Chapitre 21

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Les mots de la jeune princesse le firent vaciller. Il enroula ses doigts autour des barreaux et plongea dans ses prunelles emplies de venin. La haine qu'il lisait sur son visage fut comme une flèche en plein estomac.

- De quoi parles-tu ?

- Allons, Vestar ! Es-tu idiot à ce point ? Tu ne penses pas que notre mère allait réellement t'envoyer en première ligne sans avoir une idée précise en tête ? Toi, entre tous ?

- Explique-toi, Anda ! Que veux-tu dire ?!

Les battements de son cœur étaient assourdissants. Une image sombre et dangereuse oscillait à la lisière de son esprit.

- Tu es venu ici pour mourir, Vestar ! Tu étais censé mourir bien plus tôt et je n'étais pas supposée avoir à subir tout ça ! Mais il a fallu qu'il s'en mêle ! cria-t-elle en jetant la main vers Alrek. Il a fallu qu'il fasse de toi son chien et qu'il te garde en vie ! Vous me rendez malade, tous les deux. Même papa n'a pas su te guérir.

- Q-Quoi ?

Elle eut un rire mauvais. Elle vint se coller aux barreaux, son visage proche du sien, son haleine fétide lui donnant la nausée.

- J'oubliais ! Tu ne te souviens pas, n'est-ce pas ? Tu ne te souviens pas de lui. Tu ne te souviens d'absolument rien.

Elle se mit à rire, son regard tournant vers Alrek qui demeurait figé sur place. Le prince ne dit rien, restant en retrait. Savait-il de quoi parlait Anda ?

- Explique-toi ! Tout de suite !

- Et si tu lui expliquais, Alrek ? Après tout, c'est votre histoire. Pas la mienne.

- De quoi parle-t-elle ?

La posture du prince avait changé. Il avait l'air plus jeune, plus fragile. Il jeta un regard plein d'appréhension à Vestar. Il se tordait les mains. Il était nerveux. Plus que jamais.

- Viens.

Énervé, Vestar suivit Alrek à l'écart des gardes et d'Anda. Ils se retrouvèrent seuls dans une cavité avec pour seule lumière, une torche.

- Je veux la vérité. Maintenant.

- Quand j'étais enfant, mon père était très ami avec un autre roi. Le roi Thorlack. Ton père.

- C-Comment... ?

- Comment je sais qui tu es réellement ? Nous sommes devenus inséparables depuis nos huit ans. Je passai l'hiver à Ceramos et tu passais l'été ici, à Istapp. Et puis, quand on a eu treize ans... Mon père t'a jeté hors du royaume. C'est entièrement de ma faute si cette guerre a commencé. Tout est de ma faute.

- Je... Je ne comprends pas.

Alrek commença à s'agiter. Il fit les cent pas, se tordit les mains, évita son regard. Il avait du mal à croire à ce que lui racontait le prince. Cependant, il savait qui était réellement Vestar. Le fils de feu le roi Thorlack. L'héritier légitime du trône de Ceramos. Et sa sœur lui avait dit qu'il ne se souvenait pas. Elle avait insinué que c'était leur histoire, à lui et Alrek. Alors se pouvait-il que ça soit vrai ?

- Je... Nous... Nous sommes devenus très proches... Trop proches. En tout cas, au goût de nos parents.

- Vous voulez dire que... ?

- Oui. Le jour où tu as été jeté du royaume, mon père nous a surpris dans ma chambre. Tu ne voulais pas parce que tu savais que c'était risqué mais la journée avait été parfaite et nous avions réussi à échapper à la soirée donnée en bas. Mais mon père est monté pour voir ce qu'on faisait, où nous étions passés. Il avait déjà des doutes sur notre réelle relation alors il est venu en personne au lieu d'envoyer un servant. Et... Il nous a vus... Je... Je t'embrassais et...

DeceitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant