Chapitre 15

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Le château devint une fourmilière avec les préparations du bal. Cela faisait longtemps que tout le château ne s'était pas réunit pour un événement. C'était étrange pour Vestar de se retrouver happé dans tout ce tumulte, obligé de subir des essayages aux côtés du prince.

Aux yeux de la reine, la tenue était le plus important. Alrek avait plus qu'intérêt à porter quelque chose qui aille avec son rang. Il dut aller chez le tailleur plusieurs fois pour divers essayages qui ajustèrent les diverses couches de vêtements. Trois jours avant le bal, la tenue était prête et Vestar devait admettre qu'elle lui allait à la perfection. Il avait l'air d'un roi plus que d'un prince.

La chemise disparaissait sous un pourpoint en soie vert émeraude doublée de laine. Le vêtement lui élargissait les épaules et se resserrait à sa taille, souligné par des motifs brodés de fils dorés. Le pantalon collait ses jambes, tanné dans un cuir noir. Ses bottes montaient jusqu'au dessus de ses mollets, en soulignant le galbe fin et musclé. Avec la cape au col de fourrure et la ceinture maintenant le fourreau de son épée contre sa hanche, il avait l'air à la fois royal et létal. La teinte émeraude lui seyait à merveille. Si la royauté coulait dans le sang, il était évident que Alrek était le digne héritier du trône.

De son côté, Vestar ne savait pas quoi penser de sa tenue. La reine avait expressément refusé qu'il porte une tenue isstadienne. Il avait donc fallu trouver un moyen de lui confectionner une tenue correcte pour un bal à la cour du roi. Il se retrouvait avec une tenue faussement céraméenne qui n'avait demandé aucun effort et qui lui donnait l'air de vivre comme un sauvage dans la forêt.

Il ouvrit la bouche pour protester, quitte à subir des représailles plus tard. Il ne porterait pas cette tenue ridicule. Il ressemblait à un sac.

Alrek se leva de la causeuse qui avait été installée pour lui pendant les essayages de Vestar. Son regard était si glacial qu'il frémit.

- Puis-je savoir ce qu'est cette... chose ? questionna-t-il, sa voix résonnant dangereusement dans l'échoppe.

Le tailleur, une femme épaisse dont la robe marquait chaque rouleau de gras sur son corps et aux yeux enfoncés dans un visage rond, rougit vivement en se redressant. Elle se frotta les mains sur le lourd tissu de sa robe. Elle devait bien avoir le double de l'âge du prince et pourtant, dès qu'il avait haussé la voix, elle s'était ramassée sur elle-même, embarrassée et même effrayée.

- C'est une t-t-tenue de Ceramos... Mon apprentie a... Elle a fait de son mieux, Seigneur.

- Parce que vous laissez une apprentie s'occuper de la tenue de mon knähund ?

- Je suis d-désolée, Seigneur. Je vais la refaire. Je vais recommencer moi-même.

- Je la veux prête pour demain. Je ne supporterais pas le moindre retard. Et je veux une tenue correcte et pas un torchon.

Alrek se tourna vers lui.

- Change-toi et allons-nous-en.

Vestar eut tôt fait de retrouver sa tenue isstadienne chaude et ajustée. Il s'était habitué au poids des diverses couches de vêtements sur lui, à la caresse de la fourrure sous sa mâchoire. Retrouver une tenue céraméenne allait sûrement être étrange et il redoutait de geler sur place.

Alrek laissa sa propre tenue chez la couturière avant de partir. Vestar se cala sur son rythme rapide et nerveux. Il commençait à comprendre comment fonctionnait le prince. Comment ses émotions se manifestaient.

Il semblait étrangement affecté par ce qui s'était passé avec la tenue. Il réagissait comme si l'offense avait été personnelle, dirigée directement vers lui. Vestar n'était pas touché par l'attitude de la couturière. Il s'y était attendu. Il était céraméen avant d'être le knähund du prince. S'ils pouvaient lui faire sentir qu'il n'était pas le bienvenu, ils le feraient.

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