Le Messager de la Vie et de la Mort - Tome 2 : Liens du sang

XIV. Résilience / Partie 1

La psychologue conclut la séance.

- Vous aimez lire ? Vous connaissez la notion de résilience ?

- Que trop bien, répondit le Messager.

- Lire les écrits de Boris Cyrulnik pourrait vous être utile.

En sortant de la pièce, le Messager soupira. La « résilience », cette capacité à rebondir, elle l'avait appliquée toute sa vie. Et Rama avait dû y faire face il y a bien longtemps, après la tentative de meurtre d'Aphrodite.

Deux mois s'étaient écoulés depuis la tentative d'assassinat sur Rama par celle qu'il avait cru aimer. La créature s'était emmurée chez lui, seul avec comme seule compagnie, deux de ses employés qui s'occupaient du nettoyage et de la cuisine. Il errait dans son manoir, tel un fantôme. La créature ne mangeait presque plu, se contentant de quelques pommes ou d'autres fruits. Par contre, trop souvent, il envoyait un de ses employés acheter des boissons alcoolisées. Personne, mis à part son frère et sa sœur d'armes, n'avait eu connaissance de ce qu'il s'était passé. Ces événements douloureux pesaient sur lui, son moral et sa vie. Il passait la majorité de son temps, lorsqu'il ne déambulait pas, le regard vide, assis sur son fauteuil dans son salon, un verre d'alcool à la main. Il buvait pour oublier l'amour, pour ne plus se souvenir de cette nuit d'horreur. Il engloutissait ces boissons pour ne plus revoir la scène lors de laquelle il avait mis sa sœur et son frère d'armes à la porte. Il avait déchiré toutes les images de celle qui avait été sa dulcinée et les avait brûlées dans la cheminée qui avait fonctionné durant toute une nuit. Lui qui adorait l'été n'avait pas mis un pied dehors depuis tout ce temps. La saison avait été ponctuée par les passages fréquents de Wladimir, qui devait lui rendre à nouveau visite le jour-même.

Ce souvenir lui revint à l'esprit et il regarda ses bras en soupirant. Ils étaient sales. Lui qui avait toujours aimé son corps ne s'était pas lavé depuis trois jours, la dernière fois que son frère d'armes était venu le voir. Il dût se faire violence pour se lever, titubant légèrement et monta les marches avec lassitude pour se rendre dans la salle de bain de sa sœur d'armes, puisqu'il n'avait plus franchi la porte de sa propre chambre depuis cette nuit tragique.

- Tu devrais aller voir Rama.

Marie B leva les yeux vers son mari. Elle n'avait pas revu son frère d'armes depuis la nuit où, son ancien tuteur créaturien et elle, lui avaient sauvé la vie.

- On verra.

- Je sais et je comprends que tu lui en veuilles, mais tu ne peux pas vivre sans lui.

- Tu as toujours été trop gentil.

- Et toi, trop rancunière. Tu lui as déjà pardonné par le passé. Pardonne-lui à nouveau.

La femme réfléchit. Elle n'avait pas beaucoup de temps, entre son travail humain, les projets de lois créaturiennes, son mari, ses amis et ses loisirs. Voulait-elle en passer pour celui qui l'avait trahie et abandonnée ? Pouvait-elle seulement lui pardonner à nouveau ?

Uranie avait rejoint son mari en Espagne pour passer quelques jours de vacances. Elle n'arrivait pas à se pardonner la mort de Rama qu'apparemment, si Wladimir avait été mis au courant, il avait décidé de garder secrète. Lucifer ne lui avait parlé de rien. Elle supposait qu'il s'agissait d'une tactique du musicien pour ne pas déstabiliser davantage le clan Kergianov et Marie B.

Elle s'en voulait, mais n'avait personne à qui se confiait. Pire encore, elle était maintenant sous le contrôle du clan de Satan. Elle savait que leur prochaine cible serait Marie B, et elle avait encore le faible espoir de les empêcher de la détruire.