La nuit tardait à se terminer. Ou bien était-ce le jour qui tardait à commencer ? Quoiqu'il en soit, le temps s'écoulait lentement. Aingeal attendait, immobile, assise devant le feu qui se reflétait sur son masque. Il projetait ses langues rougeoyantes de façon envoûtante, mais à attendre que le matin pointe son nez, la protectrice allait finir par connaître la chorégraphie des flammes par cœur.
Tandis qu'elle ne cessait de les fixer, la voyageuse faisait tourner entre ses doigts une petite figurine. Un soldat, taillé dans le bois. Il n'était peut-être qu'un simple jouet, pourtant il avait une valeur bien plus importante aux yeux de la femme masquée que ce que vous pouvez imaginer.
Penchez-vous un peu plus sur l'objet, et vous verrez qu'à certains endroits, le bois et la peinture qui le décore sont usés. Cela à cause de fins doigts blancs qui l'ont fait tournoyer encore et encore, pendant de longues heures, depuis de longues années.
Aingeal serra le jouet dans sa main lorsqu'elle entendit un léger gémissement. Elle leva les yeux sur son protégé, en train de se réveiller. Il s'assit et se frotta les yeux, comme pour mieux dissiper la brume du sommeil. La voyageuse rangea l'objet dans sa bourse et rejoignit Thorin.
- Bonjour, dit-elle en s'agenouillant à ses côtés.
Le nain la salua par un grognement, encore engourdi. Les yeux plissés, il dévisagea l'étrangère. Toujours ce visage de fer. Est-ce qu'elle allait finir par le retirer un jour ? Il regarda l'entrée de la grotte. Dehors, il faisait encore noir.
- Quelle heure est-il ?, demanda-t-il.
- Pas loin de 7h00 du matin, elle pencha la tête sur le côté. Comment allez-vous depuis ?
- Mieux.
- Puis-je voir si tout va bien ?
En toute réponse, Thorin se plaça de telle sorte qu'elle puisse ôter les bandages facilement, non sans être incessamment méfiant. Il l'observa glisser ses doigts sur le tissu, avec une grande délicatesse. Et puis, il devint stupéfait. Sur son flanc, la blessure avait laissé place à une légère coupure. Aingeal sourit sous son masque, satisfaite du résultat. Le baume qu'elle avait utilisé avait fonctionné à merveille. Elle remercia silencieusement les elfes de lui avoir donné un peu de leurs soins, depuis sa dernière visite chez eux.
Néanmoins, elle fut la seule à les gratifier. Le prince, au contraire, les blâmait : si les elfes pouvaient être moins égoïstes et ne gardaient pas pour eux leur médecine miraculeuse, beaucoup auraient survécus. Il serra la mâchoire. Et la voyageuse comprit. Elle décida de laisser faire la nature pour finir la guérison, plutôt que d'user de l'onguent.
- Je vous laisse faire vos affaires et vous rhabiller, déclara-t-elle en se levant. Puis s'il vous en dit, mangez un morceau. D'ailleurs, je vous le recommande, car nous n'allons pas nous arrêter avant un certain temps.
Ainsi, les deux individus se préparèrent chacun de leur côté, avant de reprendre la route. Ils n'échangèrent pas un mot pendant toute la journée. Ni celle d'après. Et encore moins celles qui suivirent. D'un commun accord, ils évitaient de parler. S'ils devaient le faire, les phrases nécessitaient d'être brèves et claires.
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The Hobbit - La Corneille du Roi
FanfictionTout roi devrait avoir sa Corneille à l'épaule. Elle est un symbole guerrier, mais aussi de sagesse et de connaissance. Aingeal erre depuis longtemps à travers la Terre du Milieu et les Terres Sauvages, offrant ses services pour vivre. Jusqu'à ce...