Love comes from Hate

Être l'impitoyable Nate...

-Bonjour ! Je suis la petite sœur envahissante de Nathan. Tu dois sûrement être cette fille dont mon frère passe sa vie à parler ?

A la seconde où mon adorable frangine prononça ces traîtres mots, ce fût la promesse d'une longue et très sanglante guerre fraternelle. La garce allait payer le prix cher pour cette humiliation.

-Ne l'écoutez pas, elle est défaillante depuis la naissance, plaisantais-je en soutenant pourtant le regard de Berenice.

Je me trouvais face à Jenny, qui rougissait, et à son père, Kane, qui restait de marbre devant nos petites remarques sarcastiques remplies de sous-entendus venimeux. Etrangement, mon corps n'était ni secoué de tremblements, ni pétrifié. Certes, j'avais murement réfléchi aux multiples solutions qui s'étaient présentées -pendant vingt minutes- avant d'accepter de descendre, mais j'avais fini par me rendre à l'évidence... Me cacher dans le placard de ma chambre et survivre à l'aide de chips fournies par ma petite-sœur, de toute évidence traitresse jusqu'au bout des ongles, ne promettait rien de bon. On aurait sûrement fini par me retrouver après seulement quelques minutes.

-Je suis Dean, je pense que nous nous sommes déjà rencontré, déclara Hower, serrant à son tour la main de Monsieur Anderson.

Jenny le suivit du regard, à la fois troublée et gênée. Elle se demandait sûrement la même chose que moi : Pourquoi était-il présent, et pourquoi j'avais plus facilement accepté ses excuses que les siennes. J'avais tout naturellement soudoyé Dean pour qu'il reste ici, avec moi, afin d'affronter la tempête. Pour le reste, cependant... Aucune idée. Tout ce que je savais, c'était que sa présence me rassurait quand elle traînait dans le coin. Il m'empêchait de ne voir que la douceur et la beauté de cette dangereuse princesse et me rappelait à chaque instant qu'elle pouvait très bien dégainer son sabre à tout moment pour jouer les Kill Bill sadiques avec mon cœur.

-Sûrement, répondit vaguement l'officier Kane.

Bien sûr, qu'il préférait oublier l'épisode de leur rencontre... Personne n'avait envie de se souvenir de ce genre de présentation. Deux adolescents de sexe opposé sur un canapé à l'heure où papa et maman ne sont pas à la maison, il fallait être stupide pour ne pas se rendre compte de ce qui se passait. Monsieur Anderson concentra donc volontiers son regard sur mon père, qui débouchait à ce moment-même une bouteille de grand cru. Nous avions tous grandement besoin d'un petit verre, et pourtant, ils seraient les seuls à en profiter... Jenny, Dean, Berenice et moi n'avions pas vingt-et-un an et Tania, elle, était en cloque, bien qu'aussi mince qu'un sandwich sans tranche de jambon ni beurre de cacahuète. Heureusement, il nous restait toujours la fin de la nuit et la cérémonie du sacre pour finir la soirée comme il se devait : Ivre mort, surfant une vague de lycéen.

-C'est un vin français de deux-mille trois, annonça fièrement James en versant le liquide rouge dans deux verres-ballon.

-Oh, j'aurai dû le dire plus tôt, mais je ne peux pas boire, répondit le père de Jenny. Je suis de service ce soir.

J'avais machinalement les sourcils froncés. De service ? Visiblement, sa fille n'avait pas non plus l'air au courant.

-Comment ça ? L'interrogea-t-elle.

-Je ne te l'ai pas dit ? J'encadre votre cérémonie paillarde ce soir, je dois patrouiller autour du stade à partir de vingt-trois heures. Ordre du maire et du principal.

Ma salle à manger ne comportait ni miroir, ni d'écran géant pour refléter nos visages, mais j'étais à peu près sûr d'avoir viré au blanc cadavérique. Même ma sœur avait perdu son sourire, elle qui comptait prendre sa première cuite, c'était raté. Vengeance, justice, coup du sort, appelez-ça comme vous le voudrez, mais tout ça éveillait chez moi, un sympathique sentiment jubilatoire. Paye ton audace, petite garce.