Chapitre 35

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Pdv Charly

Les murs blancs qui m'entourent me filent des angoisses, et l'odeur de désinfectant me donne envie de vomir ce que je n'ai pas dans l'estomac. Dimitri est assis pas très loin de moi, il dort.

Et puis il y a ce bip incessant, c'est surtout lui que je ne peux plus sentir ! Ce bip, au même rythme que le cœur, il est là pour me narguer ! Bip Bip, Bip Bip, Bip, Bip.

- Si tu meurs, je meurs.

Deux semaines que je répète cette phrase en boucle, deux semaines que ce mantra me suit partout, deux semaines qu'il est dans le coma !

Après notre fuite de Suisse, Dimitri a appelé plusieurs contacts à lui dans l'armée, et nous avons été pris en charge.

Nous sommes à Berlin, à l'hôpital, pendant cette soirée de malheur, trois coups de feu ont atteint Alexïe en pleine poitrine. Les médecins qui ont prit en charge Alexïe, nous ont dit que c'était un miracle qu'il ne soit pas mort. Deux des balles n'ont rien touchées mais la troisième a frôlée son cœur, lui causant une importante hémorragie. Il a perdu beaucoup de sang, et il a croisé la mort sur la table d'opération pour finir là devant nous, dans le coma. Il est relié à beaucoup de machines, dont celle qui fait ce foutu Bip. Je me lève et je sors dans le couloir, c'est insoutenable de le regarder comme ça, j'ai l'impression de veiller un mort. Je me laisse glisser contre le mur, en mettant mes genoux contre ma poitrine, c'est de ma faute s'il est dans cet état. S'il n'était pas venu me chercher, il ne serait pas allongé là.

Dimitri me rejoint dans le couloir, il me tend une barre de céréales.

- Je n'ai pas faim Dim.

- Il faut que tu manges, tu n'a pas pris de vrai repas depuis presque une semaine. Si Alexïe était là, tu sais très bien qu'il te ferai manger de force.

Je me relève avec difficulté et je le fusille du regard.

- Justement il n'est pas là, alors arrêtes !

Je lui tourne le dos et je pars dans le couloir. Je n'ai aucunes nouvelles de mes parents, ni de mes amis ni de personne en fait. J'ai passé mes deux dernières semaines ici avec Alexïe et Dimitri.

Mon univers tourne aujourd'hui autour de ces Bip Bip qui me prouvent qu'il est en vie.

Je me dirige vers les escaliers, j'ai besoin de marcher, il faut que je me vide la tête.

Il n'y a jamais personne dans les escaliers, en même temps nous sommes au dixième étage et les gens préfèrent les ascenseurs.

J'avance machinalement et je percute quelqu'un que je n'avais même pas remarqué.

- Pardon excusez-moi j'étais ailleurs. Dis-je en continuant mon chemin.

- Ce n'est rien Mademoiselle Aberline. Dis l'homme.

Je relève la tête et je croise les yeux noisette d'un jeune homme de mon âge, il me sourit.

- Mais...

- Vous ne m'avez pas donné votre nom en effet. Dit-il.

Je déglutis, je suis prête à prendre la fuite, si c'est un homme d'Andreiv, je ne sais pas ce que je ferai.

- Ne vous inquiétez pas, je ne vais rien vous faire, je ne suis que le messager. Tenez.

Il me tend un portable toujours en souriant. Puis il s'en va en rentrant à l'étage supérieur.

- Bonne journée Mademoiselle Aberline.

Je reste interdite devant le téléphone dans ma main et je sursaute lorsqu'il se met à sonner. Aucun nom ne s'affiche, j'hésite un instant avant de décrocher.

- Alo ?

- Bonjour Charly.

- Anton?

- Oui. Je dois te parler rapidement, c'est très important.

- Je ne crois pas que...

- S'il te plait Charly, je ne ferai rien, mais nous devons parler.

- Euh d'accord.

- Merci, je t'envois l'adresse d'un café par message, rejoins moi là bas dans trente minutes. Ce n'est pas loin de l'hôpital.

- Comment...

Mais il a déjà raccroché, le portable bip à l'arrivée d'un message, je regarde l'adresse et je me mets en route.

***

Ca fait à présent une heure que j'ai quitté Anton, et ma décision est prise, je dois partir, je dois laisser Alexïe.

Dimitri me regarde, il se doute de quelque chose, je le sais. Ce mec est pire qu'un chien anti drogue.

- Tu étais où cet après midi ?

- Je me suis baladée.

- Pas à moi Charly !

- Ecoute Dim, tu n'a pas besoin de savoir où j'étais !

- Si justement, c'est moi qui assure ta sécurité et tu te casses ! J'ai le droit de savoir !

- Dim, t'es ni mon père, ni mon mec alors tu descends de tes grands chevaux et tu baisses d'un ton ! Je n'ai aucun compte à te rendre.

Il soupire et se tourne vers la fenêtre de la chambre d'Alexïe.

De nouveau, le silence s'installe, rythmé par le Bip de cette foutue machine.

Je dois lui dire.

- Dim je pars.

- Tu veux la clé de la chambre d'hôtel ?

- Non, je pars définitivement.

- Quoi ?

Il se rapproche de moi et sa main se referme sur mon poignet.

- Lâche moi Dimitri, j'ai fait mon choix.

- Tu vas où ?

- Je ne peux pas te le dire, désolée. Je veux reprendre ma vie à zéro et aujourd'hui, c'est le moment pour moi d'allez de l'avant.

- Et Alexïe ?

- Tu as entendu le médecin. Il va se réveiller bientôt, et sa vie sera mieux loin de moi.

- T'es pas sérieuse là ?

Il me lâche enfin le poignet et me fusille du regard, il me déteste.

- Tu ne mérites définitivement pas l'amour qu'il te porte ! Tu n'es qu'une petite fille ingrate et trop gâtée !

Ca fait mal, terriblement mal, mais j'encaisse, je ne dois rien montrer, je dois être forte, ce sera bientôt fini. Je sors l'enveloppe que j'ai préparée plus tôt pour Alexïe lorsqu'il se réveillera.

Je la tends à Dimitri.

- Juge moi autant que tu voudras je m'en fiche, mais s'il te plait, donne lui ça quand il se réveillera.

Il prend l'enveloppe à regret, je me retourne et je sors de la chambre. Je vais vers les ascenseurs, je monte dans le premier et lorsque les portes se referment, j'éclate en sanglot.

- Pardonne moi mon cœur.

LIBÈRE MOIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant