toute la durée du film et une fois que le générique retentit, elle se redressa et ferma son ordinateur portable.

- Alors?

Je savais à sa façon de me demander cela qu'elle mourait d'envie d'entendre que cela m'avait ému, mais ça ne servait à rien de mentir juste pour lui faire plaisir.

- Non rien, dis-je en secouant la tête de droite à gauche.

À vrai dire je ressentais un petit quelque chose, mais il s'agissait plus de ma compassion pour ces personnages si proches du bonheur que d'une réelle tristesse.

- Et toi, tu n'es pas humaine non plus. Tu es restée de marbre.

- C'est différent j'ai déjà vu trop de fois ce film pour qu'il me fasse encore quelque chose.

Elle avait réponse à tout, je ne pouvais la contre dire. Des pas se firent entendre dans l'escalier et c'est alors que Camille se leva brusquement.

- Il faut que tu disparaisse, annonça-t-elle.

Obéissant sans me poser plus de questions, je me concentrais, fermai les yeux et disparu.

- Gabriel t'attends quoi? Dit-elle précipitamment.

Lorsque j'ouvris les yeux, j'étais toujours au beau milieu de sa chambre.

-J'y arrive pas, dis-je totalement perdu.

Elle m'entraîna alors sans plus tarder dans sa penderie. Je m'apprêtai à lui demander qu'est ce qui lui passait par la tête, mais elle plaqua sa main sur ma bouche.

Je me dégageais cependant puis chuchotai:

- C'est quoi le problème? C'est sûrement ta mère!

- Justement c'est ça le problème, me répondit-elle en chuchotant également. Bouge pas, annonça-t-elle.

- Pourquoi tu ne veux pas qu'elle te voit? Insistais-je.

Elle poussa un soupir et ne put se résoudre à résister encore:

-Je suis sensée être en cours.

- Sérieusement? Dis-je en brisant le silence de nos chuchotements.

- Chuuut! Dit-elle en faisant les gros yeux.

- Non tu ne te rends pas compte! Si tu veux aller dans ton école d'art, il faut d'abord que tes parents aient confiance en toi et surtout que tu travailles pour!

- C'est bon, ce n'est rien, c'était juste un cours d'aide, je... Elle se stoppa en plein milieu de sa phrase. J'ai oublié d'éteindre mon ordi, dit-elle alors que sa mère pénétrait dans sa chambre.

Nous avions tous les deux les yeux rivés à travers la fine ouverture du placard sur sa mère en train de plier et déposer des vêtements à côté de son PC.

Lorsque sa mère sortit enfin, Camille se retourna vers moi, soulagée.

- Ouf, dit-elle. Ça va? Tu as l'air stressé?

Elle posa une main sur ma poitrine et un léger sourire se dessina sur ses lèvres lorsqu'elle remarqua que mon cœur battait très vite.
Elle me fixait avec le même regard que lorsqu'elle me dessinait, mais cette fois c'était plus étrange car elle n'avait aucun crayon en main.

- Pourquoi tu n'as pas réussi à disparaître tout à l'heure?

Je pris quelques secondes afin de moi même me poser la question et d'en trouver une réponse.

- Plus je passe du temps sur terre, avec toi, moins je garde le contrôle.

Je pensais que cela l'aurait peut être effrayée, mais non, je distinguais les coins de sa bouche se creuser.

Et contre toutes attentes, elle se hissa sur la pointe des pieds et posa ses lèvres sur les miennes. Une décharge électrique remonta de mon ventre jusqu'à ma nuque. J'étais totalement perdu, je ne savais pas comment réagir, mais de toute façon mon corps ne m'écoutait plus, il agissait désormais sans m'en demander la permission.

Ange GardienOù les histoires vivent. Découvrez maintenant