Chapitre 18

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Les jours qui suivirent, le reste de la meute arriva. Le dernier de la liste étant Rien-qu'un œil qui arriva deux jours avant la pleine lune. Tala avait pris soin de finir de meubler la maison pour que chacun soit à son aise. Je posais le regard sur La Meute, ma famille... Nous étions si peu nombreux. Alors que plusieurs meutes distinctes parcouraient autrefois le monde, aujourd'hui seuls quelques membres avaient survécus à l'extinction massive des loups, à la destruction des forêts. Ils étaient tous ici, tout les six, chez moi, attendant la suite et le retour des Esprit Loup sur la terre. Eux, les derniers des Hommes-Esprits de la forêt, portes paroles du monde invisible, essence de la magie sur terre.

Tala, debout devant le canapé d'angle où nous étions tous installés, expliquais à tous les raisons de cette réunion extraordinaire. Nous nous étions dispersés après le massacre du Gévaudan où nous nous étions installés. Beaucoup d'entre nous avaient tout perdus...

Elle me fascinait toujours autant, j'avais de nouveau l'impression d'être une enfant fascinée par ses contes et légendes. Je me les rappelais toutes, mais sa voie était captivante et ces histoires belles. Je caressais les cheveux de Louis, qui avait posé sa tête sur mes genoux. A ma gauche, Gabriella avait posé sa tête sur mon épaule et tortillais entre ses doigts une mèche de mes cheveux.

Ça faisait du bien, d'être de nouveaux parmi les siens.

-Le Wapun nashoba, ou l'aube des loups, est une légende qui remonte à loin. Il était dit que lorsque la magie se fanerait, lorsque les destructeurs avides domineraient le monde, oublieux des Esprits de toute chose qui vie. Un nouveau souffle se lèverait guidant les survivants vers un monde de paix où les Esprits parleraient de nouveaux aux hommes. La magie se ferait alors plus puissante à travers eux, et leurs élus auront le pouvoir d'inverser les choses. De faire des destructeurs les instigateurs du renouveau. Ce jour là, la marque sera apposée sur les élus, les guides des Hommes-esprits, enfants de la lune et du soleil, du jour et de la nuit.

J'observais Tala, persuadée que si quelqu'un devait nous mener tous, c'était bien elle.

-Elle ressemblera à quoi la marque ? Comment on peut être sur que c'est bien ça ? À chaque fois que nous nous sommes réunis en un lieu, les hommes nous ont chassés...

Emilie s'était levée et faisait maintenant des aller-retour devant nous. Elle était toujours agitée, toujours pleine de contestation. Elle n'aimait pas son dernier rang au sein de la meute.

-Les esprits nous guideront, je vous guiderais.

-Forcément, toujours les mêmes, je ne suis pas d'accord. N'importe lequel d'entre nous peut être l'élue, pourquoi pas moi ? Je conteste l'ordre établie. A la prochaine lune, nous verrons qui est l'Alpha.

Je poussais un soupir exaspéré. A chaque fois c'est la même chose avec elle, pour tous les rassemblements, elle conteste l'autorité, demandant un repositionnement des rangs, chamboulant la cohésion de la meute.

-Ferme là et assis toi Emi, je ne me répéterais pas. Si tu ne le fais pas, je te ferais taire.

-Parce que tu t'en crois capable ? Je ne suis plus la même, je me suis entrainée... Tu n'es plus mon maitre désormais....

Qu'est-ce qui avait bien pût me passer par la tête pour lier cette insolente à moi....

Gabriella cessa de jouer avec mes cheveux et se redressa, Louis se releva, s'asseyant un peu plus loin en me regardant de son unique œil restant. Tala nous observaient de son regard venu du fond des âges. Elle s'écarta, nous laissant la place d'agir. Si je la maitrisais maintenant, tout resterais tel quel et ça nous permettrais de nous faire enfin une belle chasse à la prochaine lune. Sinon, un défi sanglant marquera nos retrouvailles.

Je restais assise sur le canapé, plongeant mon regard dans le siens. Autour de moi, les autres s'éloignaient de plus en plus, certains quittèrent même le canapé pour s'installer derrière Tala. Edouard se plaça près d'elle pour la défendre si tout dégénérait.

J'appelais la bête en moi, celle-ci était restée apaisée depuis la dernière fois, je lui transmettais mon indignation, la contestation de notre autorité d'alpha, elle se redressa, hérissant les poils et sortant les crocs. Je ne bougeais toujours pas du canapé, Emilie, debout face à moi, commençait à trembler. Je sentais mes yeux changer de couleurs, mon cuir chevelu me picotait alors que mes cheveux commençaient à se redresser sur ma tête. Je découvrais mes dents en sentant mes canines qui commençaient à piquer mes lèvres.

-Vive-Allure.

Un nom, un ordre, ma voie grondante ne laissait aucune place au doute, si elle ne s'exécutait pas, je la chasserais de la meute, la tuant si nécessaire pour ça.

-Pardonne-moi Gueule-de-Nuit. Je ne recommencerais pas.

Elle se fit aussi petite qu'elle le pouvait puis vint s'assoir devant moi, le dos plaqué contre mes jambes relevant la tête pour me regarder, tremblante de peur. Je passais mes bras autour de ses épaules, glissant mes doigts sur la peau fragile du cou. Les excuses étaient acceptées, elle reprenait sa place dans la meute.

La hiérarchie était rétablie, la bête retourna se rouler en boule au fond de moi. Mes yeux reprenaient leur teinte violette habituelle, mes dents raccourcirent, mes cheveux pendaient de nouveau lisses sur mes épaules. Je tendais les mains vers Louis et Gabriella qui reprenaient leur place à mes côtés.

Tala s'avança de nouveau.

-Bien ! Voyez comme la magie nous revient ! Gueule-de-Nuit émergeait alors que nous ne sommes même pas lors d'une nuit de pleine lune ! Quelqu'un d'autre veut tenter de réorganiser la hiérarchie ?

Personne ne se manifesta.

-Abigaël pense que certain de ses camarades de classe pourront nous rejoindre. Louis a fait les démarches nécessaires pour que trois d'entre vous intègrent sa classe. Tobias, Emilie et Gabriella, vous ferez votre rentrée la semaine prochaine.

-Quoi ! Mais je...

Emilie cessa de protester dés qu'elle sentit ma main se resserrer sur son épaule. Elle ne supportait pas les études qui lui rendaient bien. Malgré les années, elle donnait l'impression de ne jamais rien apprendre à part les différents sports de combats où elle excellait.

Tobias et Gabriella se contentèrent d'hocher la tête, obéissants.

-Puisque nous sommes d'accord. Demain soir nous chasserons.

LouveOù les histoires vivent. Découvrez maintenant