La Source Perdue

Chapitre VIII

Ils dormirent jusque tard dans la matinée ce jour là. Le confort du matelas les happait, les enfermant dans un sommeil confortable comme si le tissu ne voulait plus jamais les laisser partir. Alma se réveilla la première, aux alentours de midi et descendit manger son déjeuner dans la grande salle en attendant que Keïth se réveille.

Elle était remontée contre lui. S'il la détestait autant il n'avait qu'à lui dire une bonne fois pour toutes les raisons qui le poussaient à la haïr, pour qu'elle puisse rectifier le tir, ou au moins qu'elle sache ce qu'elle avait fait pour mériter cette haine, mis à part le fait d'être née Higarienne. Non pas que sa sympathie lui importait particulièrement mais s'ils devaient faire le voyage ensemble, autant bien s'entendre. Et puis ils étaient unis dans l'adversité, ils avaient maintenant les mêmes ennemis, les mêmes menaces et le même but. Elle avait naïvement pensé qu'au moins, cela aurait créé des liens, même un tout petit peu. Mais il s'obstinait à la détester et n'avait visiblement aucune envie de cesser de nourrir cette haine à son égard. La fierté des Manariens...

Il finit par se lever et la rejoindre. Il s'assit en face d'elle alors qu'elle en était à la moitié de son écuelle. Aucun des deux ne prononça un mot et la serveuse ne tarda pas à apporter l'écuelle de Keïth qu'il dévora en peu de temps. Alma, elle, avait eu l'habitude de bien meilleurs repas que celui là, pour lui c'était vraiment rare et cela se voyait ce midi là.

Alors qu'on leur apportait la grappe de raisin en dessert, un homme qui avait tout l'air d'un voyageur entra dans l'auberge et demanda qu'on s'occupe de son cheval, ce que la grosse dame s'empressa de faire. L'homme retira sa cape,  s'installa au bar et on lui servit une liqueur de fleur, largement consommée sur Higaterra, sans même qu'il ait à le demander. Il devait sûrement être un habitué.

        - Toujours sur les routes ? lui demanda le patron de l'auberge derrière son comptoir

         -Toujours, répondit l'homme. Je reviens de Reg'esst.

Alma et Keïth échangèrent un regard angoissé et tendirent l'oreille. Il allait sûrement parler du raffut qu'ils avaient fait à eux deux et peut être qu'ils étaient déjà recherchés. Peut-être même qu'il était un émissaire qui venait répandre la nouvelle et des affiches avec leurs portraits. On en voyait souvent dans la capitale.

-Y'a eu du grabuge, le roi est véxé, dit-il avant de partir dans un rire gras, suivi du patron.

-Qu'est ce qu'il a encore ? On a porté une couleur qui lui plaisait pas à un banquet ?

-Non non, en réalité, je crois qu'on a essayé de lui voler un cheval, il est vexé jusqu'au trognon. On ne parle que de ça dans toute la ville.

-Et il a déjà attrapé les coupables ?

-Non justement, c'est ce qui le met encore plus en rogne. Ce serait deux Manariens apparemment. Son égo a prit un sacré coup!

Un autre homme qui grignotait un morceau de porc dégoulinant de graisse, assis au comptoir se joignit à la conversation.

-         Si je puis me permettre, j'étais aussi dans la capitale y'a pas longtemps encore et ce n'est pas la version que j'ai entendu.

Le voyageur tira la chaise à côté de lui pour inviter le deuxième homme à les rejoindre et le patron lui servit un verre, puis s'en servit un à lui-même. Le deuxième homme reprit.

-         D'après ce que j'ai entendu, c'est un Manarien qui aurait essayé de voler son cheval et il aurait enlevé la petite du Premier Conseiller du Roi.

-         Mais comment il aurait pu faire ça ? Il ne serait pas sorti du palais vivant.

-         Justement, la gamine avait fait des siennes et son père l'a révoquée histoire de lui mettre du plomb dans la tête, continua l'homme. Mais le Manarien qui avait sa responsabilité à essayé de l'enlever en volant un cheval. Il a réussi à s'échapper on ne sait pas trop comment. Toujours est-il qu'on a retrouvé le cheval mais pas la gamine ou le vaurien. Toutes les entrées et les sorties de la ville sont contrôlées.