Elle resta longtemps à regarder les soldats franchir un à un les lourdes portes de la cour. Lorsque les gardes les refermèrent, elle alla jusqu'à écouter les bruits des sabots qui s'éloignaient. Et quand enfin tout fut calme, elle s'autorisa à lâcher la colonne sur lequel elle s'appuyait pour se mettre en marche vers les jardins, la mort dans l'âme.
Elle fit à peine attention aux gardes qui l'escortaient, encore moins à Lady Meredith qui l'appelait plus loin derrière elle. Elle ne s'attardait que sur la douleur qu'elle ressentait dans la poitrine, à la honte cuisante qui l'envahissait, et sa peine immense qui ne cessait de la meurtrir.
Elle ne comprenait pas quand elle avait commencé à se plaire avec lui. Et surtout, elle ne comprenait pas pourquoi il l'avait rejeté. Ils s'étaient déjà embrassés. Ce n'était pas la première fois. Et quand ils avaient sauté le cap, il lui avait semblé qu'il n'était pas le moins du monde réfractaire. Elle l'avait sentit au fond d'elle, ce sentiment qui les avait tous les deux envahit avant de se terminer brutalement par l'arrivée de gardes. Ou du moins, elle l'espérait. Parce qu'elle n'avait jamais fait une chose pareille. C'était même sa seule véritable proximité avec un homme (la dernière fois ayant été catastrophique). Alors peut-être qu'elle s'était faite des idées. Peut-être même que ça ne se passait pas comme ça. Et peut-être que le seigneur ne l'aimait pas. Après tout, il n'avait jamais prétendu le contraire (et elle non plus d'ailleurs). Il était même on ne peut plus clair dans ses gestes, et sa façon de parler avec elle. Alors d'où venait cette peine immense ? Il n'y avait pas d'explications logique. Et c'était ça le problème.
Swan sentit sa gorge se serrer. Elle tourna dans un couloir, grimpa les escalier en vue de rejoindre l'étage des Westlander, et sursauta en apercevant une silhouette aux cheveux blonds et bouclés. Elle plissa les yeux, et reconnut Sandro. Celui-ci s'inclina respectueusement.- Lady Swan, fit-il avec politesse.
La façon dont il s'était baissé était si impeccable qu'il n'y avait aucun doute sur ses origines. Sandro Martinelli portait bien son nom. Tout chez lui dégageait la noblesse de son ancienne famille, et Swan pensa que leur éducation devait être bien plus drastique que celle qu'elle avait reçue chez Katherine.
- Sir Sandro, répondit-elle à son tour.
Ses gardes s'étaient arrêtés plus loin derrière elle, sentant sans doute que le danger ne viendrait pas d'un chevalier de l'Exécution. Elle leur jeta un regard distrait, avant de se tourner vers le jeune homme.
- Que faites-vous ? lui demanda-t'elle.
- J'observe la caravane, répondit le chevalier. Regardez, on peut les voir d'ici, fit il en désignant une fenêtre.Swan fronça les sourcils et se plaça à ses cotés. Il pointa du doigt une ruelle, et elle aperçut dans la pente les premiers soldats. À cette hauteur, ils étaient minuscules.
Elle regarda Sandro qui, si on se fiait à ses yeux plissés, tentait de reconnaitre des visages. Impossible. Il finit par la regarder elle.- Il reviendra, dit-il. Il n'aime pas le sud. Il finit toujours par passer à Westlander.
Swan fut surprise de sa réponse. Elle se doutait que son visage décomposé avait dû mettre le jeune homme sur la piste, mais elle lui ignorait un tel franc parlé. Elle se contenta d'acquiescer.
- Pourquoi êtes-vous resté ici ? demanda-t'elle, voyant qu'il se remettait à observer la ville.
Il haussa les épaules avec une certaine forme de déception.
- Le seigneur espère mettre plus de chevaliers au nord en raison des créatures qui pullulent sur ce territoire. Le problème c'est que... J'ai un très mauvais nordien. Or, un bon chevalier de l'Exécution doit maitriser les quatre langues du royaume sur le bout des doigts.
- Et il vous interdit de venir avec lui à cause de cela ? demanda Swan, surprise.
- En partie. Il m'a chargé de retranscrire des parchemins en nordien. Je serai chargé de les remettre à un seigneur dès mon ouvrage terminé. C'est une mission importante, et il y voit un excellent entrainement.
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Maleficarum I La main du Diable (terminée)
FantasyEn raison de ses liens avec l'Obscur, Swan se voit être la bête noire du village. Accusée des pires atrocités et menacée par l'Inquisition, elle vit reclue dans la ferme de ses parents quand ceux-ci decident de la vendre à une riche famille seigneur...