(Angelia)
Deux semaines sont passées depuis mon arrivée ici. J'hésite entre le temps passe vite ou lentement. Mon esprit s'embrouille. Des heures peuvent paraître des secondes comme des secondes peuvent paraître des heures. Tout dépend de ce à quoi je pense, de ce que je fais. J'ai déjà eu deux rendez-vous avec Mme Trempline, ma psychiatre. Elle est gentille et très patiente. Apparemment ça ne la dérange pas de parler toute seule durant une heure. Bien que parfois, je lui répond, mais seulement quand il s'agit d'un sujet neutre. Comme le déroulement de ma journée, où ce dont j'ai mangé la veille. Je n'aime pas parler de papa, il n'aimait pas non plus. Si je racontais quoi que se soit à quelqu'un, je savais ce qui m'attendait. Même si peu de personnes s'intéressaient à moi, dans l'immeuble.
Étrangement, quand je me concentre sur le monde réel, le temps passe un peu plus vite. Mais je n'y arrive pas. Du moins pas très longtemps.
Surtout depuis que Zachary ne m'adresse plus la parole. Non, plus un seul mot. Certes, je lui avais parlé un tout petit peu et je me disais qu'il allait continuer à le faire, mais je me suis trompée. Il me déteste comme l'avait prédit papa. Il ne fait que me déposer et me ramener au lycée. Là-bas il ne me parle pas, ce qui est bien dans un sens, mais dans l'autre je me sens seule. De toute façon je l'ai toujours été.
Ça y est, après le statue de nouvelle je suis passée au statue de la fille bizarre. Je ne ressens rien face à cette réputation. Oui les autres me regardent étrangement seulement parce que je mange seule et que je ne parle pas, mais c'est tout. Ca ne me dérange pas.
Carla par contre, ne me laisse toujours pas tranquille. Plusieurs fois, durant la première semaine, elle est venue me voir. Elle m'insultait et parlait de mon passé. Mais puisqu'elle ne connait rien de celui-ci, cela ne m'atteint pas.
Quand elle a vu que je m'en fichais, elle a décidé de passer au niveau supérieur et essaye désormais de me toucher et parfois même de m'agripper méchamment. Des millions de flash-back reviennent régulièrement à cause d'elle.
Les soirs je pleure, me remémorant certaines scènes atroces de ma vie. Les nuits je ne dors pas, ou très peu, sinon les cauchemars reviennent.
Je ne me suis toujours pas laissée aller et je fais tout pour ne pas le faire. Mais si elle continue je ne tiendrai pas longtemps. Je sais ce que vous vous dites. Si moi même je m'effraie lorsque je suis en colère, pourquoi je me suis laissée faire face à mon père? Et bien papa est quelqu'un avec une autorité absolument intouchable et ma peur envers lui est bien plus forte que ma haine, aujourd'hui encore. Je n'ai jamais osé me rebeller, les conséquences en auraient été terribles, peut-être même fatales pour mon frêle corps. Et puis il n'est pas comme Carla, loin de là, lui est fort et robuste, mes coups lui auraient été désagréables mais je suis certaine qu'il n'aurait même pas mis un genou à terre. Il m'effraie, terriblement, jamais, au grand jamais, je pourrai un jour porter la main sur lui.
Pour en revenir à Carla, je ne sais ce qu'elle me reproche. Je crois que c'est à cause de Zachary. Mais pourquoi? Il ne me parle même plus. Et moi non plus. Nous n'avons aucun contact, alors je ne comprends pas son problème avec moi. Peut-être est-ce juste comme ça. Comme dans les rares livres que j'ai pu lire, la fille populaire qui s'attaque à la fille innocente.
Seulement je ne compte pas me laisser faire éternellement. Il y aura des représailles, un moment où je craquerai. Et je crains ce moment plus que tout au monde, sauf après papa peut-être. Je sais que personne ne me verra comme avant. Moi-même je me déteste quand je suis dans cet état. Mais ça ne se contrôle pas, comme les excès de colère de Zachary. J'ai appris un peu plus tard qu'il en avait fait une au self à cause de Carla. Certaines rumeurs parlent que je serai la cause de leur dispute. Je n'écoute pas les rumeurs. Simplement quand je passe devant les élèves, ils ne savent pas être discrets.
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Take Me Away [ÉDITÉ EN VERSION PAPIER]
RomanceElle a vécu l'enfer, il voit en elle l'espoir. La survie, Angelia connaît bien. Pendant 17 ans, elle a vécu l'enfer auprès d'un père violent, avant d'être placée en famille d'accueil, complètement traumatisée. Mais vivre le quotidien d'une lyc...