Cloîtré 12.

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Chapitre 12

Cette question tournait inlassablement dans sa tête depuis sa fuite désespérée de l'abbaye. Il se l'était répétée encore et encore, sur tous les tons, suppliant, engageant, pathétique, détaché, se demandant quelle formulation pouvait inciter Severus à accepter. Sa proposition relevait de la folie pure. Tout être sensé la refuserait. Harry s'était placé dans une situation impossible, qui pourrait la lui envier ? Quel être inconscient quitterait la sécurité de l'Ordre s'il n'y était contraint ?

Harry attendait, terriblement conscient des lourds battements de son cœur qui se succédaient ; il ne percevait toujours aucune réaction de son ancien Maître. Celui-ci plissa les yeux comme s'il espérait lire dans ses pensées.

- Je voudrais savoir ce que tu as exactement en tête, Harry. Si tu as peur du monde extérieur, si tu cherches une planche à laquelle te raccrocher comme un poids mort, si tu dégoulines de stupide reconnaissance...

Son amertume augmentait au fil des mots. Si Harry ne l'interrompait pas, il finirait par laisser éclater sa colère et les reproches les plus injustes pleuvraient allègrement. Le jeune homme était accoutumé à son caractère difficile. Il comprenait que celui-ci ne voulait ni gratitude, ni dette, ni pitié. Sa fierté ombrageuse et ses souffrances passées le rendaient terriblement méfiant. Loin d'en être rebuté, Harry se sentait envahi par la tendresse.

- Je vous ai dit que je vous aimais.

- Les déclarations de ceux qui sont à l'article de la mort ne doivent pas être prises avec plus de sérieux que nécessaire.

Téméraire, Harry se rapprocha pour plonger dans les yeux noirs brillant de suspicion et il posa sa main sur la joue qui ne se déroba pas. Il lisait l'incrédulité sur le visage de Severus mais également une hésitation, un flou qui ressemblait à de l'espérance.

- Je l'ai enfin dit parce que je croyais ne plus jamais en avoir l'occasion. Je ne voulais pas disparaître avec ce secret. Cela aurait signifié que mes sentiments n'avaient jamais existé. Je vous aime. Je vous aime.

- Arrête. Tu as l'air d'un enfant qui se grise de mots, qui s'exalte tout seul. Réfléchis bien, Harry. Maintenant que tu es libre, tu vas découvrir des charmes que tu ne peux imaginer. Tu peux te marier, avoir des enfants.

- Non. Je sais que ce n'est pas pour moi.

- Comment un enfant immature tel que toi pourrait-il le savoir ?

- Severus, vous n'avez pas oublié ce qu'est un novice ? Les livres interdits, les conversations secrètes, les rêveries... J'ai connu tout cela. Je peux promettre que, contrairement aux autres, je n'ai jamais rêvé d'une femme. Les récits érotiques des Mahométans ne m'ont jamais attiré. Je sais ce que j'attends de ma vie et je souhaite de toutes mes forces que vous en fassiez partie.

Harry regardait à présent Severus avec angoisse. Il avait donné tous ses arguments, abattu tous ses atouts. Il ne savait que dire d'autre pour le convaincre de sa sincérité. Il manquait d'expérience ainsi que d'audace ; il n'imaginait pas, par exemple, se servir de son corps pour remporter la victoire.

Peut-être Severus fut-il touché par sa candeur. Peut-être ne demandait-il qu'à le croire. Quoi qu'il en soit, il attira à lui le jeune visage ardent et écarta les mèches brunes.

- Je dois être fou. Tu m'es devenu plus cher que toutes mes croyances...

Il fut surpris par la fougue avec laquelle Harry se jeta dans ses bras. Avec maladresse, il lui rendit son étreinte. Il semblait très emprunté en serrant le garçon dans ses bras. Le moment se prolongea. Puis Harry, à regret, se détacha de lui.

Cloîtré.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant