Chapitre 5 - PV Ernest

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Je ne pouvais pas faire comme si je n'avais pas entendu, Jack n'avait pas dit « ami » avec légèreté. Je devais en avoir le cœur net. Alors qu'elle me tournait le dos, elle me confirma ma crainte et je me crispais. Ne supportant pas non plus qu'elle ne me regarde pas, je suis allé lui prendre le bras pour la faire pivoter. Je l'ai rappelé à l'ordre, mais rapidement je sentis sa colère, sa peine. Je ne pouvais qu'imaginer combien ça pouvait être difficile. J'avais moi-même retrouvé sur la salle d'opération un infirmier que je connaissais et ce fut la plus longue et éprouvante opération que j'avais connu. Aujourd'hui encore je ne pouvais oublier même si les sensations de ne pas être la hauteur à ce moment avaient disparu.

Alors, bêtement, je lui ai demandé pourquoi elle l'avait opéré seule. Pourtant, je le savais, je m'en doutais, elle n'avait eu d'autre choix. Pourquoi refusais-je qu'elle puisse être ainsi blessée ? C'était une épreuve, malheureusement beaucoup d'entre nous y étaient passé, mais pour moi ce n'était pas possible, je me sentais coupable. Coupable de ne pas avoir été là, de n'avoir pu l'aider. Merde, pourquoi elle ne m'avait pas appelé ?

Le calme tenta de reprendre sa place et je viens poser ma main sur son épaule. Je voulais qu'elle sache que j'étais là, pour elle. Qu'elle pouvait me parler. Si elle m'en avait parlé Lundi, il n'y aurait pas eu cet accrochage avec Olivia et j'aurais pu la rassurer plus longuement sur ses gestes lors de l'opération, nous aurions pu étudier ensemble ce qu'elle avait fait. Ne serait-ce que pour la rassurer.

Je voyais qu'elle pensait que je n'avais confiance en elle et ça me faisait mal. Je ne craignais pas qu'elle ait fait une erreur, bien que cela aurait pu, non, j'étais inquiet pour elle. Elle ne le comprenait pas et lorsqu'elle fit référence à ce que je me laisse manipuler facilement, je lui en voulus. Comment pouvait-elle songer que des propos d'autres pouvaient construire tout mon jugement sur une personne ? Il est vrai que j'ai été hésitant au début... Mais plus maintenant.

Et comment pouvait-elle me comparer à ces médecins qui s'éclipsaient avec une collègue dans un placard, s'enfermant dans un bureau ou autre ?! Je n'étais pas ainsi. Et encore moins avec Olivia ou Madison comme elle le faisait sous-entendre. Mais c'est quand elle déclara que ça ne la regardait pas que je sentis cet agacement, cette inquiétude qu'elle avait fait naitre en moi. Comment pouvais-je lui en vouloir de ne pas vouloir se mêler cette partie de ma vie ?

D'abord troublé, je finis par me dire que c'était dû à la frustration de ne pas avoir pris le temps de la connaitre, de sentir les choses m'échapper.

Le jour suivant je ne fis plus mention de cette affaire, je me disais qu'il valait peut-être mieux passer à autre chose. Elle était têtue, elle ne me parlerait pas, même si je sentais toujours que quelque chose clochait dans cette histoire. La journée se passa comme à son habitude, bien que je trouvais l'interne distante. Agacé de la situation, me demandant comment calmer le jeu et lui donner confiance, je manquais d'oublier ce rendez-vous avec Madison.

Mais elle, elle n'avait pas oublié et arriva à mon bureau tout sourire. Je compris en la voyant que j'avais oublié et je fis comme si ce n'était pas le cas, cherchant juste un moyen d'esquiver, je n'avais guère envie de passer la soirée avec elle, j'avais besoin de quiétude. Et puis je me suis dis que finalement, ça me changerait les idées et de toute manière, ça faisait un moment que je retardais.

Alors on partit vers ce bar et on prit une bière, sagement installé dans un coin de la salle, écoutant de façon assez peu attentive ce que me contait la jeune femme lorsqu'elle ne me questionnait pas sur ma vie.

Madison : « Et ta famille est déjà venue te voir ici ? »

Ernest : « Non, ils sont déjà venus à Paris mais avant que je ne vienne travailler. »

Prendre sa décisionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant