Chapitre 23

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Au milieu de ma torpeur, je crois percevoir quelques bruits. Des sons, des voix... Mes paupières sont lourdes, faute d'être restées inactives trop longtemps.

Lorsque je parviens à ouvrir les yeux, je reprends peu à peu contact avec la réalité. Tout est blanc autour de moi, mis à part le ciel bleu que je peux apercevoir à travers une fenêtre. Je suis allongée sur un lit et recouverte d'un simple drap. Deux personnes sont assises à mes côtés, et semblent se tenir la main. J'ai beau plisser les yeux, je ne reconnais pas leurs visages qui demeurent flous.

Quelques minutes plus tard, je recouvre enfin mes sens. Le voile qui m'empêchait de détailler la pièce se lève enfin. À ma droite se trouvent mes parents, dont les traits sont encore crispés d'inquiétude. Une fois qu'ils se sont aperçus de mon réveil, mon père court chercher un médecin, tandis que ma mère s'empare de ma main et la serre fort. La chaleur de ses doigts refermés sur les miens me soulage : jamais je n'aurais pensé la ressentir de nouveau. Aussitôt des larmes refont surface. Mais je ne peux que me sentir soulagée.

Je ne suis pas encore partie. Je vais pouvoir leur dire adieu, convenablement. Je remercie le destin, puis j'essaie de m'asseoir, tant bien que mal. Chaque mouvement effectué m'arrache une grimace de douleur, mais c'est peu, vis-à-vis de ce qui m'est arrivé précédemment. Sans l'avoir remarqué, mes tympans ne sont plus obstrués et je peux à nouveau entendre le gazouillement des oiseaux. Ma mère se décide à abandonner ma main et finit par se lever, tout en me tendant ses bras. Sans une hésitation, je me blottis dans ceux-ci, essayant de l'enlacer en retour, malgré mon manque crucial de force. Sentir à nouveau sa présence me soulage et me réconforte. Je le sais, je suis toujours une enfant qui, dans des moments pareils, ne cherche qu'un soutien maternel. Je m'estime heureuse d'avoir une mère qui a toujours été là pour me l'offrir. Mon père finit par revenir, avec un médecin, et se précipite à son tour vers moi, pour m'enlacer. Subjuguée par l'amour qu'ils me portent, je laisse les larmes couler d'elles-mêmes, avant que le docteur ne nous interrompe. Il a besoin de faire les diagnostics rapidement, puisque d'autres patients l'attendent.

En effet, il n'a pas été long. Un quart d'heure plus tard, une infirmière nous apporte déjà les résultats de ses analyses. Mes parents les feuillettent, bien que je sois persuadée qu'ils n'y comprennent pas grand-chose. Mon père décide de lire à voix haute les quelques lignes qu'il a saisies :

— C'était à prévoir, puisque l'on est au mois de mai. Cependant, la violence de cette crise n'était pas planifiée. D'après les résultats, il n'y en aura pas d'autres. Il faut qu'elle reste à l'hôpital, par mesure de sécurité.

Il se tourne vers ma mère, qui me regarde d'un air désolé. Je comprends que je ne retournerai pas à la maison. Désormais, cette chambre est la mienne. Et c'est ici que je vais finir mes jours.

Je ne verrai plus ma maison, le collège ou la chambre de Laure. Je ne verrai plus le parc abandonné et le saule pleureur. La seule vision de l'extérieur qui me sera permise sera désormais celle de la fenêtre, à ma gauche. Je souris tristement à mes parents, leur faisant comprendre que je m'y étais préparée. Malgré cela, je ne peux m'empêcher de ressentir un pincement au cœur. Mes parents décident de rester encore quelque temps avec moi, avant de retourner à la maison. Ils m'expliquent que l'hôpital n'a pas assez de chambres libres pour les accueillir, bien que ma situation soit grave. Je les réconforte comme je peux, puis nous discutons de tout et de rien, jusqu'à ce que ce soit l'heure de leur départ. Avant qu'ils ne franchissent la porte de la chambre, je leur demande :

— Est-ce que vous savez où est Laure ?

Je ne peux le cacher. Je suis terriblement inquiète de savoir ce qui lui est arrivé, pendant que j'étais inconsciente. Mes parents se regardent, puis mon père se décide, tandis que ma mère s'éloigne dans le couloir.

Memento MoriOù les histoires vivent. Découvrez maintenant