Coup de Poker

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- La banque ? Il a volé la banque ?

- Ce n'est pas tout à fait ce qui est dit. En réalité, dans l'article de journal - d'ailleurs signé A.C. - on ne fait nulle référence au Poker. C'est Géraud qui en a été averti et il m'a transféré le mail en pensant que cela m'intéresserait. Effectivement la banque est située à deux pas du club. C'est ce qui relance le mystère.

- Je suggère que nous allions voir, Julie.

- C'est ce que j'allais dire. L'As a abattu une autre de ses cartes.

Tandis qu'ils se rendaient sur les lieux du vol, Julie arrêta la voiture près d'un kiosque pour acheter trois journaux assez différents : l'un était axé sur le jeu, l'autre le sport et le dernier la mode. Et, chose incroyable : tous faisaient références ou allusions à l'As.

- Cela ne peut vouloir dire qu'une seule chose : maintenant il est célèbre. Pourquoi recherche-t-il cette célébrité ? Et que fera-t-il de tout cet argent ? Il pourrait tout garder pour lui mais cela ne colle pas avec le personnage... Il a plus de prestance, d'élégance et est certainement très généreux...

- Julie ? Ne te fais pas des idées. Tu te composes un homme bon et fort parce qu'il est probable que l'As soit Paul. Il nous faut être impartiales ! Il est assez probable que ce ne soit qu'un vulgaire voleur.

- Tous parlent de lui. Tous le connaissent. Il est invincible. Il est extrêmement adroit. Il est mystérieux. Peu savent que c'est un tricheur. Que faut-il de plus pour emballer les esprits ?

- Je sais que tu as raison mais tu ne présentes que l'aspect positif de cet homme. Il ne sert à rien de chercher un homme si parfait : il faut qu'il soit mauvais aussi.

- Tais-toi. Nous voici arrivés.

Ils garrèrent la voiture avant d'entrer dans la banque. Tout paraissait en ordre si ce n'est que tout était vide. Il n'y avait personne autre que des policiers.

Parmi ces derniers, certains surveillaient les lieux. D'autres enquêtaient déjà. Julie s'approcha de Géraud qui s'occupait de l'enquête, le remercia pour son mail et lui demanda la permission de fouiller aussi. Ceci fait, elle entra dans les pièces privées.

Aussitôt le silence se fit. On n'entendit plus rien que les pas des deux policiers. Les couloirs sombres et glacés faisaient frémir Julie. Le brouhaha du hall d'entrée s'était tu et ce silence n'en devenait que plus oppressant.

- Où est-ce qu'on va ? Chuchota Yves.

- Je cherche là où était déposé l'argent.

Ils parvinrent à une première porte fermée qui s'ouvrait par code. Ce fut un jeu d'enfant de le récupérer : la jeune femme ne s'étonna donc pas qu'ils aient réussi à passer cette première difficulté. Un peu plus loin, Julie repéra des lasers éteints :

- Ils ont réussi à accéder aux commandes et à entrer tous les codes... Chapeau !

Puis ils se trouvèrent devant une deuxième porte ouverte par explosion cette fois.

- Ils ont les moyens, dis donc !

Et ainsi de suite en augmentant les difficultés qui chaque fois étaient déjouées. D'abord impressionnée, Julie prit ensuite le parti de ne plus s'étonner de rien. Mais en pénétrant dans le coffre-fort, elle eut la surprise de recevoir une pluie de carte de jeu, uniquement des as de pique, de marques différentes et tous signés par l'As.

- Mais ce n'est pas possible ! S'écria-t-elle. Je ne suis pourtant pas la première à entrer dans ce coffre-fort mais pourquoi faut-il que tout cela tombe sur moi !

- Calme-toi, Julie. Calme-toi. Maintenant nous avons la certitude que l'As est aussi responsable de ce vol. Récupère ces cartes, pour analyser l'ADN. L'As fait certainement parti de ton entourage proche. Il semble bien te connaître. Et il est riche et puissant. Maintenant, vient. Il est temps de rentrer au bureau.

***

On retrouva bien de l'ADN sur les cartes. Mais étrangement elle correspondait à un vieux thaïlandais qui vivait à l'autre bout de la planète. Certes riche et ayant vécu en France, mais il ne pouvait en aucun cas être mêlé à l'enquête.

- Cela signifie que l'As a inversé quelques données.

- Quand il est venu déposer la note sur mon ordinateur, ce devait certainement être son premier objectif. Et oui, il connait même mes codes. C'est troublant, s'inquiéta la jeune femme.

Elle s'avachit sur son siège, les yeux perdus dans ses pensées. Elle commençait à regretter d'avoir saisi l'affaire. Mais elle devait poursuivre. Elle rêvait déjà du moment où elle pourrait passer à autre chose : une enquête où elle était le chat et non la souris ; une enquête où elle était sur son terrain... Et puis... Elle se répéta encore une fois ces mots qu'elle aimait quelques fois prononcer :

- Si j'ai choisi d'être policière c'est par désir de me sentir forte et puissante. C'est par envie de montrer que je peux être la meilleure en sentant ma supériorité face aux criminels. Mais aujourd'hui, tout est différent parce que je ne suis pas la plus forte. Non, c'est lui. Et il doit bien me connaître pour réussir à créer de tels sentiments en moi. Oh ! Promis ! Si je le trouve, je le défonce. Car je sais que ce ne peut pas être quelqu'un que j'aime.

Quand soudain, elle entendit sonner son portable. Elle ouvrit précipitemment la page et réprima un haut-le-cœur...

"Julie...
Hier soir et encore ce matin, tu t'es montrée sèche à mon égard. Je sais ce qu'ont dit Yves et Nicolas. Et tout cela m'a bouleversé à tel point que je me suis décidé à agir. En réalité, c'était prévu dans mes projets. Je savais qu'il fallait que je te le dise à un moment ou à un autre. Mais voilà : je suis l'As.

Mais tu le savais déjà, n'est-ce pas ? Et tu refusais de te l'avouer. Ce n'est pas grave : maintenant tu es fixée. Je te dirais peut-être pourquoi je t'ai fait souffrir. Je te dirais peut-être tout. Mais pas maintenant. Déjà, je sens que j'en ai trop dit et j'hésite même à t'envoyer ce mail.

Car, non, je ne regrette pas mes actions et suis fier de les avoir faites. Garderais-je le mystère ou dévoilerais-je tout pour tes beaux yeux ?

Je t'aime toujours,
Paul."

Julie s'effondra dans son fauteuil, le portable allumé et le mail en évidence... "C'était prévu dans mes projets."