Louve

Chapitre 29

Nous réussissions à conserver les apparences. Nathaniel restait ce délégué serviable et toujours présent qu'il avait été et moi la fille un peu bizarre et distante. Leigh et Rosa vivaient seuls ensembles. Personne n'a donc signalé leur absence et après tout, Rosalya n'a été absente qu'une journée. D'un commun accord, nous avons tût les marques qui étaient apparues sur nos paumes. Ces petites cicatrices n'étaient pas très visibles et nous préférions taire ce que nous avions rêvés. Ce voyage spirituel troublant. Les esprits nous montreraient la voie tôt ou tard.

La seule différence notable, c'est que nous ne cachions pas notre amour réciproque. Nous n'avions pas besoin de démonstrations débordantes puisque nous avions chacun lut dans le cœur de l'autre, donc pour les autres, nous étions plutôt discrets. Nous nous contentions seulement de passer autant de temps que possible ensemble. Profitant de chaque secondes comme si elles étaient les dernières.

Tout les matins, à l'aube, j'allais jusqu'à son immeuble pour attendre qu'il descende me rejoindre dans mon jogging matinal. Après tout, une bonne préparation physique mettait toutes les chances de notre côté. Le soir, nous prenions une ou deux heures pour discuter ensemble avant de rentrer chacun de notre côté.

Un mois où il pouvait encore profiter de sa « normalité ». Je gouttais au flirt et au rendez-vous amoureux avec lui. Sortait au cinéma, mangeais une glace, jetais des pierres sur l'eau pour faire des ricochées en sa compagnie... Je vivais l'amour adolescent sous l'œil bienveillant de Gueule de nuit. Malgré les années passées, je me découvrais être une jeune fille comme les autres, malgré mon passif, je me prenais à rire aux éclats.

Evidement, j'étais toujours présente au sein de la meute, mais comme Tala était là et que j'avais tendance à la considérer comme mon alpha, je me déchargeais sur elle des responsabilités liées à la meute.

La vieille de la pleine lune, Nathaniel aurait 18 ans... Il ne sera plus tenu de vivre chez son père et c'est d'un commun accord que nous décidions qu'il viendrait vivre avec nous dans la maison. Avec sa nouvelle famille. Et surtout avec moi.

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Je faisais les cents pas dans le salon, jetant par instant des regards dans le feu de cheminé que j'avais allumé pour son côté hypnotique. Nathaniel était venu avec nous à la sortie des cours, prévenant son père qu'il passait la nuit chez des amis ce qui lui avait valu de nouveaux bleus dans le dos. Je l'avais embrassé avant que les autres ne l'entrainent sur le chemin de la forêt. Le rituel serait exécuté à l'ancienne. Tala entaillerais sa chair au niveau du torse, laissant le sang s'écouler puis le laisserais partir en avant dans la forêt. Quand la lune se lèverait, la meute se mettrait en chasse, suivant pour piste les traces écarlates disséminées sur le chemin qu'il aurait pris.

Tala devrait alors intervenir pour lui comme je l'avais fait pour Iris, Edouard et tout les autres en fait à l'exception de Rien-qu'un œil. Lui n'avait survécu que grâce à son bon sens qui lui avait valu de se jeter dans la rapide tamise qui l'avait conduit loin de mes griffes et rejeter plus loin, à moitié mort... Pas suffisamment donc pour éviter la transformation sans guide...

Je m'asseyais devant le feu, entonnant une chanson ancienne en me balançant d'avant en arrière pour me calmer les nerfs, surtout que peu de temps auparavant, j'avais entendue les hurlements de la meute. Gueule-de-Nuit non plus n'était pas sereine. Je commençais une méditation pour nous calmer toue les deux. Bientôt, le silence se fit en nous. Rien que le silence.

Le silence interrompu par un grattement insistant à la porte. Je me levais et découvrais Rien-qu'un Œil, blessé. Je ne mis pas longtemps à comprendre que quelque chose n'allait pas et Gueule-de-Nuit hurla en moi. Je posais ma main sur la plaie de son flanc, la ramenais à ma bouche pour gouter le sang. Dans le silence de la nuit, dans la forêt, la chasse avait commencée, mais trop brutale. Les nouveaux n'étaient pas contrôlés, Esprit-de-la-meute aiguisait leur soif de sang à la place de la contrôler. Je ne comprenais pas pourquoi elle agissait ainsi.

-L'humaine veut tuer notre Alpha! Hurla Gueule-de-Nuit en moi.

-Reste ici, tu es trop mal en point.

Ordonnais-je à Louis avant de me transformer pour rejoindre au plus vite les autres dans la forêt. Dans ma poitrine, mon cœur battait à tout rompre. Pourquoi ? Pourquoi Tala voudrait-elle du mal à Nathaniel ?

Alors que je posais à peine les pattes dans la forêt, je me transformais dans cette nouvelle forme plus puissante qui me faisait courir plus vite sauter plus haut, qui exacerbait mes sens.

Les esprits accompagnaient ma course, la forêt m'ouvrait le chemin, les buissons s'écartaient, les racines s'aplatissaient, une mousse dense soutenait mes membres lorsque je posais les pieds au sol, semblant leur donner plus d'essor.

-Cours Déesse Lune, ou jamais nous ne reverrons le soleil...Cours enfant des Esprits pour votre vie et pour la notre ! Nous te montrerons le chemin !

Une route d'or et d'argent s'ouvrait devant moi, semblable à une ligne de vapeur colorée. Je n'hésitais pas et m'élançait plus vite encore.

Bientôt, j'entendais, les grognements de mes frères, je sentais la folie qui les animait. Ils voulaient tuer l'humain, le destructeur, ignorant les esprits qui les entouraient et qui les incitaient au calme.

J'arrivais enfin à hauteur de la meute qui courait après sa proie. Malgré ses nombreuses blessures, il arrivait encore à s'avancer, une racine brisée lui servait de gourdin qu'il maniait afin de repousser les trop nombreux assaillants. Cœur-de-la-Meute tournais en rond au dessus de lui, impuissant encore à l'aider. Je dépassais les derniers de la meute. Je devais stopper Tala pour que les autres se calment. D'un bond puissant, je lui sautais dessus, la mettant à terre sous le poids de ce corps vigoureux.

-ABIGAEL !

Je sursautais alors qu'elle arrivait à me repousser, prononçant mon nom avec une telle rage ! Les syllabes déformées par sa gueule inappropriée. Bientôt, je la regardais se dresser sur ses pattes arrières, devenir mon reflet en plus noir, plus fort. A ses côtés Croc-fatal hérissait le poil, près à se mêler à la bataille.

Je ne ferrais pas le poids !

-Laisse moi prendre le contrôle enfant, tu n'a pas la velléité de la tuer, moi si ! Laisse moi redevenir une Déesse à travers toi !

Je tournais la tête une dernière fois vers Nathaniel qui fuyait toujours, s'éloignant de moi.

-Je finis toujours par tuer ceux que j'aime...

Murmurais-je avant de m'effacer complètement.