Chapitre 2 l'annonce

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Sagement assise sur sa banquette, elle regardait le paysage défiler dans un silence absolu. Son coeur battait fort contre sa poitrine. Faisait-elle l'objet d'une vente ? La bourse qu'on avait donné à son père pointait en ce sens, mais elle trouvait cet arrangement étrange. Pourquoi le seigneur Westlander voulait l'acheter ? Tout le monde l'avait en aversion. Les villageois la fuyait comme la peste et répandaient des rumeurs à son sujet: quand elle ne forniquait pas avec les bêtes, elle s'amusait forcément à rendre les enfants malades ou à pourrir les récoltes.

Trois fois les villageois avaient appelé l'Inquisition, trois fois l'institution leur avait répondu que leur communauté était bien trop éloigné pour qu'ils puissent envoyer qui que ce soit dans l'immédiat. Les habitants, déçus, s'en étaient pris à sa famille. Pourquoi la gardaient-ils ? Pourquoi nourrissaient-ils la putain responsable de tous leurs maux ? Son père avait évoqué la crainte des représailles. Les sorcières étaient redoutables, mieux valaient les laisser tranquilles.

Une bosse fit faire un bond au coche. Ils étaient sur les routes depuis deux jours et Swan commençait à prendre conscience que plus rien ne serait comme avant. Étrangement, elle était apeurée à l'idée de quitter le village maudit dans lequel elle avait grandit. Son effroi ne faisait que grandir au fur et à mesure que le paysages défilaient. Elle avait beau interroger le personnel de la caravane, personne ne lui répondait, à croire qu'ils étaient tous aussi ignorants qu'elle sur la question.

Soudain, elle eut une sueur froide. Et si c'était l'Inquisition qui l'arrêtait ? « Non, aucun prisonnier ne serait transporté dans un tel véhicule » se tranquilisa-t'elle, alors qu'ils traversaient un village à vive allure.

Elle jeta un oeil à l'extérieur. Dehors, les habitants baissaient leur haut de forme à la vue de la caravane. Swan tira le rideau. Ils s'imaginaient sans doute avoir affaire à quelqu'un d'important. Elle s'apprêtait à se reposer quand le coche ralentit.

- Ouvrez les portes ! s'exclama un garde.

Swan tira son rideau. Ils étaient sur une route pavée faisant face à une muraille. Un frisson la parcouru quand les chevaux reprirent leur course pour franchir les énormes portes de bois et de fer forgé. Le véhicule prit un tournant, puis s'arrêta. Instantanément, le cocher ouvrit la portière et lui présenta sa main qu'elle saisit pour descendre du véhicule. Un pli inquiet se forma entre ses sourcils quand elle réalisa où elle se trouvait. Jamais elle n'avait vu pareille demeure. Le château avait plusieurs étages, quelques balcons, et une tour à moitié mangée par le lierre. Tout autour, des bâtiments s'accolaient à lui comme pour éviter qu'il ne soit trop isolé. Il y avait une forge, des écuries et ce qui semblait bien être une réserve à grain. Tout était rangé, aligné, classé. Aucun animal ne se baladait dans l'enceinte.

- Bienvenue, fit une voix féminine.

Swan se tourna vivement. Derrière le coche, sur les marches menant à l'entrée principale du château, une femme lui souriait. Elle était encadrée d'individus que la jeune femme ne tarda pas à identifier comme étant ses domestiques. Fine et élancée, elle avait de longs cheveux sombres qui lui tombaient jusqu'aux hanches et des yeux clairs qui l'observaient avec curiosité. Swan ne bougea pas, ne sachant pas comment réagir.

- Approchez, l'encouragea-t'elle dans un sourire.

Swan fit le tour du coche et monta les marches une à une, sans se presser. Tous les regards bifurquaient vers elle, l'observant avec attention.

- Je suis si heureuse de vous voir, soupira la femme en saisissant sa main.

Peu habituée à ce genre de familiarité, Swan se raidit de la tête aux pieds. Elle détestait qu'on la touche.

Maleficarum I La main du Diable (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant