Dark Wolf

Chapitre 23

  J'engloutis la dernière croute de pizza et soupirai d'aise en tapotant mon ventre plein, deux cartons à pizza vides à coté de moi sur le lit.

- Eh ben dis-donc, s'esclaffa Adyson qui, confortablement installée à ma gauche, terminait à peine la première pizza. On peut dire que t'avais une faim de loup !

Je ne répondis pas, laissant la parole à mon estomac qui émit un grondement satisfait. Adyson eut un rire enfantin. J'avais remarqué qu'elle ressemblait à une petite fille innocente quand elle riait. Le coin de ma bouche s'étira étrangement. Elle s'arrêta un instant et me dévisagea d'un air ébahi.

- Quoi ? Demandai-je. J'ai de la sauce sur la joue ou quoi ?

- Je rêve où c'était un demi-sourire ?

- Comment ? De quoi tu parles ?

- Tu as eu un sourire en coin, affirma la rouquine, l'air impressionnée.

- Moi ? Sourire ? Jamais, dis-je en arborant mon habituelle expression neutre et froide.

- Tu as légèrement souri, insista-t-elle, et j'ai vu une pointe d'amusement dans ton regard, ne le nie pas.

- Crois ce que tu veux, c'est impossible. Je te le dis.

Elle me dévisagea à nouveau, l'air espiègle, et leva les mains avec innocence. Je fis rouler mes yeux et m'essuyai la bouche en l'ignorant.

Nous entendîmes quelqu'un entrer dans la maison, puis Ethen apparut dans la chambre peu après, tenant par les oreilles un lapin fraîchement tué.

- Je t'ai apporté à mang..., commença-t-il avant de voir les cartons à pizza.

- Oh, ben trop tard, lâcha Adyson avec nonchalance en entamant sa deuxième pizza.

La mâchoire de l'Alpha se contracta, témoignant son agacement. Il soupira longuement et dit d'un ton sec :

- La prochaine fois vous vous débrouillerez.

Il nous jeta un regard noir avant de sortir de la pièce avec son lapin.

- Quel caractère de cochon ! S'exclama la jeune fille sans se soucier qu'Ethen nous entendait certainement. Il est presque pire que toi en ce moment.

- Tu as idée de pourquoi il est aussi désagréable ? Demandai-je.

- Pff ! Ne cherche pas à comprendre, tu finiras par avoir une migraine.

Nous ne recroisâmes plus Ethen de la journée. Adyson passa quasiment le reste de l'après-midi en ma compagnie, à me montrer ses films et séries préférés. Je les trouvais tous d'une niaiserie déconcertante, sauf la série Stranger Things, dont l'ambiance sombre et lugubre me mettait plus à l'aise. Malgré le fait que la plupart des choses qu'on partageait ne m'intéressaient pas, j'aimais bien sa compagnie. Cela me permettait d'oublier un moment toute ma douleur, physique et mentale. Je ne m'étais pas sentie aussi bien depuis deux ans.

La nuit tomba, et Adyson dut rentrer chez elle. Elle quitta la chambre en m'adressant un sourire chaleureux suivi d'un "bonne nuit". Je ne pouvais pas nier que ça m'avait touchée. Je restai les yeux dans le vague plusieurs minutes après son départ. Elle m'avait touchée, émotionnellement. C'était déconcertant.

Un chatouillement sous la narine m'arracha de ces pensées. Mon nez rejetait encore cette substance noire, et je sentis une brusque onde de douleur dans ma tête. J'eus l'impression, pendant de longues secondes, que quelque chose s'agitait violemment dans ma boîte crânienne qui semblait menacer d'exploser.

Je vis un visage familier dans mon champ de vision. Kenzo se pencha vers moi, l'air bienveillant. Kenzo. Je me figeais. Il me caressa le front du dos de la main avec douceur, et esquissa un de ces sourires qui me manquaient tant.

- Kenzo..., soufflai-je.

Ce simple prénom à travers mes lèvres déclencha un torrent de larmes noires sur mes joues. Il pouvait suffir que je tende la main, juste un peu, pour que je puisse toucher sa peau tiède. Mais je savais bien que c'était impossible.

- Tu...tu n'es pas réel, sanglotai-je.

Son sourire se transforma soudain en un rictus mauvais. Ses dents devinrent pointues, et un liquide noir et poisseux recouvrit son visage devenu terrifiant. Cette vision cauchemardesque me glaça le sang et me saisit d'angoisse.

- Non...non, non non ! Gémis-je en enfouissant mon tête dans mes mains tremblantes.

- Jade ! Jade, regarde-moi, dit une voix masculine, bel et bien réelle.

Je levai lentement la tête, la vision brouillée par les larmes noires. Ethen était assis en face de moi, l'air inquiet. L'expression qu'il avait était la même qu'au moment où il m'avait aidée à l'infirmerie du lycée : apaisante mais étrange à la fois. Il prit un mouchoir et m'essuya les joues avec.

- Je vais bien, dis-je en repoussant doucement sa main.

Je n'avais pas vraiment envie de me retrouver dans une autre situation embarrassante avec lui, comme à l'infirmerie. Il eut l'air vexé par mon geste, et sa bienveillance laissa brusquement place à l'énervement.

- Ce n'est pas en cachant la vérité que tu vas aller mieux, crois-moi Jade, dit-il avec agacement. Moi, je ne peux rien faire si tu n'accepte pas mon aide. Mais sache un chose, c'est chez moi que tu te reposes en ce moment. Dans ma maison. Alors si j'ai envie de te virer pour que tu pourrisses dehors, je peux le faire quand je veux.

Il sortit ensuite de la chambre aussi vite qu'il y était rentré. Je restai immobile, les yeux dans le vague, ses dernières paroles en écho dans ma tête. Je me rendis compte que rester ici était une mauvaise idée. Je n'avais rien à faire chez l'Alpha d'une meute qui voulait me virer de mon territoire. C'était ridicule, j'étais dans un état d'infériorité et de faiblesse chez mes rivaux. Mais j'étais trop mal en point pour pouvoir me déplacer seule. Je décidai de rester jusqu'à ce que je puisse me déplacer seule, pour ensuite rentrer chez moi et enfin aboutir à la reconquérance de mon territoire.

Je m'affaissai un peu plus dans les oreillers, soulagée d'avoir pris une décision. Je décidai de regarder un peu la télévision qu'Adyson avait installée dans la chambre. Je tombai sur une émission stupide de télé-réalité et changeai plusieurs fois de chaîne pour trouver quelque chose d'intéressant. Je zappai diverses chaînes de dessins animés niais, de clips musicaux clichés ou de publicité, jusqu'à ce que je trouve la chaîne des informations régionales. L'image qui était diffusée à ce moment-là me donna la chair de poule. C'était une photo de Jessica Bradley, le visage lacéré et couvert de sang noir séché.

NDA: Hey, j'ai eu une idée et je voudrais savoir ce que vous en pensez : à certains chapitres, souvent ceux qui sont importants, je pourrais mettre en média (ou en lien à coté) une musique qui m'a inspirée ce chapitre ou qui y est juste bien associée. ça vous plairais ? :)