Chapitre 9
Un exorcisme !
Même parmi les moines d'expérience, certains ne savaient pas ce que cela signifiait. Mais ils étaient sûrs d'une chose : l'invocation du diable était déplaisante et forcément périlleuse. Le danger était là, pour Harry, pour les autres, pour tout le monde.
Harry retrouva son aplomb.
- C'est la chose la plus ridicule que j'aie entendu de toute ma vie ! Je ne suis pas possédé par le diable !
- C'est exactement la réponse que ferait le démon, rétorqua frère Walden.
- C'est aussi exactement la réponse que ferait un innocent, lança Harry.
Lucius se redressa de toute sa haute stature.
- Si vous n'êtes pas possédé par le démon, commença-t-il lentement, alors vous êtes un dément. Je ne vois aucune autre explication à votre crise de folie.
- Je ne suis pas fou !
- Alors qu'êtes-vous, Harry Potter ?
Le silence tomba. Harry se tordit les mains. Il se sentait comme une bête prise au piège. Il lança un regard éperdu vers le Maître des Novices. Celui-ci semblait impavide, mais Harry vit son front se crisper. Severus réfléchissait furieusement ; dans l'immédiat il n'osait pas croiser le regard de son novice.
Harry se sentait seul et perdu. Comme au bord d'un précipice, il savait qu'un faux mouvement pouvait le jeter dans le vide, tout comme un réflexe astucieux pouvait l'éloigner du danger. Il ne se laisserait pas manipuler par Lucius, il affronterait bravement le péril.
- Je sais pourquoi vous faites tout ça ! lança-t-il, bravache. Nos frères doivent savoir que j'ai été témoin de votre dépravation. Je vous ai dénoncé au comte Cornelius Fudge, et vous êtes prêt à tout pour vous venger !
Il pensait vraiment faire impression sur Lucius. Mais, une nouvelle fois, il avait sous-estimé la noirceur de son caractère. Le prieur était inaccessible à la culpabilité, à la gêne, à la mauvaise conscience. Devant les yeux naïfs de Harry, il éclata simplement de rire.
- Mon garçon, nous voyons tous le démon à l'œuvre dans vos propos insensés. Vous déraisonnez. Vous tentez de salir la plus haute autorité de ce monastère, après Dieu naturellement. Sachez que je ne vous tiens pas rigueur de vos accusations sordides. C'est le diable qui parle par votre bouche. N'ayez crainte, mon enfant, nous allons vous débarrasser de sa présence...
- Je ne déraisonne pas ! jeta Harry avec fureur. Je suis pleinement responsable de ce que je dis. Vous avez tenté de me forcer à commettre avec vous un grand péché !
Intérieurement Harry espérait que d'autres voix s'élèveraient alors pour le soutenir ; il savait bien qu'il n'était pas la seule victime de Lucius, que d'autres, novices ou non, avaient certainement été abordés de la même manière impudique. Mais personne ne se manifesta. La peur, ou la honte, étaient trop fortes...
- Pourquoi aurai-je fait cela ? s'enquit cyniquement Lucius en haussant un sourcil.
- Parce que je...
La voix de Harry traîna. Il ne pouvait pas, il ne voulait pas mêler le nom de Ron à cette histoire. Le piège était particulièrement retors. Mais s'il refusait d'impliquer Ron, Harry pouvait en référer à une autre autorité.
- Faites appeler le comte Cornelius. Il vous confirmera mes accusations, bien avant que je n'ai « ma crise de folie », comme vous appelez de simples cauchemars.
- Son Excellence le comte, dont nous apprécions tous ici la bienveillance et la protection, confirmera certainement que vous lui avez raconté ces odieux mensonges. Cela prouve à mes yeux que le diable s'est emparé de votre âme plus précocement encore que je ne le craignais. Votre plan était véritablement sournois ! Vous risquiez de faire tomber notre monastère en disgrâce auprès du comte : s'il ne nous fournissait plus son soutien moral et financier, que deviendrions-nous, je vous le demande ?