Abigaël avait toujours pensé être normale, dans une certaine mesure. Mais à qui pouvait-elle se comparer ? Elle avait eu pour seul compagnie ses deux Gardiens. Elle vivait en pleine forêt, loin du reste du monde et passait son temps à jouer dans la forêt, parmi les arbres. Les rares moments où elle en sortait étaient une torture pour elle. Tout ce bruit, ces gens, elle ne le supportait pas. Elle avait l'impression que sa tête ne lui appartenait plus, tant la voix des autres emplissait son esprit. A ses yeux ce qu'elle ressentait et vivait, était commune à tous.
Mais à de rares occasions, cette normalité était remise en cause. Elle se souvenait qu'à l'âge de huit ans, elle était passée devant ce que les humains appelaient « école ». Elle avait vu plein d'enfants en sortir accompagnés de Gardiens. Elise, sa gardienne, lui avait dit que cela s'appelait des "parents". Ce mot étranger à ses oreilles fit naitre de nombreuses questions comme : pourquoi elle n'en avait pas. Elise lui avait alors tous simplement répondu qu'elle n'en avait pas besoin. Abigaël n'insista pas mais ne put s'empêcher de ressentir une certaine tristesse de ne pas posséder ce que les autres avaient.
Il y avait une autre chose qui faisait douter Abigaël : c'était sa façon de communiquer. Quand elle avait besoin de quelque chose, elle n'avait qu'à utiliser le fil invisible qui la liait à sa Gardienne et Elise le lui apportait. Cela avait toujours parut normal à Abigaël de faire ainsi, mais il était évident que c'était une chose qu'elle seule pouvait faire car jamais Elise ne lui avait répondu de cette manière. D'ailleurs, elle entendait toujours les mots que se disaient Elise et Tomas, durant leurs longues conversations dans la cuisine. Ces derniers lui avaient expliqué que c'était la manière dont les humains « parlaient ».
C'est sur ce dernier point qu'Abigaël se focalisait le plus souvent. Personne ne l'avait jamais appelée « humain ». Tout simplement car elle n'en était pas une, lui avait-on dit. Abigaël pensa finalement que c'était l'accumulation de toutes ces choses qui la rendait différente.
Par un beau jour de mars, Abi sortit sur la terrasse pour boire son chocolat chaud. L'air était un peu frais, mais cela était agréable. Elle s'assit sur l'un des fauteuils, ce simple mouvement étant fait avec une extrême précaution, car elle ne voulait renverser le précieux breuvage. Elle descendit les manches de son gilet blanc jusqu'à ses doigts, comme si cela allait la protéger d'avantage. Elle ferma les yeux et écouta le silence de la forêt qui s'élevait devant elle et cela l'apaisa. Mais ce calme fut écourté par des pensées étrangères. Quelqu'un venait de briser sa solitude et elle n'aimait pas cela. Elle leva la tête vers la personne en question et la fusilla du regard pour exprimer son profond agacement.
Devant elle se tenait un jeune homme qu'elle n'avait encore jamais vu. Les mains dans les poches, il la fixait de son regard gris perle. Elle ne put s'empêcher de contempler ce visage d'ange, aux lèvres fines et aux cheveux d'or. Quand son regard croisa celui garçon, son cœur se mit à battre de façon incontrôlable et elle sentit ses joues virées au rouge. Elle détourna vivement le regard, mais l'étrange sensation ne la quitta pas. Elle avait l'impression de reconnaitre ce visage, mais pourtant elle était certaine de ne l'avoir jamais vu. Ce qu'il dit ensuite, confirma ses soupçons.
- Cela fait si longtemps que je te cherche, dit-il d'une voix douce.
A l'intérieur de lui c'était l'explosion. Les yeux de la jeune fille, dont il ne connaissait pas encore le nom, lui procurait une joie immense. Cela n'était pas uniquement dut au faite qu'il la cherchait depuis longtemps, mais surtout qu'il connaissait le pouvoir qu'elle avait sur les gens. Le pouvoir de ses yeux violets.
"Qui es-tu ? Et que me veux-tu ?" lui dit elle.
Il ne sursauta même pas quand il l'entendit prononcer ces mots dans sa tête. Au plus profond de lui, il semblait y être habitué.
"- Tu sais qui je suis, ou plutôt tu savais, pensa-t-il, sachant très bien qu'elle l'entendrait.
- Tu pourrais peut être m'éclairer sur ce point, lui répondit-elle de la même façon.
- Il y a bien longtemps, toi et moi, on était amants.
Elle parut surprise, quoi de plus normal après tout. Elle n'avait pas l'habitude d'entendre ce genre de chose. Surtout à son âge, elle n'avait que 17 ans !
- Je ne pense pas que j'aurais oublié ça !"
Il émit un petit rire. Alors les souvenirs du jeune garçon lui arrivèrent de plein fouet, presque littéralement. Elle vit un toit, une ville qui semblait tout droit sortie d'un livre d'histoire. Mais plus important que tout, elle le vit, lui, en train d'embrasser un corps qui était le sien.
- Toi aussi tu es différent, pas vrai ?
Elle avait dit ça à haute voix, chose qu'elle faisait rarement. Pour toute réponse, il hocha la tête. Elle ne se rendit pas compte que le vent s'était levé. Il fut vexé, mais le garçon n'avait pas dit son dernier mot. Soudain Abigaël sentit que sa tasse était plus lourde qu'à l'ordinaire. En y posant les yeux, elle vit quelque chose qu'elle n'avait encore jamais vu. Son chocolat s'était transformé en glace. Elle retourna même la tasse pour confirmer sa vision.
Un franc sourire se dessina sur leurs visages au même moment.
"- Alors ? Lui demanda-t-il.
- Pas mal, lui répondit-elle."
Deuxième chapitre ! Voilà vous en savez un peu plus sur la protagoniste principale. J'espère que cela vous plait ! N'hésiter pas à me le dire votre avis compte beaucoup : )
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Prédestinés
FantasyDepuis la nuit des temps, des hommes et des femmes se succèdent pour protéger, aux périls de leurs vies, les représentants du monde. Mais qui sont-ils ? Personne ne doit le savoir. Ils sont 6, si différents et pourtant lié. Porteur de pouvoirs des...