Chapitre 19 Hérétiques

8.4K 745 140
                                    

ATTENTION: je vous conseille de relire le chapitre 17 "tout ce qui est à moi est à toi" pour une meilleure compréhension de l'histoire. Bonne lecture :)

Blake marchait derrière les trois hommes. D'expérience, il savait qu'il valait mieux se trouver derrière des étrangers, plutôt que devant. C'était aussi la raison pour laquelle il gardait sa main sur son épée. Bien qu'ils ne semblaient pas être un danger potentiel, il se méfiait. Ce n'était pas aujourd'hui qu'il devait mourir, et surtout pas avant d'avoir accomplit son devoir.

À ces mots, il songea à Swan, réveillant des picotements sur son épaule gauche. La main du diable aimait qu'il salie avec l'Obscur, bien qu'en finalité, cela portait préjudice au Malin. Encore fallait-il qu'il consomme le mariage, ce qui n'était pas le cas: c'était à peine s'il avait réussi à l'émoustiller, s'échauffant au passage. Et maintenant, son désarroi était encore plus grand: sa respiration tremblait sous son énervement, sa peur d'échouer et sa tristesse, sans compter son envie monstre de flanquer un grand coup d'épée dans le dos des trois imbéciles qui étaient venu le chercher. Pire, il désirait se frapper la tête contre les murs, jusqu'à ce qu'il n'en reste plus rien. Impossible. Outre le fait qu'il allait certainement devenir débile, il n'aurait plus la possibilité d'accomplir sa tâche. Or, il ne pouvait y renoncer. C'était dans sa peau, dans ses gènes, dans la partie la plus intime de son esprit. Il devait le faire. Ce soir.

D'instinct, il regretta que Valentina Rossi ne se soit pas retrouvée dans la position de Swan. Cette femme était certes une courtisane mais elle avait l'avantage considérable de ne pas avoir le passé de sa sorcière d'épouse. Copuler avec elle était un jeu d'enfant, c'était même étonnant qu'elle acceptât de se réserver à lui.

À ce sujet, Blake avait plusieurs hypothèses: soit elle était éperdument amoureuse, soit elle espérait qu'il l'épouse, soit elle cumulait les deux premières hypothèses à la fois. Il optait pour la troisième option.

Bien que Valentina paraissait ambitieuse (son frère jumeau n'hésitait pas à la tirer en ce sens), il n'en demeurait pas moins qu'elle lui était incroyablement fidèle. Même après ses noces, elle avait continué de lui transmettre les bruits de couloir du château, lui qui pourtant avait décidé de mettre un terme à leur relation après le mariage (ce qui l'arrangeait bien). Outre le fait que Swan avait été catégorique sur le fait qu'elle ne voulait pas attirer l'attention via les rumeurs d'adultère de son époux, Blake n'avait ni envie de partager de nouveaux moments avec la courtisane, ni de lui payer de nouvelles toilettes, ni de faire quoi que ce soit qui puisse un temps soit peu lui faire espérer qu'il l'aimait pour autre chose que son corps. Néanmoins, la garce tenait bon. Elle avait tenté plusieurs fois de lui parler, voir de le rendre jaloux en se pavanant avec d'autres hommes.

« Idiote » songea Blake. Elle aurait beau tenter de l'amadouer de toutes les façons, jamais il ne changerait d'avis. Valentina représentait tout ce qu'il méprisait à la cour: elle n'était pas intelligente, pas intéressante, et pas indépendante pour deux sous. C'était une sorte de coquille vide sans intérêt, de celles qui suivent juste parce qu'il est normal d'être guidée.

À contrario, Swan lui offrait de plus grandes espérances. Elle était vive dans ses raisonnements, avait d'excellents réflexes et un répondant assez piquant qui pouvait être d'une distinction rare (lorsqu'il n'en devenait pas tout simplement exaspérant).

Il ne savait pas quand est-ce qu'il avait commencé à comparer les deux femmes, mais il était conscient que ce genre de choses se produisait de plus en plus souvent, et pas qu'avec Valentina. De fait, il évaluait souvent sa sorcière d'épouse à d'autres dames de la cour. À la fin, il en revenait toujours au même constat: Swan était de loin la femme la plus débrouillarde qu'il connaissait. Les autres avaient certes de bonnes manières et de beaux équipages, il n'en demeurait pas moins qu'elles étaient stupides d'inefficacité. Incapable de faire de quoi que ce soit de leur main, incapable de prendre sur elle dans des situations difficiles, incapable de faire autre chose que de coudre et lire.

Maleficarum I La main du Diable (terminée)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant