Bonus 11

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« la faute à qui ? Tout le monde finit par mourir, qu'est-ce que tu crois ? »

Quand son père est mort,
lendemain.

     Il rentre chez lui au levé du soleil, sous le ciel orangé et légèrement rosé

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Il rentre chez lui au levé du soleil, sous le ciel orangé et légèrement rosé. Contrairement à ce que l'on pourrait croire, Ulrich n'a même pas fumé, ne s'est même pas drogué. Il n'a rien fait de tout cela. Il a juste pleuré et il s'est simplement contenté de pleurer toutes les larmes de son corps devant tout le monde jusqu'à ce que Valerian et Louis l'emmènent au fond du jardin, loin de tous les regards. Il s'est effondré, dans tous les sens du terme, devant tout le monde et sans se préoccuper d'eux.
     Ulrich ne pensait pas que cela pourrait faire aussi mal de perdre quelqu'un, il ne pensait pas qu'il allait le pleurer, prier pour se réveiller de ce cauchemar. C'est son père et même si au fond il l'a détesté pour ne pas avoir été présent dans sa vie, il l'a aimé. Il l'aime et l'aimera toujours, c'est son père. Il a perdu sa grand-mère et maintenant son père, qui sera la prochaine personne ?
     Il a vomi plusieurs fois avant de rentrer de cette soirée. Il a tellement mal au cœur qu'il pourrait en crever.
     Ulrich remarque deux voitures garées devant chez lui, sans compter celle de sa mère. Il les reconnaît, assez pour dire que sa famille est ici.
     Quand il rentre à la maison, Ulrich trouve sa mère, ses deux tantes et trois oncles attablés, les yeux rouges. Il contracte la mâchoire, retenant toutes les larmes de son corps pour ne pas pleurer. Mais tout le monde saura qu'il à pleurer, ses yeux sont fatigués, rouges. Tout le monde lève la tête quand Ulrich marche vers eux. La plus petite de ces deux sœurs dort sur le canapé et quant à Maya, aucune trace d'elle.
     Le plus vieux de ses oncles se lèvent et pose une main sur son épaule avant de le prendre dans ses bras mais Ulrich n'a aucune réaction. Il reste planté devant eux sans bouger, sans savoir quoi faire. Il croise le regard de sa mère et tout s'effondre une nouvelle fois, tout lui revient en plein visage. La manière dont il s'est enfui est impardonnable, il aurait dû rester avec sa mère et ses sœurs au lieu de prendre la fuite pour une soirée stupide. Son oncle se dégage de lui et sa mère se lève à son tour, les larmes coulant toujours le long de ses joues, les yeux humides.
     Ulrich serre au plus fort sa mère contre lui, fermant les yeux, nichant son visage dans son cou, et redevient soudainement un enfant. Il a besoin de quelque chose pour le soutenir et le fait de la voir dans cet état lui fait mal au cœur. Il s'en veut de s'être disputé avec son père, il s'en veut de lui avoir dit qu'il le détestait. Son père est mort en pensant qu'il le détestait alors que toutes les paroles d'Ulrich étaient fausses.
Il ne sait pas quoi dire pour soulager sa mère, à croire que le silence dit tout. Alors tous les deux se laissent aller dans les bras l'un de l'autre sans un mot, tandis que les oncles et tantes d'Ulrich se parlent avec tristesse, à voix basse pour ne pas réveiller Anna.
Les jours ont passé, tout comme les larmes ont roulé le long des joues d'Ulrich et de sa famille. Maya ne sort plus de sa chambre, sa mère lui apporte à manger, chose qu'elle touche à peine. Ulrich a maigri également, trop. Seule Anna paraît d'être restée la même. Son frère la regarde avec tristesse, elle vient de perdre son père et elle était trop petite pour pouvoir subir cela. Pourtant, elle encaisse le coup, bien qu'elle soit jeune, Anna est très intelligente et a compris la situation. Elle a compris qu'elle ne verrait plus jamais son père, qu'il ne l'aidera plus pour ses devoirs, qu'il ne sera jamais là pour la regarder grandir, pour faire connaissance avec son premier petit-ami. Il ne sera plus jamais présent dans leur vie, seulement dans leur cœur.
Les jours sont durs, les nuits difficiles. Alors il se noie dans l'alcool lors des soirées, se laisse tenter par le plaisir de la chair et se laisse bercer par le sentiment de calme que lui procure la drogue. Peu à peu, il se laisse sombrer. Ambre est aussi présent dans sa tête que son père et il se fait violence pour ne pas lui envoyer de message, de lui demander pardon et de tout recommencer à zéro. Mais ce qu'elle a fait, il n'arrive pas à le digérer. Ulrich ne se doute pas que Maya a déjà prévenu Ambre que leur père est mort. Bientôt, peut-être, il l'apprendra.
Quand il rentre vers sept heures, les oncles et tantes sont présents tout comme l'autre jour et cette fois, Maya est présente également. Il ne lui a pas parlé depuis bien longtemps parce qu'elle était soit enfermée dans sa chambre, soir trop triste pour pouvoir prononcer un mot. Même à l'enterrement elle ne lui a pas adressé la parole, elle ne l'a fait à personne. Elle s'est simplement contentée de pleurer toutes les larmes de son corps en silence.
Il aimerait la prendre dans ses bras pour la réconforter, essayer d'agir bien pour une fois, être dans la peau du grand frère protecteur. Ulrich s'approche d'elle doucement, ayant la même douleur au fond de son cœur. Maya a encore les larmes aux yeux, combien de temps avant qu'elle ne s'en remette ?
La brune lève ses yeux humides vers son frère et le regarde avec haine. Ulrich tente de faire un pas vers lui mais elle le repousse en le poussant violemment. Il ne tombe pas mais fait quelques pas en arrière. Les adultes coupent leur conversation pour les regarder. Maya pleure, les traces de ses larmes coulant le long de ses joues, injectant le plus de haine possible au passage.
- Ne t'approche pas de moi, tu me dégoûtes.
- Maya...
- Ne m'adresse pas la parole, crache-t-elle, dégoûtée. Tu as tué papa.
Un long silence s'en suit, leur mère devenant pâle. Ulrich fronce les sourcils en serrant la mâchoire.
- Maya, non, dit sa mère.
- Quoi ? fait-il simplement.
- T'as tué papa ! hurle-t-elle soudainement. S'il est mort, c'est à cause de toi ! Je te déteste, tu nous as pris notre père ! Il est mort par ta faute !
- Maya, ça suffit, dit Ekatherina.
Mais la sœur d'Ulrich n'est pas de cet avis, bien au contraire.
- Tu t'es disputé avec lui ce jour-là, et tel le pauvre connard que tu es, tu lui as dit des trucs horribles ! Et il en est mort ! hurle-t-elle. Il ne devait pas travailler cet après-midi, il ne devait pas être sur cette route, t'es au courant ? Et merde, il l'était à cause de toi ! Il ne voulait pas rester à la maison parce qu'il savait que tu serais présent et après ce que tu lui as dit, il ne voulait pas te regarder en face !
Ulrich chancelle, faisant quelques pas en arrière, ne voulant pas comprendre ce qu'elle est en train de dire.
- T'es coupable de la mort de notre père. Tu as tué papa, il est mort à cause de toi ! Tu nous l'as enlevé !
Il prend un immense coup au cœur et lève les yeux vers sa mère, faisant abstraction de tous les autres dans cette pièce. Ses mains tremblent, ses veines saillantes le long de ses bras, le visage tellement pale. Une immense culpabilité commence à le dévorer de la tête aux pieds. Il ne devait pas travailler ? Il se sent coupable au point de ne plus vouloir vivre dans ce monde, au point de se détester. Il se détestait déjà auparavant mais cette fois, c'est encore pire.
- C'est faux maman, pas vrai ? Dis-moi que c'est faux.
Elle reste silencieuse et Ulrich s'effondre intérieurement un millier de morceaux devant tout le monde. L'adolescent se sent déjà coupable de lui avoir dit tous ces mots mais se sentir coupable de la mort de son père est encore pire.
- Maman, c'est faux. Pas vrai ? Dis-le.
     Sa mère se contente de le regarder en pinçant les lèvres tandis que Maya serre les poings, se retenant de lui donner des coups. Les larmes coulent le long de ses joues, se logeant aux coins de son nez et aux commissures de ses lèvres.
- T'as tué papa. Tu es un monstre, Ulrich. Papa est mort par ta faute, je te déteste. Personne ne t'aime, personne ne veut de toi, personne n'a besoin de toi. Nous sommes obligés de payer le prix de tes actes. Tu me dégoutes. Tu es responsable de la mort de notre père et tu devras vivre avec ça pour le restant de tes jours. J'espérais que tu es satisfait, tu as détruit la famille.
     Maya gifle son frère, comme dans les films. Sa main la brûle mais ce n'est pas pire que la douleur provenant du fond de son cœur. Une marque rouge apparaît progressivement sur sa joue puis sa mère prend enfin la parole, brisant le silence. Elle s'avance vers son fils, tenant de le prendre dans ses bras mais il recule, fixant le sol, n'osant regarder sa mère droit dans les yeux.
- Je ne voulais pas que tu saches, tu vas déjà si mal. On ne voulait pas que tu souffres plus que tu ne souffres déjà, pardonne-nous.
- Eux ne voulaient pas, moi si. Tu mérites de souffrir autant que tu nous fais souffrir, crache sa sœur avec dégoût.
- Maya ! Ulrich, s'il te plaît, ne pars pas ! ajoute la mère en direction de son fils.
     Ulrich fuit hors de cette maison sous les cris de sa mère qui lui demandent de rester. Elle le supplie de toutes ses forces. Il dévale les escaliers du perron et monte le plus rapidement possible dans sa voiture pour aller loin, très loin d'ici.
     Il secoue la tête de droite à gauche, augmente le volume de la radio, quitte à se déchirer les tympans mais rien ne lui fait oublier les paroles de sa sœur, le regard qu'elle avait. Ugo se sent mal à en crever, il se sent faible et monstrueux. C'est à peine à se demander comment il parvient à conduire sous rire cette douleur.
     Oui, il se sent monstrueux parce qu'il a enlevé le père d'Anna, de Maya. Il a tué son propre père.
     Ulrich se gare sur le parking d'un supermarché pour éviter un accident ou même de provoquer la mort de quelqu'un. Il secoue la tête de droite à gauche, sans parvenir à croire aux paroles de sa sœur. Cette fois il pleure, il ne peut contenir ses larmes. Si seulement les autres le voyaient, ils se moqueraient. Comme cette nuit, si seulement les autres le voyaient pleurer une nouvelle fois en dansant, le visage dirigé vers le plafond, les yeux fermés.
Winter s'effondre en morceaux, s'effrite et se sent irréparable.
     Il donne des coups de poings au volant, le frappant même du plat des mains, encore et encore sans pouvoir s'arrêter. Il n'hurle pas, il n'y a que le bruit de ses mains contre le cuir du volant. Ulrich frappe le volant de la voiture jusqu'à ne plus avoir de forces, jusqu'à avoir mal, terriblement mal.
S'il avait une lame de rasoir à côté de lui, il n'hésiterait pas à se trancher les veines.
Comme il l'a dit, des idées noires trottent dans sa tête.

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