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« à force de traîner avec les mauvaises personnes, nous en devenons une »

« à force de traîner avec les mauvaises personnes, nous en devenons une »

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^ [Ulrich] ^




La nuit n'est pas encore tombée mais le soleil se couche lentement, laissant apparaître dans le ciel des couleurs orangées. Il rentre chez lui sans même se douter de ce qu'il l'attend. Ses parents sont assis dans la cuisine, attendant leur fils de seize ans, bientôt dix-sept.
Il retire ses chaussures, le visage froid, comme toujours. Il fronce les sourcils en se demandant pourquoi ce silence. Il longe le court couloir et aperçoit ses parents, assis à la table. De l'autre côté de la cuisine, sa sœur est assis dans le fauteuil du salon, sur son téléphone.
Ulrich regarde ses parents qui n'ont pas l'air très expressifs.
- Qui est mort ? dit-il sarcastiquement en se plantant devant eux.
- Toi, bientôt, ricane Maya, sa sœur.
Il lui lance un regard noir avant que ses parents ne fassent glisser un papier en sa direction. Il baisse les yeux et regarde ce qu'est le papier et puis comprend pourquoi ses parents ont cette expression sur leur visage. Celle de son père est la pire mais Ulrich s'en fiche, il se fiche de leur réaction.
- Oui, et alors ? finit-il par dire.
- Excuse-moi ? dit son père en plissant les yeux. Que viens-tu de dire, Ulrich ?
     Ulrich ne répond pas et regarde droit dans les yeux son père. Parfois il se demande si son père l'aime vraiment ou si, au contraire, il le déteste. Ulrich en veut à son père de ne se préoccuper que des moments où rien ne va, comme ces derniers temps. Depuis le suicide de Julien, le garçon qu'il avait harcelé pendant des semaines et des semaines, plus rien n'allait. Il se sentait d'une profonde culpabilité mais il ne le montrait pas pour ne pas paraître devant ses amis.
- Tu te fiches de moi Ulrich Winter ? Est-ce que tu as bien regardé tes notes ? hausse-t-il le ton.
- Qu'est-ce que ça peut te faire ? De toute manière, tu te préoccupes de moi quand ça t'arrange.
- Tu parles autrement à ton père.
- Ah parce que tu le défends en plus ? ricane Ulrich en regardant sa mère.
Cette dernière se lève à son tour en le fusillant du regard. Il n'a pas peur d'elle, il n'a jamais eu peur d'elle.
- As-tu vu ce que tu es devenu ? continue son père. As-tu vu ton comportement depuis ta seconde année au lycée ?
Il serre la mâchoire et pâli. Bien sûr qu'il voit son comportement, il sait tout cela et il se déteste pour tout. Pour avoir changé, pour avoir été influencé. Mais maintenant, il ne peut plus retourner en arrière, c'est trop tard. Le poids de la culpabilité est bien trop forte. Il regrette tout de A à Z en commençant par avoir rencontré ces personnes qui l'ont mises dans cette situation. Il regrette d'être tombé dans la drogue, chose que ses parents ne savent pas, il regrette de fumer, chose que ses parents savent, peut-être. Il regrette ces soirées à moitié bourré ou en train de coucher de tous les côtés avec des filles paumées ou éméchées. Il regrette tout et ce tout le tourmente dans son esprit. Ulrich regrette de ne plus apprendre correctement, de ne plus être aussi intelligent qu'avant. Il déteste sa vie de maintenant, basée sur des mensonges.
Il se contente de hausser les épaules, comme si de rien était en laissant rien paraître.
- Quelqu'un s'est suicidé par ta faute ! Tu es au courant ? crie son père.
Maya tourne la tête vers eux, le téléphone entre les mains, les yeux rivés sur son frère qui pourrait être sur le point de pleurer. Leur mère grince des dents, repensant à cette après-midi à supplier le proviseur de garder son fils dans l'établissement, accompagnée d'une petite somme d'argent...
- Je ne sais pas ce qui se passe, mais tu vas rapidement changer d'attitude. Tu as de la chance d'être encore dans ce lycée.
- Désolé de ne pas être le fils que tu espérais.
Il déchire sous ses yeux le résumé d'une partie de son année scolaire, sans avoir la moindre peur de la réaction de ses parents. Son père semble être sur le point de bondir sur Ulrich mais se retient de toutes ses forces.
- Que t'est-il arrivé ? demande sa mère plus calmement.
- Tu sais ce qui est arrivé, Ekatherina. Ton fils a mené quelqu'un au suicide. Ton fils a un comportement et une attitude déplorable envers ses parents et ses professeurs.
- Ton fils t'emmerde, dit-il en souriant ironiquement.
Ulrich attrape le poignet de son père avant que sa main n'atteigne sa joue. Il a un mouvement de tête, sûr de lui tandis que son père le regarde comme la plus grande déception de l'univers.
- Et en plus de fumer, tu me manques de respect ! Tu vas le regretter, mon fils. Comment oses-tu me parler de cette façon ? hurle-t-il.
- Qui a dit que je fumais ? ricane-t-il.
- Tes vêtements empestent la cigarette quand tu rentres de soirée. Tu es puni, Ulrich.
- Joue au papa méchant, fais-toi plaisir. Après tout, tu fais acte de présence dans ma vie seulement pour me disputer, pas vrai ? Alors, punis-moi. Qu'est-ce que tu attends ? Quelle sera ma sanction ? ricane Ulrich.
Ses parents ne comprennent plus son fils, ils ne savent plus qui il est et ne savent pas ce qu'il est devenu. Ils ne savent rien de ce qu'il est en dehors du lycée. Sa sœur sait, et entend des rumeurs mais elle ne dit rien à ses parents. Maya sait que son frère lui ferait payer cher. Elle sait qu'il se drogue, elle sait à quel point il harcelait Julien et beaucoup d'autres. Elle sait à quel point tout le monde a peur de lui, si bien que quelques filles de son école la méprise. Mais elle ne dit rien.
- Je vais être puni de sortie ? Pitié, vous savez très bien que je sortirai, quelque soit la manière dont je le ferais.
- Monte dans ta chambre ! hurle son père. Je ne veux plus te voir de la soirée, pas même une minute ! Et quand tu te remettras en question, quand tu auras fini de réfléchir, j'aimerais des excuses pour ta mère et moi.
- Ouais, c'est ça.
- Tu nous parles autrement, nous sommes tes parents ! aboie-t-il.
     Il lève les yeux au ciel avant de faire volte-face.
- Ulrich Winter !
- Arrête de me soûler, lâche-t-il froidement avant de gravir une marche d'escalier.
- On va t'envoyer en pension !
     Il se retourne, toujours sur la même marche d'escalier, puis le regarde avant d'éclater de rire. Un rire ironique qui fait bouillir son père de colère. Ulrich secoue la tête de droite à gauche avant d'arrêter de rire subitement. Sa mère ne sait pas quoi faire, quoi dire. Il descend la marche d'escalier et se plante face à son père, le regardant avec le plus noir des regards.
- Tu ferais ça ? Tu veux vraiment le faire ?
Il prend un ton menaçant, un ton plus menaçant qu'il ne le pensait.
- N'essaie pas une seule seconde de le faire. Ne t'avise jamais de le faire ou même d'y penser sinon je te fais vivre un véritable enfer.
Son père ne répond pas et ils entendent Maya ricaner.
- On vit déjà un enfer à cause de toi.
Personne ne répond, Ulrich se contente de regarder son père en le fusillant du regard, aussi noir qu'il puisse le faire.
- Tu le regretterais.
- Tu menaces ton père maintenant ?
Il ne répond pas et se contente de partir en ricanant. C'est ce qu'il fait tout le temps par habitude. Son père lui hurle de revenir mais il ne le fait pas, il ne fait jamais revenir en arrière. Il claque aussi fort que possible la porte de sa chambre puis ferme à clé. Il la contemple longtemps avant de se tourner vers son lit et de jeter son sac au pied du lit.
Ulrich ouvre la fenêtre et s'assoit au rebord de l'encadrement de la fenêtre, prenant appuie sur les tuiles avec ses pieds. Il n'entend pas ses parents crier, ils doivent sûrement parler, c'est ce qu'ils font.
- Ulrich ?
Maya toque à la porte, espérant qu'il lui ouvre et c'est ce qu'il fait. Il lui lance un regard mauvais et Maya, bien plus petite que lui, croise les bras.
- Je sais tout, dit-elle.
- Pardon ?
- Je sais tout à propos de toi, répète-t-elle lentement. Je sais qui tu as commencé à fréquenter. Je sais dans quel état tu termines lors de tes soirées, je sais que tu trafiques de la drogue. Je sais à quel point tu peux être un pauvre connard avec les filles. Tu me dégoûtes.
- C'est bon, t'as fini ?
- Et ça ne te fait rien ? plisse-t-elle les yeux. Tu n'as aucun remord pour le garçon qui s'est suicidé ? Pour toutes ces filles que tu as traité comme de la merde ?
- Tu crois que me parler de cette manière va faire changer mon état d'esprit ? ricane-t-il. Tu te trompes. Et puisque tout le monde me soule avec le suicide de Julien, je vais vous informez d'une chose : j'ai honte d'avoir fait ça, je me hais, tu m'entends ? Je hais ce que je suis devenu. Ne croyez pas que je n'ai pas de remords, parce que j'en ai. Je suis humain, comme vous.
- Alors pourquoi est-ce que tu continues de harceler les gens ? tape-t-elle du pied.
- Je ne peux pas l'expliquer.
    Elle secoue la tête de droite à gauche.
- Menteur.
     Il pousse un profond soupire et laisse passer quelques secondes de silence avant de lui répondre. Et ce qu'il s'apprête à lui dire va la dégoûter, il le sait bien. Sa sœur a déjà les larmes aux yeux.
- Parce que je ne peux pas m'empêcher, faire du mal aux autres, c'est... je ne sais pas. Cela m'amuse.
- Ça t'amuse ? s'étrangle-t-elle avec sa salive. Tu déconnes ? T'es un monstre, Ulrich.
     Il serre les dents, essayant de paraître impassible un maximum possible. Puis, il voit rouler une larme le long de ma joue de sa sœur. Il se sent soudainement coupable de la faire pleurer et il ne sait pas pourquoi elle pleure. Mais il reste dans le flou quelques secondes.
- Tu savais que tes actes ont des répercutions sur moi ? Tu savais qu'il y a des conséquences à tes agissements ? Tu ne sais pas comment on me regarde quand je suis à l'école. Les gens me regardent de travers, certains de mes amis ne veulent plus m'adresser la parole à cause de toi.
     Ulrich entrouvre la bouche, sans un mot.
- Tu es un monstre. Tu provoques du mal autour de toi et tu t'en fous. Tu me fais mal. Tu fais mal à cette famille. À cause de toi, je n'ai presque plus d'amis. À cause de toi, je subis des insultes, on me regarde de travers et on me critique. À cause de toi, les gens me détestent.
- Je... je...
- Tu quoi ? Tu es désolé ? Non, tu ne l'es pas. Parce que tu ne le seras jamais. Tu nous fais vivre un véritable enfer mais tu t'en fous. T'es qu'un pauvre égoïste. Je te déteste.
     Elle essuie ses larmes avant de s'en aller et il reste pantelant quelques secondes avant de fermer sa porte à clé. Il ne pensait pas que ce qu'il faisait aurait pu un jour parvenir aux oreilles de personnes plus jeunes que lui. Il ne pensait pas être devenus aussi populaire, il ne l'avait jamais voulu. Très peu sont au courant qu'il est la cause du suicide de Julien mais ceux qui savent sont dégoûtés de lui, même sa famille. Ce sont ses amis qui ont toujours souhaité être populaires, jamais lui. Tout ce qu'il avait demandé, c'était de réussir ses études. Mais non, il a voulu assouvir son désir d'entrer dans la cours des grands.
     Et en voici les conséquences, il fait souffrir tout le monde autour de lui.
     Assis sur le rebord de la fenêtre, il regarde le ciel s'assombrir de plus en plus. Il sort son téléphone, une cigarette coincée entre les lèvres et envoie un message à une fille, prénommée Rachel.

De : Ulrich
À : Rachel
« tu fais quoi ce soir ? »

De : Rachel
À : Ulrich
« rien de spécial. Pourquoi ? Tu veux qu'on se voit ? »

De : Ulrich
À : Rachel
« ouais, comme la dernière fois ? »

     Cette fois, le message arrive pas immédiatement. Le message bleu et lu, il attend une réponse. La conversation indique que la fille est en train d'écrire. Puis, il reçoit le message.

De : Rachel
À : Ulrich
« genre, quand tu dis la dernière fois, tu veux dire dans un lit ? Désolée, mais je ne suis pas comme ça. J'ai besoin de quelqu'un à mes côtés, pas d'un sex friend. Je veux qu'on fasse connaissance et pas qu'on se contente de passer par la case du lit. »

     Il fronce les sourcils, grognant. Il a besoin de se changer les idées et il n'y a aucune autre fille qu'il peut contacter puisque les autres ont déjà tous un coup ce soir ou refusent de coucher avec lui une seconde fois, bien que ce soit un bon coup. C'est juste que les autres n'ont pas envie de se faire insulter une seconde fois par Ugo. Rachel est la seule fille qu'il connaît encore capable d'accepter mais il faut croire qu'il s'est trompé.
     Il écrase le mégot dans le cendrier avant de répondre.

De : Ulrich
À : Rachel
« ne me dis pas que tu viens de t'attacher à moi. »

     C'est ce qu'il redoute puisque Rachel a l'air de l'apprécier beaucoup et de le montrer plus qu'il ne le fait. Il attend sa réponse pendant de longues minutes.

De : Rachel
À : Ulrich
« je crois bien que si, je suis désolée mais tu es... je sais pas ! »

Il reste paralysé en voyant ses mots. Pas possible que quelqu'un puisse s'attacher à lui sans que lui s'attache à cette personne. Ce serait mal, ce serait monstrueux de demander de coucher avec Rachel en sachant qu'elle pourrait ressentir quelque chose comme de l'amour envers lui. Il secoue la tête en pinçant les lèvres. Ulrich doit se débarrasser d'elle, il en doit plus lui parler, il fait une croix sur ses sentiments.
- Je ne mérite pas d'être aimé, murmure-t-il.
Non, en effet, il ne le mérite pas. Mais tout le monde a droit à la rédemption, tout le monde doit être pardonné sauf en ce qui concernent certains cas. Le pardon, c'est le moyen d'avancer. Le pardon, c'est le moyen de passer à autre chose, d'avancer mais de ne jamais oublier.

De : Ulrich
À : Rachel
« Désolé mais je ne peux pas, je peux pas continuer à te parler en sachant que je ne ressentirai rien par la suite. Pas pour toi en tout cas. »

De : Rachel
À : Ulrich
« alors il est comme ça le grand Ulrich Winter ? Un briseur de cœur ? Je meurs. Tu rejettes toutes les filles que tu croises après les avoir... comment tu dis déjà ? Baisés ? Vas-tu aimer quelqu'un un jour ou comptes-tu préserver ton cœur ? Tu me dégoûtes mais bon, je peux rien y faire. Je ne sais pas pourquoi je m'attendais à quelque chose de plus. Laisse tomber, je t'oublierai, sois heureux »

     Il supprime la conversation sans même répondre avant de prendre une cigarette une seconde fois, de l'allumer et tirer un coup. Sa voisine le regarde en plissant les yeux. Il pourrait lui faire un doigt d'honneur mais ses parents le disputeraient et il veut rester tranquille pour le moment. Et il ne s'attend pas à ce que demain, sa vie va changer définitivement.

SMS MortelsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant